Le prélèvement à la source
Question de :
M. José Evrard
Pas-de-Calais (3e circonscription) - Non inscrit
M. José Evrard attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur le prélèvement à la source de l'IRPP. À l'approche de la mise en place du prélèvement à la source, l'inquiétude des petites entreprises et des très petites entreprises concernant leur nouveau rôle de collecteur de l'impôt sur le revenu des personnes physiques s'accroît. La crainte des sanctions par rapport aux erreurs qui ne manqueront pas de se multiplier est vive. En effet les petites et très petites entreprises qui sont l'élément dynamique essentiel de l'emploi, et du recul du chômage, vont être confrontées à une multitude de problèmes que nombres de leur chef se considèrent incapables de résoudre. Au-delà de l'augmentation évidente de la charge de travail ou des frais généraux pour les directions, l'amputation sur la feuille de paie va occasionner au sein de chaque entreprise des conflits de toute nature avec le personnel. Il lui demande s'il ne serait pas judicieux d'enterrer définitivement cette loi qui porte en elle un possible désastre industriel.
Réponse publiée le 9 octobre 2018
S'agissant de la charge nouvelle pour les entreprises, le rapport d'audit de l'Inspection Générale des Finances (IGF) transmis au Parlement le 10 octobre 2017 sur les conditions de mise en œuvre du prélèvement à la source vient objectiver et relativiser cette charge. La mission IGF estime ainsi que la charge financière serait comprise entre 310 et 420 M€ pour les entreprises. Plus de 70 % de ce coût provient de la valorisation des ressources internes qui seraient mobilisées pour le paramétrage des logiciels, la formation des utilisateurs et la communication auprès des salariés. En effet, la mise en œuvre du prélèvement à la source repose sur la déclaration sociale nominative qui est un vecteur déclaratif existant et désormais éprouvé. Les entreprises bénéficieront en outre d'un effet en trésorerie dès lors qu'elles ne reverseront la retenue à la source qu'elles auront collectée qu'après un délai de plusieurs jours. Les entreprises de moins de cinquante salariés effectueront ainsi ce reversement le 15 du mois suivant le prélèvement. La mission poursuit en précisant que cette charge peut néanmoins être atténuée par un plan de communication adéquat de l'administration. Ce plan a débuté au printemps 2018 avec la campagne de déclaration des revenus. Les déclarants en ligne ont pu prendre connaissance de leur taux de prélèvement et exercer les options pour l'individualisation ou la non transmission de leur taux. Tous les contribuables ont pris connaissance de leur taux de prélèvement à l'été 2018 avec la réception de leur avis d'impôt. Le rapport de l'IGF comporte également des propositions pour alléger les modalités et règles de gestion pour les collecteurs. Elles visent notamment à renforcer le dispositif d'accompagnement des employeurs par l'administration, en particulier grâce à un kit de démarrage à l'attention de tous les collecteurs qui est en ligne sur le site impots.gouv.fr depuis le 5 mars 2018. Ce kit a fait l'objet d'une consultation auprès des parties prenantes du prélèvement à la source et est évolutif en fonction des demandes d'adaptation qui émergent au fur et à mesure de sa diffusion. S'agissant des sanctions applicables aux entreprises, le Ministre de l'Action et des Comptes publics, a annoncé le 27 avril 2018 l'abandon de la sanction pénale spécifiquement prévue par le code général des impôts s'attachant aux manquements au secret professionnel dans le cadre du prélèvement à la source. Ce principe est désormais inscrit à l'article 10 de la loi du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance. Plus largement, concernant la question des sanctions applicables aux entreprises, l'administration fiscale fera preuve de mesure et de discernement dans leur application, comme pour toute entrée dans une réforme d'envergure. Dans ce contexte, les sanctions qui auront été appliquées feront l'objet d'une publication sur le site impots.gouv.fr afin de démontrer qu'elles seront prises pour réprimer les seuls comportements véritablement répréhensibles. La survenance de conflits sociaux au sein des entreprises générés par le prélèvement à la source évoquée par l'auteur de la question semble peu probable dès lors que 90 % des contribuables ont un taux de prélèvement compris entre 0 et 10 %. En outre, les contribuables ont la possibilité d'opter pour l'individualisation du taux de prélèvement au sein de leur couple ou pour sa non-transmission à leur employeur, ce qui est de nature à protéger la confidentialité de leur situation fiscale. Enfin, le prélèvement à la source est un système de recouvrement de l'impôt sur le revenu très largement répandu dans les autres pays et ne génère pas de telles difficultés. Par ailleurs, l'entrée en vigueur de la réforme est sécurisée au plan technique grâce aux campagnes de tests en réel (« pilote ») menées par la DGFiP en 2017 et en 2018, qui ont permis de vérifier la bonne préparation des éditeurs de logiciels et leur bonne compréhension de la réforme. Enfin, les petites entreprises qui n'utilisent pas à ce jour la déclaration sociale nominative et qui n'ont pas d'expert-comptable peuvent recourir au dispositif du TESE grâce auquel les formalités, dont les opérations relatives au prélèvement à la source, sont effectuées gratuitement par l'URSSAF pour le compte de l'entreprise. Le gouvernement a d'ailleurs annoncé le 6 septembre 2018 que le seuil de vingt salariés au-delà duquel le TESE ne peut pas être utilisé serait prochainement supprimé.
Auteur : M. José Evrard
Type de question : Question écrite
Rubrique : Impôt sur le revenu
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Action et comptes publics
Dates :
Question publiée le 22 mai 2018
Réponse publiée le 9 octobre 2018