15ème législature

Question N° 9345
de M. Jean-Marc Zulesi (La République en Marche - Bouches-du-Rhône )
Question écrite
Ministère interrogé > Cohésion des territoires
Ministère attributaire > Transition écologique et solidaire

Rubrique > transports ferroviaires

Titre > Avenir des poteaux en bois traités à la créosote

Question publiée au JO le : 12/06/2018 page : 4904
Réponse publiée au JO le : 19/02/2019 page : 1721
Date de changement d'attribution: 05/09/2018
Date de signalement: 25/09/2018

Texte de la question

M. Jean-Marc Zulesi attire l'attention de M. le ministre de la cohésion des territoires sur la question des poteaux électriques en bois traités à la créosote. La créosote est un produit biocide classé substance cancérogène génotoxique et reprotoxique avérée, en raison de sa teneur en hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) et notamment en benzo(a)pyrène. Cette substance chimique est utilisée pour le traitement industriel préventif du bois contre les agressions d'insectes et de champignons, et de l'humidité. Son usage professionnel, encadré par la réglementation européenne sur les biocides, est actuellement destiné à traiter et prolonger la durée de vie des traverses de chemin de fer, des poteaux en bois qui supportent les câbles électriques ou de télécommunication, des clôtures et palissades (agricoles, équestres, routières, de bâtiments non résidentiels...). Conscient qu'après les évaluations réalisées par l'Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire), le Gouvernement a annoncé le 23 avril 2018, la limitation de la créosote au strict traitement des voies de chemins de fer, le député s'interroge néanmoins sur l'avenir des différents poteaux déjà traités à la créosote. En effet, s'il ne s'agit pas de tous les remplacer, il souhaiterait connaître les mesures qu'il envisage quant aux poteaux « créosotés » les plus proches des habitations, ceux-ci constituant un risque sanitaire et environnemental.

Texte de la réponse

Conformément au règlement sur les produits biocides, des industriels ont déposé auprès de la Suède et d'autres États des demandes d'autorisation de mise sur le marché pour différents produits à base de créosote et pour différents usages de traitement du bois. La Suède a instruit les premiers dossiers et a autorisé deux usages parmi tous ceux revendiqués par les industriels pour ces produits : le traitement des traverses de chemin de fer et des poteaux de réseaux électriques et téléphoniques. En France, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), autorité compétente pour la délivrance des autorisations de mise sur le marché, a été saisie fin mai 2016 de 3 demandes d'autorisation de produits à base de créosote selon la procédure de reconnaissance mutuelle. Sur la base de l'évaluation faite par la Suède, d'études produites par la SNCF, RTE, ENEDIS et l'Institut national de l'environnement industriel et des risques (INERIS), l'ANSES a réalisé sa propre évaluation. L'évaluation faite par la Suède de la créosote conclut que cette substance peut présenter des risques pour la santé des travailleurs, notamment en raison de son caractère cancérogène sans seuil. Cependant, si des mesures strictes sont prises, visant à limiter l'exposition des travailleurs, le risque pour leur santé est considéré comme acceptable par la Suède selon les critères admis pour les substances cancérogènes sans seuil. L'agence d'expertise suédoise attire cependant l'attention sur la nécessité d'application rigoureuse de mesures de réduction de l'exposition. Les autorités françaises partagent les conclusions de la Suède sur les risques sanitaires et environnementaux, mais considèrent que les poteaux électriques et téléphoniques disposent de substituts possibles, et donc que les risques inacceptables identifiés ne peuvent être autorisés. En effet, en parallèle de l'évaluation menée par l'ANSES, les autorités françaises ont engagé une étude en vue d'évaluer les impacts socio-économiques d'une interdiction éventuelle sur les deux usages autorisés par la Suède. Ce travail a été confié au Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) du ministère de la transition écologique et solidaire qui a conclu que les conditions économiques de la substitution méritaient d'être prises en compte pour la délivrance d'une autorisation par l'ANSES pour les traverses, mais qu'elles n'étaient pas réunies pour les poteaux téléphoniques et électriques qui disposent de substitut. Le rapport mettait aussi en évidence la nécessité d'améliorer la gestion des déchets de bois créosotés. En effet, leur utilisation peut se révéler bien plus dangereuse pour la santé que durant leur première vie, des réutilisations par exemple comme banc à l'intérieur d'habitations ont été ainsi rapportées. C'est à ce titre que si le démantèlement immédiat de l'ensemble des poteaux traités à la créosote n'apparaît pas envisageable, il importe d'arrêter l'implantation de nouveaux panneaux, et surtout de mieux assurer la traçabilité des poteaux ou des traverses lors de leur démantèlement. Afin de prendre en compte ces différentes évaluations, deux types de mesures réglementaires ont été adoptées ou sont en cours d'adoption :Dans le cadre du règlement sur les produits biocides, il a été décidé d'interdire ces produits contenant de la créosote sauf pour les usages de traverses de chemin de fer.Afin d'assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine et de l'environnement, le ministère de la transition écologique et solidaire, en lien avec le ministère de la santé et le ministère de travail, adoptera dans les prochains jours un arrêté national qui, interdira :d'une part, l'importation sur notre territoire des autres produits en bois traités avec la créosoted'autre part, la réutilisation des bois traités présents sur notre territoire pour d'autres usages que ceux autorisés. Le ministère a par ailleurs réuni le 19 décembre 2018 les principales parties prenantes pour la signature d'une Charte d'engagement volontaire (1) mobilisant leur responsabilité sociétale et environnementale afin de :pour les acteurs ferroviaires, poursuivre leur engagement sur la recherche et l'utilisation d'alternatives à la créosote pour les traverses ;pour l'ensemble des acteurs, concourir et diffuser l'information sur les risques sanitaires et environnementaux que représentent ces bois traités ;pour l'ensemble des acteurs, orienter ces déchets de bois traités à la créosote en fin de vie vers des installations de valorisation énergétique adaptées à ce type de déchets dangereux. Le Gouvernement a par conséquent, en lien avec les acteurs économiques et les organisations gouvernementales pris l'ensemble des mesures permettant de réduire à terme les risques sanitaires et environnementaux posés par l'utilisation de la créosote. (1) Le projet de charte d'engagement volontaire portant sur la gestion et l'élimination des poteaux et des traverses en bois traités à la créosote sur le territoire national associe l'Association Robin des Bois, la régie autonome des transports parisiens (RATP), SNCF Réseau, Union des exploitants de chemins de fer touristiques et de musées, Orange, ENEDIS, RTE, la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), l'Association des maires de France (AMF), l'association de collectivités, gestion des déchets, réseaux de chaleurs, gestion locale de l'énergie (Amorce), le Cercle national du recyclage (CNR) et le Ministère de la transition écologique et solidaire.