15ème législature

Question N° 737
de Mme Emmanuelle Ménard (Non inscrit - Hérault )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > santé

Titre > Vaccination obligatoire

Question publiée au JO le : 15/08/2017 page : 4151
Réponse publiée au JO le : 19/09/2017 page : 4466

Texte de la question

Mme Emmanuelle Ménard interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur sa volonté de rendre obligatoire onze vaccins. Lors de la séance des questions au Gouvernement du 26 juillet 2017, Mme la ministre a qualifié de « désinformation » les avertissements de nombreux médecins qui qualifient de dangereux une multi-vaccination systématique. Plusieurs sujets importants inquiètent pourtant de nombreux Français soucieux de la santé de leurs enfants mais égarés par de multiples informations contradictoires. Le lien présumé entre l'autisme et le vaccin contre la rougeole-oreillons-rubéole (ROR) fait polémique. Les spécialistes de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) affirment que « l'administration à 9 mois de la première dose du vaccin ROR chez les enfants admis en collectivité n'a pas de justification en dehors des périodes épidémiques ». Un certain nombre de contre-indications d'utilisation (par exemple, la grossesse qui doit être évitée dans les trois mois suivant la vaccination) laisse également penser que ce vaccin n'est pas sans danger. En outre, la vaccination contre le virus de l'hépatite B pour un nouveau-né laisse perplexe un certain nombre de parents qui savent que ce virus se transmet par le sang, les relations intimes et la seringue d'une personne droguée. Un autre élément inquiétant retient l'attention de parents récalcitrants aux vaccinations obligatoires, notamment après que le docteur Dominique Le Houézec a observé une augmentation de 65 % des cas de sclérose en plaque (SEP) entre 1995 et 1996. Cette hausse est d'autant plus inquiétante qu'elle a succédé, fait-il remarquer, à « une campagne de vaccination de masse » contre l'hépatite B qui a eu lieu en 1994. Selon lui, « les données chiffrées disponibles en France montrent donc un signal statistique certain en faveur d'un lien de causalité entre l'événement vaccination-HB et l'apparition de (SEP), avec une corrélation maximale entre les deux années suivant la vaccination ». Le troisième sujet qui inquiète également les parents d'enfants susceptibles d'être vaccinés est la présence d'aluminium dans 60 % des vaccins. Afin de réconcilier les Français avec les vaccins, et pour ne pas sombrer dans le « complotisme », elle lui demande donc, d'une part, de bien vouloir expliquer dans quelle mesure ces informations sont exactes ou non. D'autre part, elle lui demande quelles dispositions elle compte prendre vis-à-vis des familles qui ne souhaitent pas que les 11 vaccins, ou une partie d'entre eux, soient administrés à leurs enfants et lorsque cela n'est pas jugé nécessaire par le médecin traitant.

Texte de la réponse

La ministre des solidarités et de la santé a pris la décision d'étendre de 3 à 11vaccins l'obligation vaccinale pour la petite enfance à compter du 1er janvier 2018. Les 8 vaccins qui sont aujourd'hui fortement recommandés, concernent la lutte contre la coqueluche, le virus de l'hépatite B, la bactérie Haemophilus influenzae, le pneumocoque, le méningocoque C et les virus de la rougeole, des oreillons et de la rubéole. Cette décision répond à une nécessité de santé publique. La France a des taux de couverture vaccinale meilleurs que les autres pays pour les vaccins obligatoires, mais ils sont en revanche très insuffisants pour la plupart des vaccins recommandés. Cette couverture vaccinale insuffisante est à l'origine d'épidémies, a conduit à la réémergence de certaines maladies et engendre des hospitalisations et des décès évitables. Avant la généralisation de la vaccination, durant la seconde moitié du XXème siècle, on déplorait annuellement 3 000 décès par diphtérie et 200 décès d'enfants par poliomyélite en France. Le tétanos entraînait environ 1 000 décès par an, on en compte aujourd'hui moins de 5 chaque année. Depuis l'introduction de la vaccination, les infections invasives à Haemophilus influenzae de type B ont baissé de plus de 95% alors que l'on observait près de 600 cas par an auparavant. Grâce à la vaccination contre les infections invasives à pneumocoque chez l'enfant depuis 2003, le nombre de ces infections, source d'hospitalisation et de complications, a été réduit de moitié. Grâce à l'immunité de groupe, on observe également une diminution de 40% de ces infections sévères chez l'adulte et les personnes âgées. Les infections invasives à méningocoque C peuvent provoquer de graves séquelles (notamment un retard mental) et sont parfois mortelles. Entre 2011 et 2015, 255 cas ont été déclarés chez des sujets âgés de 1 à 24 ans. Parmi eux, 25 sont décédés. Ces cas et ces décès auraient pu être évités par la vaccination. Les couvertures vaccinales contre l'hépatite B sont insuffisantes en France (40% chez l'adolescent, 60% chez l'adulte). On estime que plus de 2 000 cas d'hépatite B sont survenus en France entre 2006 et 2013 chez des sujets non vaccinés. Outre les atteintes aigües parfois mortelles (14 hépatites fulminantes en 2016-2013 parmi les 408 survenues chez des sujets non vaccinés), ces infections peuvent exposer à des formes chroniques sévères (cirrhose, cancer du foie). En ce qui concerne la rougeole, la couverture vaccinale est de 90% alors que, tant qu'elle n'atteindra pas le niveau de 95 %, le risque de vagues épidémiques périodiques persistera. Entre 2008 et 2016, plus de 24 000 cas de rougeole ont été déclarés en France. Près de 1 500 cas ont présenté une pneumopathie grave, 34 une complication neurologique et 10 sont décédés. L'extension de l'obligation vaccinale permettra de répondre à ces enjeux majeurs de santé publique. En pratique, l'extension à 11 vaccins obligatoires représente 10 injections pour les enfants, étalées sur 2 ans. Au moins 70 % des enfants connaissent déjà ces 10 injections sur 2 ans et 80 % plus de 8 injections. Tous les vaccins obligatoires seront pris en charge à 100 % : 65 % de leur prix est remboursé par l'Assurance maladie, 35 % par les assurances complémentaires qui offrent un « contrat responsable ». Les patients n'auront pas de coût à leur charge. Un rendez-vous annuel sera instauré pour faire l'état des lieux de la vaccination en France (progression de la couverture vaccinale, épidémiologie des maladies concernées, pharmacovigilance, nécessité de faire évoluer la liste des vaccins obligatoires…). Si des oppositions se font entendre, il ressort des données scientifiques disponibles à ce jour, une sécurité des vaccins concernés, très répandus et utilisés depuis longtemps. Ainsi parmi les spécialités vaccinales indiquées chez les nourrissons de moins de 24 mois, aucune d'entre-elles, n'a à l'heure actuelle, fait l'objet d'une préoccupation particulière confirmée en termes de sécurité d'emploi, tant à l'échelon national qu'international. Enfin, l'obligation vaccinale est, en cas de manquement, prévue par le code la santé publique dont l'article L3116-4 du code de la santé publique précise que « le refus de se soumettre ou de soumettre ceux sur lesquels on exerce l'autorité parentale ou dont on assure la tutelle aux obligations de vaccination (…) sont punis de six mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende. » Dans les faits, cette loi est très rarement appliquée