Avenir du commissariat aux comptes
Question de :
M. Philippe Folliot
Tarn (1re circonscription) - La République en Marche
M. Philippe Folliot interroge M. le ministre de l'économie et des finances sur l'avenir du commissariat aux comptes. Suite à la présentation à Colmar le 22 février 2018 du Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE) qui fait l'objet d'un projet de loi présenté le 18 avril 2018 en Conseil des ministres, les commissaires aux comptes s'opposent à une disposition visant à rehausser les seuils légaux de certification des comptes d'entreprises par le commissariat aux comptes aux niveaux européens. Cette réforme pourrait potentiellement déstabiliser l'équilibre économique de toute une profession (cabinets, collaborateurs, cursus universitaire, éditeurs de progiciels). Rappelant leur rôle en matière de lutte contre les défaillances d'entreprises, de facilitateur d'accès au crédit bancaire pour les petites structures, de sécurisation des entreprises dans leurs opérations de croissance, de lutte contre la fraude et le blanchiment d'argent, ou encore de sécurisation juridique et fiscale des sociétés et de leurs salariés, les commissaires aux comptes ont manifesté en nombre le 17 mai 2018 dans de nombreuses villes de France. Faisant valoir le fait que la structure entrepreneuriale française n'était pas comparable avec les seuils européens, que le tissu de cabinets de commissariat aux comptes permettait de sécuriser la présence d'entreprises dans tous les territoires du pays ou encore le fait que la réforme bénéficierait avant tout aux grands cabinets internationaux de commissariat aux comptes, les commissaires aux comptes s'opposent à ce qu'ils considèrent comme un « cataclysme social et financier » en puissance qui renforcera l'insécurité des chefs d'entreprises, à rebours des objectifs du Gouvernement. Au regard de l'inquiétude de toute une profession, il souhaiterait savoir quels ajustements entend proposer le Gouvernement quant à une disposition issue d'un rapport très critiqué de l'inspection générale des finances (IGF) aux nombreux potentiels effets pervers.
Réponse publiée le 10 juillet 2018
Dans le cadre du plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE), le Gouvernement souhaite alléger les obligations pesant sur les petites entreprises, afin de faciliter leur développement. Parmi les mesures envisagées, à cet effet, le relèvement de certains seuils, réglementaires et fiscaux, constitue une orientation importante pour réduire les charges administratives qui leur sont applicables. Dans ce cadre, le Gouvernement envisage, en effet, de relever les seuils de certification légale des comptes, par un commissaire aux comptes, au niveau prévu par le droit européen, c'est-à-dire 8 M€ de chiffres d'affaires, 4 M€ de bilan et 50 salariés. Une analyse, conduite par l'inspection générale des finances (IGF), a en effet démontré que la pertinence de seuils d'audit légal, plus faibles que ceux fixés par le droit européen, n'est pas établie tant du point de vue de la qualité des comptes des petites entreprises, que de leur accès au financement. Le rapport de l'IGF démontre, en outre, que les coûts supportés par les petites entreprises françaises, qui ne sont pas visées par l'obligation européenne de certification légale des comptes, sont élevés (de l'ordre de 600 M€, soit en moyenne 5 511 € par an pour une entreprise située sous les seuils européens). Pour cette raison, il semble pertinent, au regard des enjeux financiers limités associés, de rendre facultative l'intervention d'un commissaire aux comptes dans les petites entreprises, alors que 75 % d'entre elles recourent, en parallèle, aux services d'un expert-comptable, qui concourt, d'ores et déjà, à la qualité comptable dans ces structures. Cette démarche est conforme à l'objectif fixé par le Premier ministre, dans la circulaire du 26 juillet 2017 relative à la maîtrise des flux réglementaires et de leur impact, d'identifier et d'éliminer les surtranspositions du droit européen dans notre droit national, alors qu'un nombre significatif d'États membres ont fixé des seuils identiques ou supérieurs à ceux prévus par le droit européen. Elle est également pleinement cohérente avec les orientations du Gouvernement visant à établir un nouveau contrat avec les entreprises, fondé sur la restauration de liens de confiance mutuelle entre l'État et les acteurs économiques, et, ainsi, une diminution du poids des contrôles et une responsabilisation individuelle accrue, comme en témoigne la création d'un droit à l'erreur, prévu par le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance. Le relèvement des seuils d'audit constitue un défi pour la profession de commissaires aux comptes, impliquant une évolution en profondeur de son activité. Afin d'étudier, de manière précise, les conséquences de cette réforme et d'envisager les mesures d'accompagnement nécessaires, l'appui d'une mission présidée par M. Patrick de Cambourg - Président de l'Autorité des normes comptables, a été sollicitée sur l'avenir de la profession. Cette mission aura, notamment, pour objectif d'identifier des missions nouvelles, légales ou non, pouvant être confiées aux commissaires aux comptes ; de rechercher les moyens pour renforcer l'attractivité de cette profession et de permettre le maintien d'un maillage territorial suffisant de la profession dans les territoires ; de proposer des mesures d'aide aux professionnels les plus touchés par la réforme ; enfin, de formuler des propositions visant à favoriser le développement de l'expertise comptable et à enrichir ses missions d'appui et de conseil aux entreprises ne disposant pas d'un commissaire aux comptes. Les conclusions de cette mission permettront au Gouvernement d'adopter, d'ici à l'été 2018, un plan d'action visant à accompagner la mise en œuvre du relèvement des seuils d'audit.
Auteur : M. Philippe Folliot
Type de question : Question écrite
Rubrique : Entreprises
Ministère interrogé : Économie et finances
Ministère répondant : Économie et finances
Dates :
Question publiée le 29 mai 2018
Réponse publiée le 10 juillet 2018