15ème législature

Question N° 8630
de M. Romain Grau (La République en Marche - Pyrénées-Orientales )
Question écrite
Ministère interrogé > Agriculture et alimentation
Ministère attributaire > Agriculture et alimentation

Rubrique > agroalimentaire

Titre > Gaspillage alimentaire - Crédit d'impôt - Distributeur-fournisseur

Question publiée au JO le : 29/05/2018 page : 4382
Réponse publiée au JO le : 17/07/2018 page : 6365

Texte de la question

M. Romain Grau attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur le gaspillage alimentaire. Le gaspillage alimentaire représente plus de 10 millions de denrées jetées en France, dont 2,3 millions au seul niveau de la distribution, pour une valeur commerciale de 16 milliards d'euros. Afin de lutter contre ce gaspillage, la loi 2016-138 du 11 février 2016, est venue réglementer le gaspillage en ayant une politique incitative. Pour cela, les entreprises qui lutteront contre le gaspillage en faisant des dons à une œuvre d'intérêt général pourront être sujets à une réduction d'impôt de 60 % du montant du don, conformément aux dispositions de l'article 238 bis du code général des impôts. Les distributeurs sont ainsi directement intéressés par la réduction du gaspillage. Mais cette mesure, avait pour vocation de responsabiliser les distributeurs et, à terme, réduire le gaspillage, transformer la manière de consommer et donc de produire. Cette mesure, toutefois, ne porte pas pleinement ses fruits car les producteurs de produits alimentaires sont oubliés dans ce dispositif de responsabilisation. En effet, les distributeurs facturent aux fournisseurs de produits frais et saisonniers les non ventes de leurs produits, sans que ces derniers ne puissent vérifier les invendus. Par ailleurs, en application de la loi Garrot, les distributeurs sont les seuls à percevoir un crédit d'impôt sur des dons alimentaires, sans que le montant de ce crédit soit défalqué du montant payé par les producteurs. Ainsi, rien n'impose aux distributeurs d'adapter leur commande ou de réduire leurs commandes, notamment pour les produits saisonniers, puisqu'ils n'ont pas à supporter le coût des invendus et que de plus ils peuvent bénéficier de crédit d'impôt sur les dons en direction des œuvres caritatives. Ainsi, il souhaiterait, conformément à la volonté louable de lutter contre le gaspillage, que la valeur facturée au fournisseur, pour les produits invendus, soit réduite du montant du crédit d'impôt perçu par le distributeur, cela devant permettre à terme de mieux ajuster les commandes des distributeurs aux besoins et donc, in fine, de réduire le gaspillage des produits alimentaires.

Texte de la réponse

La lutte contre le gaspillage alimentaire est une priorité du Gouvernement. Elle s'inscrit notamment dans l'approche en faveur d'une alimentation saine, durable et accessible à tous portée par le ministère de l'agriculture et de l'alimentation dans le cadre du programme national pour l'alimentation (PNA). Un objectif national de réduction de moitié des pertes et gaspillages alimentaires d'ici 2025 a été fixé en 2013. L'article 238 bis du code général des impôts réglemente les situations dans lesquelles un donateur peut bénéficier d'un allègement fiscal à hauteur de 60 % du montant du don. Il précise les conditions que doivent remplir les organismes bénéficiaires du don, mais ne cible pas spécifiquement les distributeurs. Tout producteur donateur peut bénéficier de ces dispositions, au même titre que les distributeurs, ou tout autre acteur de la chaîne alimentaire. L'allègement fiscal concerne la personne, physique ou morale, qui réalise le don, c'est-à-dire celle qui détient la denrée. Des aménagements ont été mis en place afin que les agriculteurs qui souhaitent faire des dons en nature d'une partie de leur production puissent bénéficier de ces incitations fiscales, même lorsque les produits donnés subissent une transformation par un ou plusieurs intermédiaire (s). Des dispositions existent dans les filières fruits et légumes, pommes de terre, lait, œufs et doivent être prochainement étendues à la viande. Le dispositif d'allègement fiscal est avant tout une incitation au don, dans un objectif de lutte contre la précarité alimentaire et d'aide aux associations d'aide alimentaire. Les produits issus de la ramasse constituent en effet une part importante du panier de l'aide alimentaire distribué aux plus démunis. Ces dispositions contribuent également à la lutte contre le gaspillage alimentaire dans la mesure où les produits donnés ne sont pas jetés, mais valorisés au bénéfice de l'aide alimentaire. Il n'en reste pas moins que, en application de la hiérarchie des actions introduites par la loi Garot, les distributeurs sont invités à prendre toutes les dispositions possibles pour prévenir les pertes et gaspillages, notamment par une gestion des stocks au plus proche des besoins. Par ailleurs, s'agissant de la fixation des prix entre le producteur et le distributeur, celle-ci relève de dispositions contractuelles. La pratique qui consiste à reporter sur le producteur l'impact économique des invendus potentiels lors de négociation des contrats et des prix est effectivement un enjeu en termes de lutte contre le gaspillage alimentaire. En la matière, il est important de poursuivre les efforts de sensibilisation et de pédagogie, menés notamment dans le cadre du pacte national de lutte contre le gaspillage alimentaire rassemblant l'ensemble des acteurs de la chaîne alimentaire. En outre, plusieurs dispositions inscrites dans le titre 1 du projet de loi « pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et une alimentation saine et durable » en cours d'examen au Parlement doivent permettre d'assurer un meilleur encadrement des dispositions contractuelles entre producteurs et distributeurs, notamment en matière de fixation des prix. La nécessité d'une structuration du secteur de la production, aujourd'hui trop éclaté, et le développement de contrats durables fondés sur le renversement de la logique de construction des prix afin de prendre en compte les coûts de production sont nécessaires. Les dispositions visent également à favoriser le recours à une médiation plus efficace et rapide en cas de désaccord sur les contrats ainsi que le renforcement des clauses de renégociation et l'amélioration de la lisibilité des règles applicables pour les acteurs économiques.