Alerte scientifique sur les fongicides
Question de :
Mme Delphine Batho
Deux-Sèvres (2e circonscription) - Nouvelle Gauche
Mme Delphine Batho interroge Mme la ministre des solidarités et de la santé sur l'alerte lancée par un collectif de chercheurs de l'INSERM, du CNRS et de l'INRA, de médecins de l'APHP et de professeurs des universités concernant les effets sur la santé humaine des inhibiteurs de la succinate déshydrogénase (SDHI). Le collectif de chercheurs appelle à la suspension de l'utilisation des SDHI utilisés à grande échelle comme antifongiques en agriculture. Ce sont près de 70 % des surfaces de blé tendre, 80 % de celles d'orge d'hiver, mais aussi des semences, des fruits, des pelouses qui sont traitées chaque année par ces produits. Les SDHI visent à bloquer une étape clé de la respiration des champignons, celle assurée par la succinate déshydrogénase (SDH). Or les mutations génétiques de la SDH sont la cause de maladies humaines : encéphalopathies sévères chez de jeunes enfants, formation de tumeurs du système nerveux, prédisposition à certains cancers du rein ou du système digestif. Le collectif de chercheurs appelle à la suspension de l'utilisation de ces produits tant qu'une estimation des dangers pour la santé n'aura pas été réalisée par des organismes publics et indépendants des industriels. Elle lui demande les suites que le Gouvernement entend donner à cette alerte.
Réponse publiée le 5 mars 2019
Le 15 avril 2018, un collectif de chercheurs a lancé une alerte concernant les risques pour la santé humaine que pourrait présenter l'utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une substance active de la famille des SDHI. Cette famille chimique tire son nom de la capacité des substances la composant à bloquer la respiration cellulaire en agissant sur une enzyme, la succinate déshydrogénase, qui est par ailleurs impliquée dans le métabolisme d'un grand nombre d'organismes vivants dont l'homme (SDHI pour succinate dehydrogenase inhibitors). À ce jour, onze substances actives de la famille des SDHI entrent dans la composition de produits phytopharmaceutiques autorisés en France. Ils sont utilisés depuis une vingtaine d'années pour le traitement des maladies fongiques des céréales, de la vigne, des vergers, des légumes et des plantes ornementales. L'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) s'est saisie de la question soulevée par le collectif le 18 avril 2018 et a publié son avis le 15 janvier 2019 (avis et rapport de l'Anses du 15 janvier 2019 relatif à « l'évaluation du signal concernant la toxicité des fongicides inhibiteurs de la succinate deshydrogénase (SDHI) ) ». L'agence a considéré les données de la littérature scientifique, des évaluations européennes des substances concernées et les données issues de la phytopharmacovigilance. Elle relève que le niveau d'exposition par voie alimentaire est faible, avec des dépassements de limites maximales de résidus exceptionnels selon les données de surveillance, et que ces substances sont rapidement éliminées de l'organisme. L'Anses conclut que les informations et hypothèses évoquées n'apportent pas d'éléments en faveur d'une alerte sanitaire pour la santé humaine et l'environnement en lien avec l'usage agricole des SDHI, qui pourrait justifier la modification ou le retrait des autorisations de mise sur le marché en vigueur. Pour autant, l'Anses va s'attacher à approfondir les connaissances sur les dangers et les expositions liés à ces substances. De plus, la surveillance des substances SDHI est renforcée dans le programme de surveillance et de contrôle des résidus de pesticides conduit en 2019. L'avis de l'Anses va être transmis à la Commission, aux autres États membres et à l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA).
Auteur : Mme Delphine Batho
Type de question : Question écrite
Rubrique : Santé
Ministère interrogé : Solidarités et santé
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Dates :
Question publiée le 24 avril 2018
Réponse publiée le 5 mars 2019