Bien être animal - Filière porcine
Question de :
Mme Aude Luquet
Seine-et-Marne (1re circonscription) - Mouvement Démocrate et apparentés
Mme Aude Luquet alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le respect du bien-être animal notamment au sein de la filière porcine en pointant, sans stigmatiser mais sans détour, des pratiques qui apparaissent choquantes et difficilement justifiables aujourd'hui. 24 millions de cochons ont été abattus en 2018 en France dont 95 % proviennent de l'élevage intensif. Qui dit élevage intensif dit bien souvent rentabilité, promiscuité, et malheureusement souffrance rencontrée dès les premiers jours de vie par les porcelets. Pour exemple, il est possible de citer la coupe des testicules au scalpel, sans anesthésie et sans soin qui est pratiquée à cause de « l'odeur de verrat » qui ne concerne que 3 % à 5 % des mâles, et rend leur viande odorante. En France, 85 % des mâles sont castrés alors que des alternatives fiables et viables économiquement sont utilisées chez les voisins européens de la France. La castration n'est pas la seule source de souffrance des porcelets : il y a la caudectomie (coupe partielle de leur queue) qui vise à éviter que les cochons ne se mordillent mutuellement la queue. Il y a également la coupe ou meulage des dents. Là encore, aucune prise en charge de la douleur. Une pratique apparaît particulièrement cruelle, celle dite du « claquage ». Elle consiste à tuer contre une paroi les porcelets trop faibles, technique qui apparaît, selon l'association Techniporc, comme la « plus efficace » même si elle est « peu élégante ». Face à toutes ces pratiques, l'Europe met la pression sur les États membres pour tenter de mettre fin à ces différentes pratiques. Ainsi elle lui demande quelle est la position du ministère sur ces pratiques répandues dans la filière porcine et comment celui-ci ambitionne de lutter contre la souffrance animale et compte renforcer le bien-être animal.
Réponse en séance, et publiée le 11 décembre 2019
BIEN-ÊTRE ANIMAL DANS LA FILIÈRE PORCINE
Mme la présidente. La parole est à Mme Aude Luquet, pour exposer sa question, n° 848, relative au bien-être animal dans la filière porcine.
Mme Aude Luquet. « On n'a pas deux cœurs, un pour les animaux et un pour les humains. On a un cœur ou on n'en a pas ». Ces mots de Lamartine ont une résonance accrue de nos jours, tandis que le respect de la condition animale s'impose de plus en plus parmi les exigences des consommateurs.
Je ne serai pas de celles et de ceux qui dénoncent le simple fait de manger de la viande. Toutefois, on ne peut se désintéresser de la condition animale, car bien manger, c'est avant tout bien produire.
Il importe de garantir le respect du bien-être animal dans toutes les filières. J'aimerais ici donner l'alerte au sujet de la filière porcine, sans la stigmatiser, mais en relevant sans détour des pratiques qui semblent choquantes et difficiles à justifier de nos jours.
En 2018, 24 millions de cochons ont été abattus en France – dans le cadre de l'élevage intensif pour 95 % d'entre eux. Or qui dit élevage intensif dit bien souvent rentabilité, promiscuité et – malheureusement – souffrance des porcelets dès les premiers jours de leur vie.
Citons par exemple la coupe de leurs testicules au scalpel, sans anesthésie et sans soin, pratiquée afin de prévenir l'odeur de verrat qui peut se dégager au moment de la cuisson de la viande, alors même que ce phénomène ne concerne que 3 % à 5 % des mâles. En France, 85 % des cochons mâles sont castrés. Pourtant, il existe des solutions alternatives fiables et économiquement viables, auxquelles recourent nos voisins européens.
La castration des cochons n'est pas la seule source de souffrance. Citons notamment la caudectomie, qui vise à éviter que les cochons ne se mordillent mutuellement la queue, ainsi que la coupe et le meulage de leurs dents, le tout sans aucune prise en charge de la douleur.
Citons enfin une pratique particulièrement cruelle, appelée « claquage », qui consiste à tuer les porcelets trop faibles en les projetant contre un mur. L'association Techniporc considère que cette technique est la plus efficace, tout en admettant qu'elle est « peu élégante ».
Dans ce contexte, l'Union européenne fait pression sur les États membres pour tenter de mettre un terme à ces pratiques répandues au sein de la filière porcine. Monsieur le secrétaire d'État, quelle est la position du Gouvernement à ce sujet ? Comment les services du ministère de l'agriculture et de l'alimentation ambitionnent-ils de lutter contre la souffrance animale en renforçant le bien-être animal ?
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du numérique.
M. Cédric O, secrétaire d'État chargé du numérique. Madame Luquet, votre question porte sur les conditions de traitement des animaux dans la filière porcine, et plus généralement sur la prise en compte de la cause animale. En règle générale, nous devons admettre que la façon dont nous traitons les animaux cessera d'être un sujet confiné à des cercles philosophiques, tels que celui animé par Élisabeth de Fontenay, pour devenir un sujet d'importance au sein de la société.
Pour répondre précisément à votre question, le Gouvernement a pleinement conscience que certaines pratiques, en vigueur au sein des filières de production de la viande, ne sont pas acceptables et ne doivent pas perdurer. Au demeurant, elles sont de plus en plus contestées par les citoyens et par les associations de protection animale, mais aussi par les éleveurs eux-mêmes, qui sont les premiers garants du bien-être de leurs animaux, et qui sont souvent très soucieux de mettre au point des pratiques alternatives.
Voici quelques semaines, M. Didier Guillaume, ministre de l'agriculture et de l'alimentation – qui vous prie de bien vouloir excuser son absence ce matin –, a annoncé plusieurs mesures, parmi lesquelles l'interdiction de la castration à vif des porcelets, qui entrera en vigueur dès la fin de l'année 2021.
Nous comptons aller bien plus loin. C'est pourquoi M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation fera d'autres annonces au cours des semaines à venir, en vue d'assurer le bon traitement des animaux et l'amélioration des conditions d'élevage. Soyez assurés, mesdames, messieurs les députés, que le Gouvernement est très sensible à ce sujet.
Outre l'action du Gouvernement, il faut également évoquer celle du consommateur, qui peut lui aussi contribuer à l'évolution des pratiques de la filière. Il a d'ores et déjà le choix d'acheter du porc bio, ou « Label rouge », issu d'animaux élevés dans des conditions supérieures de bien-être.
Mme la présidente. La parole est à Mme Aude Luquet.
Mme Aude Luquet. Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, ainsi que de votre présence dans l'hémicycle en lieu et place de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.
Je ferai simplement observer que, s'il est vrai que nous devons agir à l'échelle de notre territoire, il faut également mener une politique cohérente à l'échelle européenne. Chez nos voisins européens, notamment en Allemagne, les producteurs portent un regard bien plus bienveillant que le nôtre sur les conditions de vie des animaux élevés dans le cadre d'une production intensive.
Auteur : Mme Aude Luquet
Type de question : Question orale
Rubrique : Animaux
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 3 décembre 2019