Leucose bovine
Question de :
M. Jean-Hugues Ratenon
Réunion (5e circonscription) - La France insoumise
M. Jean-Hugues Ratenon appelle l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la leucose bovine enzootique (LBE). La Réunion est le seul territoire de France où sévit, depuis des années la leucose bovine enzootique. Déjà en 1998 des vétérinaires demandaient que des mesures soient prises contre la leucose bovine enzootique, car elle était déjà la première pathologie rencontrée dans les élevages bovins à la Réunion. L'arrêté du 31 décembre1990, fixant les dispositions à prendre sur tout le territoire national en cas de présence de cette maladie, n'a jamais été appliqué à La Réunion. Par ailleurs, lors d'un déplacement officiel sur un élevage à la plaine des cafres le 5 avril 2018, le préfet de La Réunion a affirmé que la leucose bovine ne représente aucun danger pour l'homme. Sur quelle base le représentant de l'État fonde-t-il son argumentation ? La Réunion, du fait de l'absence d'exportation de bovins, est dispensée de l'application des dispositions en vigueur sur le reste du territoire national au travers de deux arrêtés ministériels publiés en 2015. L'Europe pour éradiquer cette maladie dans tous ses États membres, remboursait à chaque abattage 50 % de la valeur de l'animal et la valeur bouchère des carcasses permettait à l'éleveur d'acheter un animal sain de remplacement. Pourquoi cette mesure n'a-t-elle pas été appliquée à La Réunion ? Aujourd'hui un certain nombre des éleveurs ont tout perdu et le nombre d'exploitations a significativement diminué. Il lui demande quelles sont les mesures qu'il entend prendre en faveur des éleveurs touchés par cette infection et quelles sont les mesures qu'il entend prendre en faveur des consommateurs au nom du principe de précaution des citoyens.
Réponse publiée le 17 juillet 2018
La leucose bovine enzootique est une maladie très largement répandue dans le monde, décrite depuis longtemps, qui génère des tumeurs sur les animaux âgés qui sont la plupart du temps découvertes à l'abattoir. Cette maladie n'a pas fait l'objet pendant longtemps de mesures de lutte car elle n'affaiblit en général pas les animaux et elle n'est pas transmissible à l'homme. En 1990, certains pays d'Europe du Nord ont néanmoins souhaité s'en affranchir et ont exigé des certifications pour les animaux entrant sur leur territoire. La France a dès lors réglementé la lutte contre cette maladie en rendant son dépistage obligatoire et en prévoyant l'élimination des animaux positifs. Ces mesures d'élimination était accompagnées de mesures financières qui restaient cependant modestes par rapport à la valeur marchande des animaux. Ces mesures financières restent en vigueur à l'heure actuelle. Eu égard à la faible prévalence de la maladie dans l'hexagone, cette politique a néanmoins pu être menée à son terme et la France métropolitaine est aujourd'hui indemne de leucose bovine enzootique. Outre-mer, la situation est très différente : la prévalence de la leucose y est beaucoup plus élevée que dans l'hexagone, cette maladie y étant transmise par des insectes piqueurs. Tel est le cas en particulier de la Guyane et de La Réunion. L'arrêté ministériel de lutte contre la leucose est apparu peu adapté à la situation sanitaire dans les départements d'outre-mer (DOM) dans la mesure où la maladie ne représente pas de danger pour la santé humaine et a un impact faible sur la santé des animaux. En effet, les mesures d'élimination des animaux positifs auraient eu pour conséquence des abattages massifs dans de nombreux cheptels. En 2008, deux missions d'expertise [celle du conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux d'une part et celle de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), du centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement et de l'institut de l'élevage d'autre part] ont considéré que la leucose n'est pas la cause des mortalités pouvant être observées dans le cheptel réunionnais et dont on devrait chercher l'origine dans une intensification mal contrôlée de la production. De plus, l'ANSES, dans son avis rendu le 24 janvier 2018 sur les dangers sanitaires dans les DOM, n'a pas classé la leucose parmi les maladies prioritaires, notamment en raison de la rareté des cas cliniques et de son faible impact économique. Certaines études récentes soutiennent qu'il existerait un lien entre le cancer du sein et la leucose bovine enzootique. Le Gouvernement est bien entendu à l'écoute de l'évolution des connaissances. Néanmoins, les études en question sont ouvertement contestées par d'autres équipes internationales travaillant sur le cancer du sein. De plus l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) considère en se fondant sur une analyse bibliographique qu'il n'existe pas de preuve de l'implication du virus de la leucose bovine enzootique dans des maladies humaines. L'Anses, dans son avis du 24 janvier 2018, estime que l'impact de la maladie sur la santé humaine est nul. Il est toutefois dans l'intérêt des filières d'éradiquer la leucose bovine par des moyens permettant de lutter dans le même temps contre les maladies prioritaires du cheptel bovin. Afin de connaître précisément la répartition de la maladie, un arrêté ministériel du 27 octobre 2017 rend obligatoire un dépistage sanguin annuel sur les animaux de plus de 12 mois pour tous les détenteurs de bovins, toutes filières confondues. L'état des lieux qui sera fait lors de la campagne de prophylaxie 2018, ainsi que la synthèse des différents moyens de lutte adaptés à la leucose bovine à La Réunion, doivent aboutir à la structuration d'un plan global de maîtrise sanitaire bovin dont les objectifs sont, à moyen terme, la réduction de la prévalence de cette maladie, mais aussi de toutes celles impactant le cheptel bovin, et à plus long terme, l'éradication de cette maladie.
Auteur : M. Jean-Hugues Ratenon
Type de question : Question écrite
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Agriculture et alimentation
Ministère répondant : Agriculture et alimentation
Dates :
Question publiée le 22 mai 2018
Réponse publiée le 17 juillet 2018