15ème législature

Question N° 8225
de M. Laurent Garcia (Mouvement Démocrate et apparentés - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Action et comptes publics
Ministère attributaire > Action et comptes publics

Rubrique > taxe sur la valeur ajoutée

Titre > Éligibilité au FCTVA des travaux portés par les établissements publics fonciers

Question publiée au JO le : 08/05/2018 page : 3814
Réponse publiée au JO le : 18/09/2018 page : 8244
Date de signalement: 17/07/2018

Texte de la question

M. Laurent Garcia attire l'attention de M. le ministre de l'action et des comptes publics sur l'éligibilité au fonds de compensation de la TVA des travaux portés par les établissements publics fonciers. En effet, un grand nombre de collectivités qui ne disposent pas immédiatement des ressources budgétaires suffisantes procèdent à des opérations de portage foncier, bâti ou non bâti. Or dans le cas d'un portage d'un bien immobilier sur lequel la collectivité devrait réaliser des travaux avant la remise du bien en fin de portage, ces travaux ne sont pas éligibles au FCTVA, ce qui a pour effet d'augmenter le coût de l'opération pour la collectivité. Si le bien porté a vocation à entrer dans le patrimoine de la collectivité au terme de l'opération de portage, l'éligibilité des travaux considérés au FCTVA paraîtrait légitime et pourrait justifier un contrôle a posteriori. Il souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement concernant cette attente de nombreuses collectivités.

Texte de la réponse

Conformément aux dispositions des articles L. 324-1 et suivants du code de l'urbanisme, les établissements publics fonciers locaux (EPFL) sont des établissements publics locaux à caractère industriel et commercial, compétents pour réaliser, pour leur compte, pour le compte de leurs membres ou de toute autre personne publique, toute acquisition foncière ou immobilière en vue de la constitution de réserves foncières ou de la réalisation d'actions ou d'opérations d'aménagement. Or le FCTVA ne bénéficie qu'aux collectivités locales et non à des organismes extérieurs, et ne peut intervenir que sur des biens dans la collectivité est propriétaire (principe de patrimonialité). Elargir l'éligibilité à une dépense réalisée par un bénéficiaire extérieur sur un bien faisant l'objet d'un portage foncier serait contraire à ces deux principes et complexifierait fortement le dispositif. Par ailleurs, lors de la revente à la collectivité, les biens éligibles peuvent déjà bénéficier du FCTVA sous condition d'un transfert de propriété de l'actif prévu dans la convention de portage. Cette mesure pourrait en outre être en contradiction avec le droit communautaire. En effet, dans le cadre de ces missions, un EPFL est amené à réaliser des acquisitions foncières qu'il a vocation à revendre aux personnes publiques pour le compte desquelles il intervient après les avoir portées et, le cas échéant, avoir réalisé des travaux de pré-aménagement (remise en état par dépollution notamment). Ces opérations d'achat-revente caractérisent l'exercice d'une activité économique au sens de l'article 256 A du code général des impôts (CGI). Toutefois, conformément à l'article 13 de la directive TVA, transposé à l'article 256 B du CGI, une personne publique peut demeurer non assujettie alors même qu'elle exerce une activité économique lorsque son non-assujettissement ne conduit pas à des distorsions de concurrence. A cet égard, le juge communautaire considère qu'un organisme public doit être soumis à la TVA dès lors que l'activité qu'il exerce entre, ne serait-ce que de manière potentielle, en concurrence avec celle d'opérateurs privés assujettis, pour autant que la possibilité pour ces derniers d'entrer sur le marché considéré soit réelle, et non purement théorique (CJUE, 16 septembre 2008, Aff.C-288/07, « Isle of Wight Council »). Or alors même que les EPFL pourraient être regardés comme agissant en tant qu'autorité publique à raison des procédures mises en œuvre dans le cadre de leurs opérations d'achat-revente de biens immeubles, il n'en demeure pas moins que de telles opérations sont susceptibles d'être réalisées par des opérateurs privés et doivent, par conséquent, être regardées comme emportant potentiellement des distorsions de concurrence au sens des critères dégagés par la jurisprudence communautaire. Il en résulte que les opérations immobilières réalisées par les EPFL, ou une collectivité territoriale qui s'inscrit dans une démarche économique d'aménagement de l'espace ou de maîtrise d'ouvrage, entrent nécessairement dans le champ d'application de la TVA. Le principe de neutralité fiscale s'opposant à ce que des opérations identiques fassent l'objet d'un traitement distinct au regard de la TVA, toute mesure visant à soustraire un organisme public à la taxe serait contraire au droit communautaire. Cela étant, l'assujettissement à la TVA des EPFL n'est pas de nature à augmenter la charge fiscale pesant sur les acquisitions d'immeubles et les interventions qu'ils sont amenés à réaliser dès lors que la taxe grevant ces opérations est déductible dans les conditions de droit commun. Tel est le cas lorsque la collectivité territoriale qui recourt à un EPFL destine les terrains aménagés ou les immeubles à la revente, dans le cadre d'opérations d'aménagement foncier (création de zones d'activités économiques ou de lotissement par exemple). Par ailleurs, les départements bénéficient déjà d'un concours au titre de travaux sur le foncier avec la dotation globale d'équipement (DGE) dont deux fractions sur trois (articles L.3334-10 à L.3334-12 du CGCT) financent des dépenses d'aménagement foncier, la troisième étant allouée pour les départements à faible potentiel financier. Ce concours permet de subventionner les différents maîtres d'ouvrages qui conduisent ce type d'opérations. Cette dotation s'élève à 212 M€ en LFI 2018 soit une reconduction du montant issu de la LFI 2017. Pour l'ensemble de ces motifs, le Gouvernement n'est pas favorable à cette proposition.