15ème législature

Question N° 8768
de M. Rémi Delatte (Les Républicains - Côte-d'Or )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie et finances
Ministère attributaire > Solidarités et santé

Rubrique > produits dangereux

Titre > Définition et application du principe de précaution

Question publiée au JO le : 29/05/2018 page : 4397
Réponse publiée au JO le : 14/08/2018 page : 7435
Date de changement d'attribution: 05/06/2018

Texte de la question

M. Rémi Delatte attire l'attention de M. le ministre de l'économie et des finances sur les conséquences économiques et industrielles du principe de précaution. Si la population française doit être protégée des risques suspectés liés à un produit, la médiatisation autour de certains produits met à mal l'évidence scientifique exprimée par des agences publiques, composées d'experts reconnus, nommées selon des procédures officielles et transparentes. Ainsi, de nombreuses filières économiques dans le champ de l'agriculture, de la chimie, de la santé, des nouvelles technologies... sont freinées dans leurs recherches et leur innovation au nom de l'application du principe de précaution alors que les preuves de dangerosité pour la population de leur production ne sont pas validées par la communauté scientifique. Il souhaite savoir si le Gouvernement envisage de revoir la définition et l'application du principe constitutionnel de précaution et connaître les modalités à mettre en œuvre afin que l'expertise scientifique prime sur la pression médiatique.

Texte de la réponse

Le principe de précaution a été inscrit dans notre constitution en 2005, à l'article 5 de la Charte de l'Environnement ; il figurait déjà depuis 1995 à l'article L. 110-1 du code de l'environnement, après avoir été reconnu en droit international à la suite de la Déclaration de Rio de 1992, notamment dans le droit et dans la jurisprudence de l'Union Européenne. Ce principe enjoint aux pouvoirs publics, lorsque la réalisation d'un dommage, même si elle est encore incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, d'une part d'adopter des mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation de ce dommage, d'autre part de mettre en œuvre les évaluations permettant de réduire les incertitudes. L'analyse récemment publiée par le Conseil d'État dans le cadre de son rapport sur la prise en compte du risque dans la décision publique conclut que ce principe ne s'oppose en rien aux exigences de la recherche et de l'innovation : il s'agit bien d'un principe d'action, qui permet aux pouvoirs publics d'agir au mieux dans l'intérêt collectif en fonction des connaissances disponibles et de leurs limites à un moment donné, tout en suscitant la production de connaissances permettant de mieux évaluer les bénéfices et les risques potentiels. La crédibilité de l'expertise scientifique repose d'abord sur le respect des principes d'impartialité, de transparence, de pluralité et du contradictoire, tels qu'ils sont rappelés par exemple dans l'article L. 1452-1 du code de la santé publique ; ces principes trouvent notamment leur application dans la Charte de l'expertise sanitaire pour assurer la qualité de l'expertise au regard de la compétence et de l'indépendance de ceux qui la conduisent, de la traçabilité des sources utilisées, de la transparence des méthodes mises en œuvre et de la clarté des conclusions. Le respect de ces principes doit s'accompagner d'actions de sensibilisation et de communication permettant de partager avec le public l'information ainsi produite, en donnant à tous les moyens de faire face aux rumeurs et aux allégations non fondées qui peuvent être relayées par différents media, le cas échéant sous l'influence de différents groupes d'intérêts.