15ème législature

Question N° 8294
de M. Jacques Krabal (La République en Marche - Aisne )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Économie et finances

Rubrique > entreprises

Titre > Seuil d'exemption de l'audit légal

Question publiée au JO le : 15/05/2018 page : 3978
Réponse publiée au JO le : 10/07/2018 page : 6076

Texte de la question

M. Jacques Krabal attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les seuils d'exemption de l'audit légal envisagés dans le projet de réforme des PME. La volonté du Gouvernement dans la réforme des PME vise à accroître leur compétitivité : l'exemption de l'audit légal par des commissaires aux comptes qui s'appliquerait, si les seuils étaient relevés, permettrait ainsi aux PME de réaliser une économie d'une moyenne de 3 000 euros par an. Si cette mesure vise à alléger le quotidien des PME, elle interpelle sur plusieurs points. D'abord pour l'avenir des commissaires aux comptes qui, exceptés les grands cabinets d'audit nationaux, sont eux aussi des petites PME dont l'activité est de fait menacée à travers cette réforme. La profession craint terriblement ce projet, en particulier dans des territoires dont l'économie est principalement maillée de PME comme dans l'Aisne. Si c'est une charge en moins pour les PME, qui permettra sans doute de dégager un peu de trésorerie, il lui semble que son coût est dérisoire au regard de la compétitivité et de la plus-value que les commissaires aux comptes leur apportent. En effet, au-delà de l'obligation légale de certification des comptes, les commissaires aux comptes jouent également un rôle dans la préservation de l'emploi, et l'allègement du travail de la justice en exerçant un contrôle régulier permettant de réduire la fraude, d'effectuer des alertes en cas de situations économiques compliquées, et ainsi de limiter les risques d'insolvabilité des petites entreprises, de sécuriser le crédit inter-entreprises, principal mode de financement des TPE-PME. C'est un regard objectif, expert et externe qui peut être un bon appui pour un dirigeant d'entreprise afin d'améliorer son organisation et de se développer de manière pérenne, sans oublier les obligations de bonne gestion financière. Il lui semble que cette mesure, a priori positive pour les petites et moyennes entreprises françaises, peut devenir un cadeau empoisonné du point de vue de leur gestion et remettre en cause toute une profession qui pourtant, semble incontournable à l'économie du pays. Cette réforme, qui s'appuie sur celle de l'Union européenne, semble déjà être revue dans certains États membres : les seuils d'exemption de l'audit légal varient d'un État à un autre, pour s'adapter au plus près de leur tissu économique. Il lui demande s'il ne serait pas possible d'adapter dès maintenant ces seuils au maillage économique français.

Texte de la réponse

Dans le cadre du plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), le Gouvernement souhaite alléger les obligations pesant sur les petites entreprises, afin de faciliter leur développement. Parmi les mesures envisagées, à cet effet, le relèvement de certains seuils, réglementaires et fiscaux, constitue une orientation importante pour réduire les charges administratives qui leur sont applicables. Dans ce cadre, le Gouvernement envisage, en effet, de relever les seuils de certification légale des comptes, par un commissaire aux comptes, au niveau prévu par le droit européen, c'est-à-dire 8 M€ de chiffres d'affaires, 4 M€ de bilan et 50 salariés. Une analyse, conduite par l'inspection générale des finances (IGF), a en effet démontré que la pertinence de seuils d'audit légal, plus faibles que ceux fixés par le droit européen, n'est pas établie tant du point de vue de la qualité des comptes des petites entreprises, que de leur accès au financement. Le rapport de l'IGF démontre, en outre, que les coûts supportés par les petites entreprises françaises, qui ne sont pas visées par l'obligation européenne de certification légale des comptes, sont élevés (de l'ordre de 600 M€, soit en moyenne 5 511 € par an pour une entreprise située sous les seuils européens). Pour cette raison, il semble pertinent, au regard des enjeux financiers limités associés, de rendre facultative l'intervention d'un commissaire aux comptes dans les petites entreprises, alors que 75 % d'entre elles recourent, en parallèle, aux services d'un expert-comptable, qui concourt, d'ores et déjà, à la qualité comptable dans ces structures. Cette démarche est conforme à l'objectif fixé par le Premier ministre, dans la circulaire du 26 juillet 2017 relative à la maîtrise des flux réglementaires et de leur impact, d'identifier et d'éliminer les surtranspositions du droit européen dans notre droit national, alors qu'un nombre significatif d'États membres ont fixé des seuils identiques ou supérieurs à ceux prévus par le droit européen. Elle est également pleinement cohérente avec les orientations du Gouvernement visant à établir un nouveau contrat avec les entreprises, fondé sur la restauration de liens de confiance mutuelle entre l'État et les acteurs économiques, et, ainsi, une diminution du poids des contrôles et une responsabilisation individuelle accrue, comme en témoigne la création d'un droit à l'erreur, prévu par le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance. Le relèvement des seuils d'audit constitue un défi pour la profession de commissaires aux comptes, impliquant une évolution en profondeur de son activité. Afin d'étudier, de manière précise, les conséquences de cette réforme et d'envisager les mesures d'accompagnement nécessaires, l'appui d'une mission présidée par M. Patrick de Cambourg - Président de l'Autorité des normes comptables, a été sollicitée sur l'avenir de la profession. Cette mission aura, notamment, pour objectif d'identifier des missions nouvelles, légales ou non, pouvant être confiées aux commissaires aux comptes ; de rechercher les moyens pour renforcer l'attractivité de cette profession et de permettre le maintien d'un maillage territorial suffisant de la profession dans les territoires ; de proposer des mesures d'aide aux professionnels les plus touchés par la réforme ; enfin, de formuler des propositions visant à favoriser le développement de l'expertise comptable et à enrichir ses missions d'appui et de conseil aux entreprises ne disposant pas d'un commissaire aux comptes. Les conclusions de cette mission permettront au Gouvernement d'adopter, d'ici à l'été 2018, un plan d'action visant à accompagner la mise en œuvre du relèvement des seuils d'audit.