15ème législature

Question N° 9518
de Mme Sophie Mette (Mouvement Démocrate et apparentés - Gironde )
Question écrite
Ministère interrogé > Numérique
Ministère attributaire > Numérique

Rubrique > hôtellerie et restauration

Titre > Site de référencement ouverts à commentaires des usagers

Question publiée au JO le : 19/06/2018 page : 5231
Réponse publiée au JO le : 14/05/2019 page : 4521
Date de changement d'attribution: 02/04/2019

Texte de la question

Mme Sophie Mette interroge M. le secrétaire d'État, auprès du Premier ministre, chargé du numérique, sur les possibilités légales accordées aux établissements de restauration et d'hébergement dans le choix d'apparaître ou non sur un site de référencements ouvert à commentaires d'usagers. S'ils sont vecteurs d'une communication souvent positive, les sites de référencement par avis des usagers laissent la possibilité à de nombreuses dérives qui peuvent s'avérer être nuisibles à des professionnels. Messages volontairement négatifs laissés par des concurrents anonymes, critiques sans justification de passage dans l'établissement, la possibilité de laisser des commentaires subjectivement orientés est accentuée par l'anonymat accordé aux rédacteurs de ces messages. L'effet de nuisance peut s'avérer être dévastateur pour un établissement sujet à la calomnie sur ces sites. Même si la possibilité est donnée au professionnel de répondre, son image est, de fait, négativement atteinte. Elle le questionn donc sur l'opportunité d'imposer aux rédacteurs de commentaires sur les sites de référencement l'indication de la date de leur passage dans l'établissement sujet du commentaire afin de permettre aux responsables de ces établissements de contextualiser leur réponse. Cela ouvre également la question du droit pour les établissements professionnels de choisir d'apparaître ou non sur ces sites de référencement. Enfin, elle lui demande si une mise en garde systématique contre les commentaires diffamatoires et non fondés n'engagerait pas à plus d'objectivité.

Texte de la réponse

Les sites qui référencent les établissements de restauration ou d'hébergement permettent aux professionnels d'accroître leur visibilité et donnent au consommateur une information sur les offres qu'ils proposent. Ces sites permettent également au consommateur de noter et de formuler des commentaires sur les établissements concernés. Il est essentiel que les plateformes respectent les règles de protection des consommateurs et de concurrence. La loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique a ainsi imposé aux plateformes en ligne une triple obligation de loyauté, de clarté et de transparence, notamment sur les règles de référencement et de classement qu'elles mettent en œuvre. L'existence d'une relation contractuelle, d'un lien capitalistique ou d'une rémunération à son profit, dès lors qu'ils influencent le classement ou le référencement des contenus, des biens ou des services proposés ou mis en ligne, doit être signalée. De nouvelles obligations pèsent également sur les sites publiant des avis de consommateurs qui doivent désormais préciser si ces avis font ou non l'objet d'un contrôle et, si tel est le cas, les caractéristiques principales du contrôle mis en œuvre. Les consommateurs dont l'avis en ligne n'a pas été publié doivent se voir indiquer les raisons qui justifient son rejet. Les responsables des produits ou des services faisant l'objet d'un avis en ligne doivent pouvoir signaler un doute sur l'authenticité de cet avis, à condition que ce signalement soit motivé. Trois décrets, en date du 29 septembre 2017, précisent les modalités d'application de cette loi. Ils prévoient que les plateformes indiquent la date de publication de chaque avis et la date de l'expérience de consommation concernée. La plateforme doit également indiquer le délai de publication et de conservation des avis. Le cas échéant, elle rappelle les modalités de modification des avis. Sur le point particulier du référencement des établissements, les contrats proposés par les plateformes autorisent ces dernières à utiliser gratuitement l'ensemble de ses signes distinctifs (dénominations, logos, marques, etc.) ainsi que les photos et descriptifs des établissements concernés. Le professionnel qui ne souhaite pas que son établissement soit référencé ne doit donc pas conclure de contrat avec la plateforme. En l'absence de contrat conclu entre le professionnel et la plateforme, l'établissement dont la marque est utilisée sans autorisation peut, dans certaines conditions, agir en justice contre la plateforme. Dans une décision du 23 mars 2010, la Cour de justice de l'Union européenne a défini la responsabilité du prestataire d'un service de référencement sur Internet. Selon cet arrêt, si le prestataire n'a pas joué un rôle actif de nature à lui confier une connaissance ou un contrôle des données stockées, il ne peut être tenu responsable des données stockées à la demande d'un annonceur. Toutefois, le prestataire qui a pris connaissance du caractère illicite des données ou des activités de l'annonceur et n'a pas promptement retiré ou rendu inaccessibles ces données peut voir sa responsabilité engagée (CJUE, C-236/08 à C-238/08, 23 mars 2010, Google France SARL et Google Inc. c/Louis Vuitton Malletier SA). Le 13 juillet 2010, au vu de cette décision, la Cour de cassation a rendu un arrêt concernant le système d'annonces publicitaires de Google (Adwords) et a jugé que le prestataire de service de référencement qui se borne à stocker des mots-clés et à afficher les annonces ne commet pas une contrefaçon et que, dès lors, sa responsabilité ne peut être engagée. Pour sa part, l'Autorité de la concurrence a examiné le fonctionnement concurrentiel du marché de la publicité en ligne et dressé, pour plusieurs types de pratiques, une grille d'analyse permettant d'apprécier leur compatibilité avec le droit de la concurrence (Avis n° 10-A-29 du 14 décembre 2010 sur le fonctionnement concurrentiel de la publicité en ligne). S'agissant de la préoccupation relative à l'utilisation des noms de marque l'Autorité a estimé que les litiges « purement contractuels » ainsi que ceux qui sont « relatifs à la protection de la propriété intellectuelle » relèvent de la compétence exclusive du juge commercial (n° 287). Il revient donc au professionnel, qui estime que sa marque a été indument utilisée, d'agir en concurrence déloyale devant le tribunal de commerce. Enfin, un projet de règlement européen promouvant l'équité et la transparence pour les entreprises utilisatrices des services d'intermédiation en ligne est actuellement en cours d'examen au Parlement européen. Dans ce cadre, la France est attentive à ce que le texte, qui sera d'application directe en droit français, ne vienne pas dégrader la protection actuellement offerte aux professionnels par le droit des pratiques restrictives de concurrence. Ce règlement ne s'appliquera cependant qu'aux hypothèses dans lesquelles un opérateur a contracté avec une plate-forme fournissant des services d'intermédiation en ligne. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes est vigilante quant au respect des dispositions de la loi du 7 octobre 2016 pour une République numérique. Ainsi, au titre de ses missions de protection des consommateurs, elle peut effectuer des contrôles ayant pour but de vérifier le respect par les plateformes de leurs obligations relatives à la sincérité des avis des utilisateurs. Ces contrôles ont pour but, dans un premier temps, de sensibiliser les professionnels, notamment les petites entreprises, aux nouvelles dispositions. Des sanctions seront éventuellement appliquées en cas de manquements manifestes.