Rubrique > agriculture
Titre > Filière oléagineuse française
M. Thierry Benoit attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, à propos de la gestion des intrants de la bio-raffinerie de Total à La Mède. Ces dernières années des pans entiers de filières mutent pour devenir plus durables. Les groupes pétroliers n'échappent pas à cette tendance de fond. C'est pourquoi le Groupe Total a décidé au moment de la rénovation du site de La Mède d'y installer une bio-raffinerie. Sous-entendu, une raffinerie responsable et durable qui considère autant l'impact environnemental que sociétal. Ce type de structure industrielle est souvent un levier majeur de développement du tissu économique local, tout en respectant l'environnement. C'est doublement bénéfique pour une société qui souhaite employer ses forces vives et enclencher l'économie circulaire. Contre toute attente, dans son plan d'approvisionnement Total ne prévoit d'intégrer que 15,5 % de produits durables : issus du territoire national et de la collecte de produits usagés. En plus de venir d'Asie les 84,5 % restants viendraient d'une seule autre source, la palme. C'est ce même végétal qui est responsable de l'abattage de 8,7 millions d'hectares de forêt (deux fois la région Rhônes-Alpes). D'ailleurs M. le ministre déclarait le 6 juillet 2017, à propos de l'interdiction des importations d'huile de palme, qu'il y avait là une nécessité importante de fermer la fenêtre qui donnait la possibilité d'incorporer de l'huile de palme dans les biocarburants. Concernant l'impact environnemental la direction de Total aurait promis de s'engager à diminuer à l'avenir la part de l'huile de palme parmi les intrants, et de se tourner vers des producteurs de palme affichant un label respectueux de l'environnement ; sans considérer qu'un tel projet de par sa forte demande pourrait par voie de conséquence aussi augmenter la demande sur les systèmes non labellisés. À l'échelon européen la France montre qu'elle s'oppose à l'accord de Paris sur le climat, et fait le choix de la déforestation importée. Tandis que l'accord de Paris encourage vivement l'ensemble des pays signataires à agir sur les chaînes d'approvisionnement de certaines matières premières agricoles, comme l'huile de palme en particulier, puisque sa production se fait souvent au détriment de la couverture forestière. Le remplacement de l'huile de palme par l'huile de colza permettrait de soutenir une partie du secteur agricole. En effet 300 000 tonnes d'huile de palme équivalent à 180 000 ha de colza. Le colza est par ailleurs une plante mellifère, qui est un facteur de biodiversité par les abeilles et de revenu pour les apiculteurs qui subissent une crise grave considérant la diminution de leur cheptel. Ces nouvelles surfaces permettraient par ailleurs de répondre au problème de souveraineté et d'autonomie en protéine végétale à destination de l'aliment du bétail qui favorise actuellement l'importation de tourteaux de soja d'origine OGM. Il est important de souligner que ces tourteaux de soja représentent eux aussi un enjeu de déforestation importé, puisque la production de soja est responsable à elle seule de 60 % de la déforestation importée. La profession agricole est prête à soutenir le besoin de biodiversité du territoire mais il faut que ceux qui gouvernent les soutiennent, sans quoi rien ne se fera. Les agriculteurs sont prêts à saisir ces projets durables, la preuve deux tiers de l'huile de colza produite aujourd'hui est déjà destinée aux biocarburants. Enfin la transformation des végétaux en aliment du bétail assure plusieurs milliers d'emploi en France. Ces emplois sont continuellement mis en péril par l'importation de produits qui ne respectent pas les règles de productions de l'Union européenne. En déplacement à Roubaix le 23 février 2018, le Premier ministre déclarait à propos du déficit de l'équilibre des échanges commerciaux « nous avons décidé de nous attaquer au problème. De nous y attaquer franchement ». Pourtant Total prévoit de creuser davantage la balance de plusieurs centaines de millions d'euro. Sans davantage d'arguments en faveur du projet et de son approvisionnement, le Gouvernement a pourtant donné son feu vert pour émettre l'arrêter d'autorisation d'exploiter. Les associations de défense de l'environnement vivent cette décision comme une trahison. Monsieur le ministre il y a un triptyque entre responsabilité sociétale, équilibre économique et durabilité environnementale que le projet de Total ne semble pas pleinement considérer au grand dam de la France. Considérant la nécessité d'orienter les projets industriels en tenant compte de ces 3 dimensions, il aimerait connaître sa position à propos de la stratégie du Gouvernement concernant la filière des oléagineux en France dont découle la filière biocarburant, l'autonomie protéique de la France et la diminution des impacts environnementaux importés.