15ème législature

Question N° 8153
de M. Didier Quentin (Les Républicains - Charente-Maritime )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > entreprises

Titre > Intervention des commissaires aux comptes dans les petites entreprises

Question publiée au JO le : 08/05/2018 page : 3825
Réponse publiée au JO le : 10/07/2018 page : 6076

Texte de la question

M. Didier Quentin appelle l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conséquences d'une éventuelle remontée des seuils d'intervention des commissaires aux comptes dans les petites entreprises. En effet, le Gouvernement a confié, en novembre 2017, une mission à l'inspection générale des finances (IGF) sur le niveau pertinent des seuils d'audit légal des comptes. Or plusieurs déclarations gouvernementales, en anticipation des conclusions du rapport de l'IGF, ont laissé entendre que les contrôles des commissaires aux comptes pourraient être supprimés dans les petites entreprises. Ces annonces, si elles venaient à se confirmer, ne seraient pas sans conséquence, tant pour les 13 000 professionnels de l'audit que pour les dirigeants, les associés, les salariés et les partenaires de ces petites entités. En outre, il convient de rappeler que le commissaire aux comptes est le garant de la sincérité, de la fiabilité et de la transparence des comptes, ainsi que du respect du droit des entreprises. Il joue également un rôle clé en matière de prévention des difficultés, ce qui permet de prévenir et de réduire le risque de défaillance pour certaines d'entre elles. La suppression de leurs interventions dans les petites entreprises serait un signal négatif envoyé en matière de transparence financière, de lutte contre la fraude et le blanchiment. Enfin, une telle mesure pourrait entraîner une inéluctable concentration du marché de l'audit autour de grands cabinets qui pourrait avoir comme conséquence une augmentation du coût de ces missions. Cette concentration serait également préjudiciable à l'important maillage territorial de cette profession au service de l'économie régionale et locale. C'est pourquoi il lui demande la position qu'il entend prendre sur cette affaire sensible.

Texte de la réponse

Dans le cadre du plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), le Gouvernement souhaite alléger les obligations pesant sur les petites entreprises, afin de faciliter leur développement. Parmi les mesures envisagées, à cet effet, le relèvement de certains seuils, réglementaires et fiscaux, constitue une orientation importante pour réduire les charges administratives qui leur sont applicables. Dans ce cadre, le Gouvernement envisage, en effet, de relever les seuils de certification légale des comptes, par un commissaire aux comptes, au niveau prévu par le droit européen, c'est-à-dire 8 M€ de chiffres d'affaires, 4 M€ de bilan et 50 salariés. Une analyse, conduite par l'inspection générale des finances (IGF), a en effet démontré que la pertinence de seuils d'audit légal, plus faibles que ceux fixés par le droit européen, n'est pas établie tant du point de vue de la qualité des comptes des petites entreprises, que de leur accès au financement. Le rapport de l'IGF démontre, en outre, que les coûts supportés par les petites entreprises françaises, qui ne sont pas visées par l'obligation européenne de certification légale des comptes, sont élevés (de l'ordre de 600 M€, soit en moyenne 5 511 € par an pour une entreprise située sous les seuils européens). Pour cette raison, il semble pertinent, au regard des enjeux financiers limités associés, de rendre facultative l'intervention d'un commissaire aux comptes dans les petites entreprises, alors que 75 % d'entre elles recourent, en parallèle, aux services d'un expert-comptable, qui concourt, d'ores et déjà, à la qualité comptable dans ces structures. Cette démarche est conforme à l'objectif fixé par le Premier ministre, dans la circulaire du 26 juillet 2017 relative à la maîtrise des flux réglementaires et de leur impact, d'identifier et d'éliminer les surtranspositions du droit européen dans notre droit national, alors qu'un nombre significatif d'États membres ont fixé des seuils identiques ou supérieurs à ceux prévus par le droit européen. Elle est également pleinement cohérente avec les orientations du Gouvernement visant à établir un nouveau contrat avec les entreprises, fondé sur la restauration de liens de confiance mutuelle entre l'État et les acteurs économiques, et, ainsi, une diminution du poids des contrôles et une responsabilisation individuelle accrue, comme en témoigne la création d'un droit à l'erreur, prévu par le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance. Le relèvement des seuils d'audit constitue un défi pour la profession de commissaires aux comptes, impliquant une évolution en profondeur de son activité. Afin d'étudier, de manière précise, les conséquences de cette réforme et d'envisager les mesures d'accompagnement nécessaires, l'appui d'une mission présidée par M. Patrick de Cambourg - Président de l'Autorité des normes comptables, a été sollicitée sur l'avenir de la profession. Cette mission aura, notamment, pour objectif d'identifier des missions nouvelles, légales ou non, pouvant être confiées aux commissaires aux comptes ; de rechercher les moyens pour renforcer l'attractivité de cette profession et de permettre le maintien d'un maillage territorial suffisant de la profession dans les territoires ; de proposer des mesures d'aide aux professionnels les plus touchés par la réforme ; enfin, de formuler des propositions visant à favoriser le développement de l'expertise comptable et à enrichir ses missions d'appui et de conseil aux entreprises ne disposant pas d'un commissaire aux comptes. Les conclusions de cette mission permettront au Gouvernement d'adopter, d'ici à l'été 2018, un plan d'action visant à accompagner la mise en œuvre du relèvement des seuils d'audit.