15ème législature

Question N° 8621
de M. Marc Delatte (La République en Marche - Aisne )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > agriculture

Titre > Chlorprophame (CIDC)

Question publiée au JO le : 29/05/2018 page : 4379
Réponse publiée au JO le : 27/11/2018 page : 10641
Date de changement d'attribution: 16/10/2018

Texte de la question

M. Marc Delatte interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le chlorprophame (CIPC). La France est actuellement le deuxième producteur de pommes de terre en Europe avec une production autour de 7 millions de tonnes par an soit 200 kgs par seconde. Chaque Français en consomme 30 kgs par an sans compter les produits transformés. C'est une filière dynamique qui est soucieuse de la qualité, favorisant la diversité et la segmentation de l'offre. La France se hisse au tout premier rang de l'exportation au niveau européen et mondial avec plus de deux millions de tonnes à l'export. Les Hauts-de-France concentrent près des deux tiers de la production aussi bien pour la vente en frais (leader européen pour les exportations en frais) que pour la transformation. On peut citer par exemple, dans sa circonscription, le groupe Intersnack qui emploie 319 salariés. Or les producteurs sont inquiets quant à l'avenir de la filière et à sa compétitivité en lien avec le dossier chlorprophame (CIPC), produit utilisé par les professionnels pour ses qualités anti-germinatives et qui fera l'objet de recommandations quant à son utilisation, dans le cadre sanitaire, au niveau européen. La profession est en recherche d'autres voies pour assurer une conservation de qualité et cela nécessite du temps. En outre, ils mettent en garde quant aux substituts actuels qui font courir le risque d'augmentation d'acrylamide (et conséquemment de son métabolite, le glycidamide) qui accroît potentiellement le risque de développement d'un cancer et qui est en soi une préoccupation de santé publique comme le souligne avec pertinence l'European food safety authority (EFSA). Pour revenir au chlorprophame, il fait déjà l'objet d'une réglementation européenne relative à son utilisation avec une dose journalière acceptable (DJA) fixée à 0,05.mg.kg-1.j-1. De ce fait, il l'interroge sur les réponses qu'il entend apporter aux représentants de la filière face à leurs inquiétudes quant à la potentielle perte de compétitivité, sa répercussion sur l'emploi et les solutions qu'il envisage, le cas échéant, en vue de préserver et d'accompagner la filière.

Texte de la réponse

Le chlorprophame est une substance phytopharmaceutique herbicide utilisée principalement pour ses propriétés anti-germinatives sur la pomme de terre. Son approbation européenne expire en juillet 2019 et la procédure d'examen de la demande de son renouvellement est en cours. Le chlorprophame est classé carcinogène suspecté pour l'homme, avec un risque présumé d'effets graves pour certains organes à la suite d'expositions répétées ou prolongées. Il a été identifié comme substance préoccupante par le rapport des inspections générales publié en janvier 2018, du fait de la présence fréquente de résidus dans diverses denrées, dont les pommes de terre et certains produits de transformation. L'évaluation européenne conduite par l'autorité européenne de sécurité des aliments, effectuée dans le cadre de la demande de renouvellement de l'approbation, identifie notamment un risque pour le consommateur pour tous les usages sur les cultures alimentaires. Ainsi, les conclusions publiées en juillet 2017 mentionnent un risque de dépassement du seuil de toxicité aiguë (ARfD – dose de référence aiguë) en cas de consommation de pommes de terre traitées, ainsi qu'un risque de dépassement du seuil de toxicité chronique (DJA - dose journalière admissible) pour certaines catégories de consommateurs. Sur cette base, la Commission considère qu'il n'existe pas d'utilisation sûre pour le chlorprophame en tant qu'anti-germinatif de la pomme de terre, et a proposé de ne pas renouveler son approbation européenne. La France partage l'analyse de la Commission européenne selon laquelle les modalités d'utilisation prévues par la demande d'approbation ne correspondent pas à des usages sûrs. Conformément aux objectifs du plan d'actions gouvernemental sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides, l'utilisation des substances les plus préoccupantes pour la santé et l'environnement doit être diminuée rapidement et la substitution par des alternatives plus sûres doit être encouragée. Les services du ministère chargé de l'agriculture ont rencontré les représentants de la filière pommes de terre à deux reprises, le 29 juin et le 11 octobre 2018, afin d'évoquer les impacts potentiels du retrait de la molécule ainsi que les stratégies à mettre en place pour faciliter la transition vers des alternatives plus sûres. Ces échanges se poursuivront dans les mois à venir afin d'accompagner la filière.