Quel encadrement pour le nouveau marché du coaching scolaire ?
Question de :
M. Ugo Bernalicis
Nord (2e circonscription) - La France insoumise
M. Ugo Bernalicis appelle l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, sur la régulation du marché naissant du coaching scolaire. La plateforme Parcoursup, ouverte depuis le 15 janvier 2018, implique pour chaque vœu formulé de fournir un projet de formation motivé, ou encore un curriculum vitae et d'autres documents demandés comme des expériences de stages en fonction des formations. Il souhaite signaler que sous couvert d'un prétendu changement d'ordre technique - de plateforme - le Gouvernement renforce au contraire les inégalités en matière d'orientation. En effet, la rédaction d'un projet de formation motivé participe d'une sélection qui ne dit pas son nom, au regard entre autres de l'inégal rapport à l'écrit dans la société, comme l'a décrit en son temps Pierre Bourdieu et comme le confirme Bernard Lahire dans des travaux plus récents. Il s'inquiète ici d'une autre conséquence liée à la mise en place de la plateforme Parcoursup, à savoir la naissance d'un marché privé du coaching scolaire. Depuis le début de l'année de nombreuses officines privées proposent désormais d'accompagner, et ainsi de se substituer aux conseillers d'orientation-psychologue, les élèves de terminale dans la constitution de leurs dossiers de candidature. En jouant sur un ressort émotif puissant, reposant sur le souhait légitime de tout parent d'assurer un avenir meilleur à ses enfants, ces entreprises privées ont développé une offre de services à des prix prohibitifs. Le développement d'un marché privé du coaching scolaire est le signe de l'échec des politiques publiques d'orientation et accroît encore les inégalités en la matière. Le député tient à signaler que puisque le Gouvernement a contribué à créer ce marché du coaching scolaire, il doit donc en tirer les conséquences et s'attacher à réguler ce secteur. Il souhaite faire remarquer qu'à l'heure actuelle n'importe qui peut se déclarer "coach scolaire", il n'existe aucune formation préalable, aucune certification, aucun encadrement en la matière. En outre, il souhaite alerter la ministre sur une autre conséquence néfaste liée à la constitution de ce marché privé du coaching scolaire, celle relative au crédit d'impôt pour les services à la personne. Par exemple, des entreprises comme Acadomia ont déjà recours à cette niche fiscale dans le cadre de cours particuliers à domicile. Il s'inquiète donc que ce modèle ne soit copié pour le coaching scolaire, qui bénéficiera essentiellement aux foyers les plus aisés. Ce mécanisme de subventions conduirait l'État à favoriser les inégalités sociales ! Il l'interroge ainsi sur les mesures qu'elle compte prendre d'une part pour réguler un marché, auquel le Gouvernement a donné naissance en instituant la plateforme Parcoursup et d'autre part pour éviter que le recours au coaching scolaire ne donne droit à un crédit d'impôts, qui cautionne les inégalités.
Réponse publiée le 6 novembre 2018
A l'issue de la concertation sur la réforme de l'accès à l'enseignement supérieur lancée le 17 juillet 2017 et rassemblant tous les acteurs de l'enseignement supérieur, le Premier ministre a présenté le « plan étudiants » le 30 octobre 2017. C'est dans ce cadre que la loi du 8 mars 2018 relative à l'orientation et à la réussite des étudiants (ORE) a été promulguée. La nouvelle rédaction de l'article L. 612-3 du code de l'éducation repose sur les principes suivants : la garantie du droit d'accès à l'enseignement supérieur, la personnalisation des parcours, le dernier mot laissé au candidat dans la mesure où il peut recevoir plusieurs propositions et il décide de son choix, une meilleure orientation en continu et une meilleure information. Sur ces deux derniers points, toute une série de mesures ont été prises qui sont inscrites dans le Plan Etudiants gouvernemental. Tout au long de l'année de classe de terminale, les futurs étudiants sont désormais guidés dans leur orientation. Depuis début 2018, deux professeurs principaux par classe accompagnent les élèves de Terminale. Plusieurs axes ont été retenus. Deux semaines sont consacrées à l'orientation dans chacune des années de lycée. En lien avec le premier conseil de classe de Terminale, une première semaine vise à aider les lycéens à préciser leur projet d'avenir. En dialogue avec les équipes éducatives, ils affinent leur connaissance des métiers et des études supérieures qui y conduisent. Avant les vacances d'hiver, une deuxième semaine vise à éclairer les lycéens au moment de formuler leurs voeux d'orientation. Cette semaine coïncide avec la période des journées « Portes ouvertes » organisées par les établissements d'enseignement supérieur. Les conseils de classe ont un rôle renforcé. Lors du conseil de classe du premier trimestre, l'équipe éducative prend connaissance des intentions des lycéens et formule des conseils et des recommandations pour alimenter leur réflexion et, le cas échéant, les aider à affiner leur projet. L'échange avec chaque lycéen se poursuit tout au long du deuxième trimestre. Le conseil de classe du 2e trimestre examine les voeux des candidats afin de contribuer aux avis portés par le chef d'établissement. Chaque avis est transmis via une « fiche Avenir » aux établissements d'enseignement supérieur que le lycéen souhaite rejoindre pour chacune des formations envisagées. Durant toute cette période, les CIO et les psychologues de l'éducation nationale accompagnent les lycéens. Des volontaires en service civique au sein des CIO et des établissements scolaires ou supérieurs sont également mobilisés auprès des lycéens sur des missions complémentaires d'aide à l'orientation : ce sont les étudiants ambassadeurs. Sur la plateforme Parcoursup, une information précise est fournie aux candidats sur les contenus et les attendus des formations ainsi que sur les débouchés professionnels ou les poursuites d'études. Le descriptif des attendus permet d'éclairer le choix des futurs étudiants et de limiter les erreurs d'orientation et les échecs pour cause de méconnaissance du contenu des études, des connaissances et compétences attendues et des perspectives professionnelles. L'ensemble de ces mesures s'adressent à tous les élèves qui bénéficient ainsi des mêmes sources d'information et de conseil et auront pour effet de limiter les inégalités sociales et culturelles qui peuvent exister entre les candidats. Cet accompagnement à l'orientation des élèves mené par l'institution scolaire concernera à terme toutes les années de l'enseignement secondaire. L'intérêt du « coaching scolaire », auquelles les familles sont par nature susceptible de recourir, s'en trouvra largement relativisé.
Auteur : M. Ugo Bernalicis
Type de question : Question écrite
Rubrique : Enseignement supérieur
Ministère interrogé : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Ministère répondant : Enseignement supérieur, recherche et innovation
Dates :
Question publiée le 24 avril 2018
Réponse publiée le 6 novembre 2018