Question écrite n° 9559 :
Energies marines renouvelables en Outre-mer

15e Législature
Question signalée le 22 octobre 2018

Question de : M. Jean-Luc Mélenchon
Bouches-du-Rhône (4e circonscription) - La France insoumise

M. Jean-Luc Mélenchon attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire sur l'état des énergies marines renouvelables en Outre-mer. La loi de transition énergétique pour la croissance verte a fixé un objectif de 50 % d'énergies renouvelables dans le mix énergétique des départements d'Outre-mer à l'horizon 2030. Pourtant, entre 2012 et 2014, trois centrales thermiques ont été ouvertes à La Réunion, en Guadeloupe et en Martinique. Les centrales thermiques utilisent des énergies fossiles et sont de grandes productrices de gaz à effet de serre. Parallèlement, les projets d'énergies marines renouvelables sont arrêtés ou en attente. C'est le cas du projet NEMO en Martinique. Projet de centrale flottante porté par Naval Énergies, NEMO était le seul projet français d'énergies thermiques des mers (ETM). Le projet est gelé depuis le retrait de l'entreprise Akuo Energy. L'énergie thermique des mers est une alternative aux énergies fossiles dans les outre-mer. Cette énergie est basée sur le différentiel entre les températures des eaux de surface et des eaux plus profondes. Elle répond de manière efficace aux besoins croissants des territoires non connectés aux réseaux électriques continentaux. La France a donc tout intérêt à investir dans cette technique. A La Réunion, un système de climatisation fonctionnant grâce à l'eau froide pompée en profondeur est à l'arrêt depuis 2016, suite au désistement d'une filiale d'ENGIE (Climabyss). La Polynésie souhaite également équiper l'hôpital de Papeete de ce système. Malheureusement, depuis 2014, le projet est au point mort. Toujours à La Réunion, le projet d'énergie houlomotrice, CETO, a été abandonné en 2014. Enfin, dans le cas de l'éolien offshore, en Guadeloupe, un pré-diagnostic a été réalisé par la collectivité régionale. Il définit les zones potentielles de ces installations. Mais les études nécessaires au lancement de constructions n'ont toujours pas été lancées. Il se demande si la France souhaite voir émerger rapidement des énergies marines renouvelables dans nos outre-mer. Il rappelle que la France s'est fixée l'objectif d'atteindre une autonomie énergétique totale d'ici 2030 pour ses collectivités d'outre-mer. De plus, 97 % de la ZEE française est située en outre-mer. Il se demande pourquoi nos efforts ne sont pas concentrés dans ces zones où le potentiel est gigantesque.

Réponse publiée le 11 décembre 2018

Pour tenir compte des ressources et des dynamiques démographiques et économiques de chaque territoire, le code de l'énergie prévoit que l'État co-élabore avec les exécutifs régionaux des programmations pluriannuelles de l'énergie (PPE). Les énergies renouvelables en mer ont vocation dans ce cadre à prendre une place importante pour tendre vers un mix décarboné dans les outre-mer. À l'exception de Saint Pierre et Miquelon, l'ensemble des territoires ultramarins disposent désormais d'une PPE :Ces PPE prévoient un fort développement des énergies renouvelables électriques et thermiques. Par exemple, la part des énergies renouvelables dans le mix électrique devrait passer d'ici 2023 de 18 % à 62 % en Guadeloupe ou de 58 % à 87 % en Guyane.Malgré les mesures de maîtrise de la demande envisagées (près de 1.2 TWh d'ici 2023) et le développement des énergies renouvelables, pour faire face à l'évolution de la demande, les PPE prévoient la sécurisation de l'approvisionnement de certains territoires en renouvelant les installations obsolètes par des moyens thermiques (Guyane) et en construisant une nouvelle centrale thermique (Mayotte).Les mesures envisagées dans les transports reposent principalement sur un développement des transports en commun, un développement de bornes de recharge pour véhicules électriques (principalement à base d'énergie renouvelable avec stockage), le recours à une large part de véhicules « propres » dans les commandes publiques et de nombreuses études sur la mobilité. On peut en dresser la synthèse suivante :


En 2023 (2015)

Tx ENR Electrique

Production ENR Thermique

Economie d'énergie

CAPEX

Impact/an CSPE/fil de l'eau

Corse

40 % (32 %)

+ 130 GWh

- 90GWh

1.40 G€

- 60 M€

Réunion

67 % (37 %)

+ 164 GWh

- 360 GWh

3.20 G€

+ 60 M€

Guyane

85 % (64 %)

+ 36 GWh

- 151 GWh

1.16 G€

- 74 M€

Mayotte

40 % (5 %)

+ 20 GWh

- 24 GWh

0.20 G€

- 24 M€

Guadeloupe

66 % (18 %)

+ 40 GWh

- 508 GWh

1.35 G€

+ 115 M€

Martinique

56 % (6 %)

+ 11 GWh

- 50 GWh

1.88 G€

+ 55 M€
La question écrite souligne que les projets d'énergies marines renouvelables sont arrêtés ou en attente. En effet, les premiers projets n'ont pas pu voir le jour en raison de difficultés techniques rencontrées par les opérateurs :Naval Energies a rencontré des difficultés techniques sur le projet NEMO, liées à la conduite principale d'aspiration d'eau froide. Ce projet bénéficiait du soutien du Gouvernement via le programme des investissements d'avenir, qui a financé à hauteur de 7 M€ environ des briques technologiques essentielles au projet. Ce projet bénéficiait aussi de fonds européen NER300.Le projet Climabyss à La Réunion a été abandonné : il avait pour objectif de développer un réseau de froid à partir d'eau de mer. Malgré un fort soutien de l'État à hauteur de 20,3 M€ via le fonds chaleur, en complément d'aides européennes du fonds européen de développement régional (FEDER) à hauteur de 31,8 M€ et des financements par la contribution au service public de l'électricité (CSPE) via les économies d'énergie générées, ce projet n'a pas pu voir le jour en raison de difficultés des clients potentiels à contratualiser sur 25 ans. Toutefois, plusieurs projets sont à l'étude à La Réunion et il est fort probable que l'hôpital de Saint-Pierre soit le premier hôpital en France à être climatisé par eau de mer (Sea Water Air Conditioning - SWAC).Pour ce qui est du projet de SWAC en Polynésie, il revient à l'assemblée territoriale de se saisir du sujet, l'État n'étant pas compétent pour les questions énergétiques. Le prototype houlomoteur CETO à La Réunion a été arrêté pour des raisons techniques, suite au passage de l'ouragan Bejisa début 2014. En ce qui concerne l'éolien en mer en Guadeloupe, le pré-diagnostic réalisé en 2015 pour le compte de la région et de l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) a mis en évidence 4 zones au sud-ouest de l'île pour lesquelles les contraintes d'installation d'une ferme éolienne en mer sont limitées. Cependant, la technologie à déployer dans ces zones où la bathymétrie est située entre 40 et 60 m ou 200 et 300 m serait plutôt l'éolien flottant, qui n'a pas encore atteint un stade commercial. Quatre fermes pilotes d'éolien flottant ont été sélectionnées dans le cadre du programme d'investissement d'avenir pour un déploiement en Méditerranée et dans l'Atlantique. Les retours d'expérience de ces fermes permettront d'alimenter les scenarii envisageables pour la Guadeloupe en matière d'éolien en mer. Les conditions météo-océaniques de la Guadeloupe, et en particulier le risque cyclonique, devront être prises en compte afin d'adapter les technologies développées en France métropolitaine. Toutefois, des projets novateurs en cours de développement dans les outre-mer constitueront de véritables vitrines technologiques et conforteront la place des territoires ultra-marins comme pilote de la transition énergétique :stockage par hydrogène en Guyane et en Martinique ;micro-STEP (station de transfert d'énergie par pompage) en Martinique ;géothermie en Guadeloupe ;conversion des centrales à charbon à la biomasse en Guadeloupe et à La Réunion ;microgrids alimentés par des énergies renouvelables avec stockage à La Réunion. La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte fixe des objectifs ambitieux vu la part des transports dans le mix énergétique (66 %). Conformément au code de l'énergie, la Réunion, la Guadeloupe, la Guyane et Mayotte ont débuté la révision de leur PPE pour couvrir les périodes 2019-2023 et 2024-2028. Ces révisions permettront de mettre la priorité sur les transports et d'accentuer les efforts sur la maîtrise de la demande ainsi que sur les énergies renouvelables électriques et thermiques. La France souhaite que les énergies marines renouvelables se développent dans les territoires ultra-marins et a soutenu des projets de recherche et développement dans l'optique de leur déploiement futur à grande échelle une fois la maturité technologique atteinte.

Données clés

Auteur : M. Jean-Luc Mélenchon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Transition écologique et solidaire

Ministère répondant : Transition écologique et solidaire

Signalement : Question signalée au Gouvernement le 22 octobre 2018

Dates :
Question publiée le 19 juin 2018
Réponse publiée le 11 décembre 2018

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