Question écrite n° 9170 :
Compteurs Linky

15e Législature
Question signalée le 24 septembre 2018

Question de : M. Jean-Paul Dufrègne
Allier (1re circonscription) - Gauche démocrate et républicaine

M. Jean-Paul Dufrègne attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur les nombreuses questions que soulève le déploiement des compteurs communicants dits compteurs Linky. Signe que ce sujet continue à passionner et mobiliser les citoyens, à chaque réunion publique d'information organisée sur le sujet, il y a toujours beaucoup de monde. Ce fut par exemple le cas à Bourbon-l'Archambault dans l'Allier où les habitants de la circonscription, et au-delà, s'étaient pressés pour venir chercher des réponses à leurs questions. Que ce soit en réunion publique ou par courrier, les nombreuses sollicitations reviennent généralement sur les questions sanitaires, l'exposition aux ondes ou encore la protection des données personnelles. Mais les usagers tiennent aussi à exprimer leur suspicion sur le manque d'information dont ils disposent notamment sur l'obligation ou non d'accepter l'installation d'un compteur communicant dans son foyer ou sur le coût réel pour eux et pour l'État de ce gigantesque programme. Ce sentiment de suspicion a été conforté en février 2018 par la Cour des comptes qui a rendu un rapport très sévère sur le déploiement des compteurs communicants. Tout d'abord, ce rapport a dénoncé le coût excessif du programme, estimé à 5,7 milliards d'euros, programme qui au bout du compte couterait cher aux consommateurs et serait très avantageux pour Enedis. Ensuite, ce rapport a remis clairement en cause les avantages du compteur Linky pour les usagers en pointant des bénéfices encore trop insuffisants notamment pour mieux maîtriser sa consommation d'électricité et donc faire des économies. Sur ces deux points, la position de l'Europe est pourtant claire. Elle demande à tous les pays de faire des économies d'énergie notamment grâce à l'utilisation de compteurs intelligents mais à deux conditions : que chaque pays soit vigilant sur la rentabilité de l'opération et que les consommateurs y trouvent un intérêt. Ceci explique que certains pays comme l'Allemagne ou la Belgique sont pour l'instant restés très prudents sur un déploiement massif. Face à ces constats et aux différents questionnements, il lui demande tout d'abord si l'État va jouer la carte de la transparence et demander des comptes à Enedis afin d'avoir une idée précise de ce que le déploiement aura coûté, ce qu'il aura rapporté à Enedis et ce que les consommateurs vont réellement payé au regard des taxes supplémentaires, ensuite si les Français sont effectivement dans l'obligation d'accepter l'installation d'un compteur communicant dans leur foyer, et s'ils refusent, à quelles sanctions ils s'exposent, et enfin s'il peut assurer que le compteur Linky ne pose pas une question de cybersécurité avec en fond le cyberterrorisme ou les cyberattaques sur des cibles comme les centrales nucléaires ou les hôpitaux.

Réponse publiée le 19 février 2019

La directive de 2009 sur le marché intérieur de l'électricité fixe des objectifs ambitieux de déploiement de compteurs communicants, visant à équiper 80 % des foyers de tels dispositifs d'ici à 2020. À la suite d'une phase d'expérimentation portant sur le déploiement de 300 000 compteurs dans les régions de Tours et de Lyon, la commission de régulation de l'énergie (CRE) a procédé en 2011 à une évaluation favorable du dispositif. Les pouvoirs publics ont donc décidé de procéder à la généralisation du déploiement des compteurs communicants sur l'ensemble du territoire national avec le déploiement de 36 millions de compteurs prévu entre 2016 et 2021. Plus de 11 millions de compteurs étaient installés mi-2018, soit environ un tiers du programme et environ 30 000 compteurs sont installés chaque jour. Linky doit jouer un rôle central dans la maîtrise de la demande d'énergie. Plusieurs études ont notamment montré qu'avec un accompagnement et une connaissance précise de ses consommations, il est possible de réduire jusqu'à 8 % ses consommations d'électricité. Le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, a récemment appelé l'ensemble des acteurs à se mobiliser tout particulièrement sur ce volet, par une meilleure communication et une meilleure information, notamment lors de la pose des compteurs. ENEDIS devra en particulier proposer un document explicatif type sur la maîtrise de l'énergie à remettre au moment de la pose du compteur. De nouvelles modalités d'accès aux données de consommation doivent être développées (internet, applications pour téléphone mobile…) afin de permettre un accès plus facile aux données pour les consommateurs qui le souhaitent. Concernant les effets sanitaires, plusieurs études ont été réalisées par l'agence nationale des fréquences (ANFR) et l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et montrent que les niveaux d'exposition sont très inférieurs aux normes réglementaires. Des campagnes de mesures de l'exposition aux ondes électromagnétiques ont en effet été menées en 2016 et 2017 par l'institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS), le centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) et l'ANFR sur des compteurs en laboratoire et installés dans des logements. Ces mesures ont montré que les compteurs produisent un champ électromagnétique faible et très inférieur aux valeurs limites réglementaires. De plus, le niveau d'exposition décroît très rapidement avec la distance au compteur ou le long du circuit électrique à l'intérieur d'une habitation. Les mesures en laboratoire réalisées par l'ANFR montrent que le champ magnétique à 30 cm du compteur Linky est du même ordre de grandeur que celui d'un chargeur d'ordinateur et près de trois fois inférieur à celui d'un écran TV. Le champ électrique à 30 cm du compteur Linky est similaire à celui des anciens compteurs, comparable à celui d'un écran TV et 10 fois moindre que celui d'une lampe fluorescente compacte. En juin 2017, l'Anses a rendu public son rapport d'expertise sur l'exposition de la population aux champs électromagnétiques émis par les "compteurs communicants". Les principaux enseignements de cet avis sont : - que les niveaux d'exposition générés par les compteurs communicants sont très faibles par rapport aux valeurs réglementaires, et sont comparables à ceux émis par les dispositifs électriques ou électroniques domestiques (écrans TV, perceuse électrique sans fil…) ; - qu'il est peu probable que l'exposition aux ondes émises puisse engendrer des effets sanitaires à court ou long terme. Le ministre de la transition écologique et solidaire (MTES) a néanmoins demandé à ENEDIS d'être particulièrement attentif aux personnes électrosensibles. Depuis le 6 juin, le dispositif national de surveillance et de mesure des ondes géré par l'ANFR a évolué et permet à tout citoyen de faire gratuitement mesurer son exposition associée à des objets communicants fixes comme le compteur Linky. L'Anses poursuivra ses études sur les évolutions à venir du compteur afin de continuer à mesurer ses impacts sur les utilisateurs. Concernant la protection des données, toutes les dispositions réglementaires sont en place pour garantir la confidentialité des données de tous les utilisateurs. L'accord du consommateur est ainsi une condition préalable à toute collecte par le gestionnaire de réseau ou à toute transmission à des tiers. Les recommandations en matière de protection des données collectées par les compteurs communicants adoptées par la commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) le 20 avril 2017 ont en particulier été prises en compte, notamment dans le décret du 10 mai 2017 qui précise les modalités de mise à disposition des données de comptage à des tiers avec l'accord de l'usager concerné. L'article R341-5 du code de l'énergie précise ainsi que « chaque utilisateur des réseaux publics d'électricité a la libre disposition des données relatives à sa production ou à sa consommation enregistrées par les dispositifs de comptage. » Dans le cas des compteurs communicants, le deuxième alinéa de l'article R.341-21 du code de l'énergie précise que la courbe de charge est enregistrée localement dans les compteurs au pas horaire, sauf refus express du consommateur. Le troisième alinéa du même article indique que la collecte de cette courbe dans le système informatique du gestionnaire de réseau ne peut être effectuée qu'à la demande du consommateur (article R. 341-21 du code de l'énergie). Les conditions ne sont cependant pas toujours claires pour les consommateurs qui ne savent pas à quoi ils s'engagent. Le MTES a demandé, lors d'une réunion avec l'ensemble des parties prenantes, le 26 juin dernier, aux fournisseurs et à ENEDIS de revoir leur communication sur le sujet, afin de faire preuve de la plus grande transparence et de plus de pédagogie. De plus, en ce qui concerne la cybersécurité, la protection du système de gestion des données respecte le référentiel de l'agence nationale de la sécurité des systèmes d'Information (ANSSI) établi pour les compteurs communicants. Concernant le financement, qui a été critiqué par un rapport de la Cour des comptes, le ministre a souhaité qu'un travail soit engagé avec la CRE et ENEDIS pour envisager les possibilités d'évolution des modalités de rémunération de l'opérateur, en particulier de celles liées à l'avance de trésorerie consentie par ENEDIS au regard de l'évolution des taux d'intérêt. Il est de la responsabilité des pouvoirs publics de rémunérer au juste niveau ENEDIS pour ce déploiement industriel de grande ampleur, tout en garantissant les intérêts du consommateur. Le remplacement du compteur est de la responsabilité du gestionnaire de réseau, dans le cadre de ses obligations réglementaires et contractuelles. Dans le cadre de son contrat unique ou de son contrat avec le gestionnaire de réseau, le client s'engage à permettre l'accès au compteur pour le gestionnaire de réseau. En tout état de cause, ce dernier doit procéder au remplacement du compteur en respectant notamment le droit de la propriété lorsque le compteur n'est pas situé sur l'espace public ou dans un endroit accessible. Lorsque le client refuse l'accès au compteur, les équipes de pose ne pourront donc pas procéder au remplacement du compteur. Toutefois, un client ayant refusé la pose d'un compteur communiquant ne pourra prétendre à bénéficier des avantages tarifaires qu'il propose et les prestations actuellement gratuites, comme les relevés de compteur par les agents, lui seront alors facturées, conformément au catalogue des prestations validé par la CRE.

Données clés

Auteur : M. Jean-Paul Dufrègne

Type de question : Question écrite

Rubrique : Énergie et carburants

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire

Ministère répondant : Transition écologique et solidaire

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 24 septembre 2018

Dates :
Question publiée le 12 juin 2018
Réponse publiée le 19 février 2019

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