15ème législature

Question N° 739
de M. Mansour Kamardine (Les Républicains - Mayotte )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités et santé
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > sécurité des biens et des personnes

Titre > Alerte sur la santé à Mayotte - Demande ARS spécifique - Calendrier rattrapage

Question publiée au JO le : 15/08/2017 page : 4151
Réponse publiée au JO le : 10/10/2017 page : 4847

Texte de la question

M. Mansour Kamardine interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l'accès aux soins et l'administration de la santé à Mayotte. Avec plus de trois fois moins de médecins par habitant que la moyenne nationale, vingt-cinq fois moins pour ce qui concerne les médecins libéraux, avec un seul centre hospitalier pour deux cent trente mille habitant, avec plus de quatre fois moins de spécialités médicales et chirurgicales que la moyenne en métropole, avec seulement cinq médecins spécialistes hors gynécologues obstétriciens pour l'ensemble du département, avec plus de quatre fois moins de pharmacies par habitant que la moyenne nationale, Mayotte est le plus grand désert médical de France. Les statistiques de l'Agence régionale de santé de l'Océan Indien (ARS OI) sont sans appel : les ruptures de parcours de soins sont multiples, les structures sont surchargées dans des proportions inégalées et les personnels de santé sont en sous effectifs notables et en sur-mobilisation établie, dans tous les domaines. S'ajoute à cette situation la croissance démographique la plus forte de France et l'absence de couverture santé pour plus de quarante pour cent de la population résidant à Mayotte. En effet, plus de la moitié des habitants sont de nationalité étrangère dont quatre-vingt pour cent en infraction avec la législation sur le droit de séjour. Enfin, l'ARS OI est basée à la Réunion et doit assurer le suivi sur cette seule île de cinq hôpitaux dont un CHU, ce qui limite la prise en compte des spécificités de la situation et des besoins en matière de santé de Mayotte. Pourtant, ses spécificités, tant en termes de besoins, de parcours, de structures, d'administration, de démographie, d'éloignement et de situation en matière de couverture maladie nécessitent une prise en compte, une stratégie et des moyens adaptés. Aussi, il lui demande quelles mesures l'État entend prendre d'ici la fin de l'année pour enclencher un rattrapage crédible de l'offre de soins ambulatoires et hospitaliers à Mayotte. Il lui demande également selon quel calendrier et quelles modalités administratives locales et nationales, elle compte mettre en œuvre pour examiner la possibilité de création d'une ARS à Mayotte dans les meilleurs délais.

Texte de la réponse

Les difficultés rencontrées par le département de Mayotte quant à l'accès aux soins et l'administration de la santé renvoient à la nécessité de mieux évaluer ses besoins afin de définir les réponses les plus adaptées à ce territoire. Le flux migratoire de personnes en situation irrégulière en provenance des Comores est constant à Mayotte, ce qui n'est pas sans poser certaines difficultés. En 2011, on y recensait 212 000 habitants, avec une population irrégulière évaluée entre 60 000 à 100 000 personnes supplémentaires. En effet, bien que l'indice de développement humain soit inférieur à Mayotte à celui de la France métropolitaine, le département reste beaucoup plus développé que dans le reste de l'archipel des Comores dont il fait géographiquement partie.  Aujourd'hui, au centre hospitalier de Mayotte, 40 % des prises en charges concernent des patients non assurés sociaux qui ne peuvent bénéficier de l'Aide Médicale d'État, cette aide n'étant pas instituée à Mayotte (il en est de même pour la CMU-C). Le quasi-monopole assuré par le centre hospitalier de Mayotte dans l'offre de soins locale a conduit au maintien d'un régime de dotation globale (DAF) pour son financement.  Par ailleurs, la forte dépendance de la population de Mayotte à l'offre hospitalière, et le relatif sous-recours aux soins (trois fois moins qu'en métropole), impliquent le développement progressif des moyens du centre hospitalier de Mayotte (CHM) dans le cadre de la dotation annuelle de financement (DAF) qui lui est attribuée. Le CH de Mayotte est le seul établissement de santé financé par ce vecteur de financement par l'agence régionale de santé (ARS) océan indien. Cette dotation est fixée par le niveau national dans le cadre des circulaires relatives à la campagne tarifaire et budgétaire des établissements de santé et de son arrêté afférent, on peut donc considérer que les crédits hospitaliers délégués à l'ARS pour le financement des mesures nouvelles sont déjà fléchés à titre impératif par le niveau national. À cet égard, pour répondre aux difficultés rencontrées par ce territoire, la Dotation Annuelle de Financement (DAF) du CHM a été augmentée de manière substantielle ces dernières années (de 135 M€ en 2012 à 183 M€ en 2016). Elle a notamment augmenté de 15 M€ entre 2015 et 2016 atteignant 183 M€ soit près de 10% d'augmentation. En 2017, la DAF devrait atteindre 190 M€. Concernant la création d'une ARS à Mayotte, la taille actuelle des ARS ultra-marines, dont celle de l'Océan indien (La Réunion-Mayotte) est le premier obstacle à la recherche de performance. En effet, la taille de leurs effectifs (effet de masse critique, notamment sur certains segments d'activités) ne leur permet pas de disposer de cadres spécialisés, ce qui restreint leur possibilité d'actions. Au regard de ces éléments, la création d'une ARS à Mayotte ne résoudrait en rien les problèmes actuels. La solution est davantage à rechercher non pas dans la création d'une ARS à Mayotte mais plus dans la nécessité de revoir les modalités organisationnelles entre les deux territoires afin de mieux prendre en compte les spécificités de Mayotte. Le renforcement de la complémentarité entre le CHU de la Réunion et le CH de Mayotte doit être également mis en avant dans le cadre d'une relation privilégiée entre ces deux territoires. Au-delà de ces enjeux strictement sanitaires, il convient également de rappeler que Mayotte connait un déficit global d'attractivité pour les professionnels, notamment du fait d'une forte insécurité perçue, de la faible qualité de l'offre en logements et d'un système éducatif saturé peu propice à l'accueil des familles. La mobilisation des acteurs locaux et nationaux est nécessaire pour proposer des conditions de vie plus attractives et propices à de futurs recrutements.