Rubrique > services publics
Titre > Dématérialisation du service public
M. Stéphane Peu alerte M. le Premier ministre sur les grandes difficultés liées à la dématérialisation croissante des procédures administratives et, à terme, de l'ensemble du service public. Le Président de la République a en effet souhaité créer un « État-plateforme 100 % numérique » et a annoncé son projet de dématérialiser 100 % des services publics d'ici 2022. D'une part, si l'intention de rendre plus efficaces et rapides certaines procédures est louable, la dématérialisation s'accompagne d'importantes difficultés à l'instar de certains publics qui s'y accommodent plus difficilement, notamment les personnes âgées, les étrangers maîtrisant mal le français, et plus largement tous les citoyens n'utilisant pas internet au quotidien. Par ailleurs, la dématérialisation ne doit pas devenir le cache-misère du service public, comme c'est aujourd'hui le cas dans de nombreuses préfectures et sous-préfectures, où, par exemple, les prises de rendez-vous s'effectuent désormais en ligne. En effet, très peu de créneaux sont disponibles pour les internautes et tous ceux qui se libèrent se trouvent occupés quasi-instantanément, tant la demande est importante. Certes, pour certaines démarches les longues files d'attente ont presque disparu, mais elles se trouvent remplacées par une file d'attente virtuelle, invisible mais pourtant bien réelle pour tous ceux qui ont un besoin urgent d'accéder aux services publics et qui en sont de facto privés. La situation n'est pas différente auprès du site de l'Agence nationale des titres sécurisés, qui connaît de nombreux dysfonctionnements depuis le mois de novembre 2017 et l'entrée en vigueur de l'obligation de passer par cette plateforme pour obtenir une carte grise. À tel point que le nombre de titre en attente s'élèverait à ce jour pour les seules cartes grises à 450 000. De très nombreux témoignages relatent également d'importants retards concernant d'autres démarches, comme la délivrance du permis de conduire. L'extension de la dématérialisation à la justice, annoncée dans le cadre des « chantiers de la justice » présentés par Mme la garde des sceaux en octobre 2017, n'a pas manqué de susciter l'émoi de l'ensemble de la profession. À l'image du 15 février 2018, où une centaine de magistrats, avocats et greffiers se sont réunis sur le parvis du tribunal de grande instance de Bobigny, deuxième plus important tribunal de France, afin de réclamer une justice « accessible » à tous. La dématérialisation de ce service public essentiel doit s'accompagner de recrutement de magistrats, avocats et greffiers afin qu'ils puissent faire leur travail correctement, au risque sinon d'éloigner encore davantage le justiciable séquano-dionysien de ce service public. Quotidiennement sollicité par des habitants de sa circonscription confrontés à des difficultés incommensurables liées à la dématérialisation du service public, il souhaite connaître les dispositions qu'il envisage de prendre afin, d'une part, de remédier rapidement aux nombreux dysfonctionnements rencontrés et, d'autre part, que la dématérialisation ne se fasse pas au dépit des citoyens, et notamment de ceux les plus éloignés d'internet, ni au détriment d'une augmentation des dotations du service public.