Question de : M. Jean Lassalle
Pyrénées-Atlantiques (4e circonscription) - Non inscrit

M. Jean Lassalle alerte M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les inquiétudes des éleveurs français à l'approche de l'entrée en vigueur des accords du traité CETA. Alors que ce traité est en application provisoire depuis le 21 septembre 2017, sa ratification définitive par les Parlements nationaux prévue au deuxième semestre 2018, inquiète considérablement le monde agricole français. Premièrement, les filières d'élevage trouvent sa mise en application particulièrement alarmante et principalement la filière bovine française. En effet, selon elles, le volet agricole du texte du traité ne comporte aucune réelle garantie quant au respect des normes européennes ou de la qualité des productions. Alors que, selon les États, le CETA devait être « un accord exigeant en matière de normes ». Ainsi, le marché français pourrait être très rapidement inondé des produits potentiellement dangereux pour la santé publique. De surcroît, si le CETA accorde au Canada une augmentation de ses quotas d'exportation, 65 000 tonnes de bœuf et 80 000 tonnes de porc pourraient entrer sans droit de douane. De telles quantités seraient suffisantes pour déstabiliser ces filières d'élevage dont la situation est déjà très préoccupante. Deuxièmement, les agriculteurs revendiquent une protection plus rigoureuse de leurs produits AOP et AOC. En effet, la liste des 174 indications géographiques protégées (IGP) définie dans le cadre du CETA, concerne uniquement les produits dont le poids économique est significatif. Ainsi, certains AOC et AOP, comme miel, fromages, huile d'olive, vins et farine de châtaigne ou charcuterie, ne figurent pas dans cette liste et se retrouvent dans une position dangereuse, avec notamment le risque d'être contrefaits au Canada. En conclusion, si le CETA renforce la protection d'un petit nombre d'indications européennes au Canada, car uniquement 143, il renonce à protéger toutes les autres, alors que l'Europe compte plus de 1 400 produits AOP et AOC. De fait, ce traité s'éloigne de son objectif initial. Selon les filières agricoles françaises, ces mesures participent à la déstabilisation du monde agricole qui pourrait avoir des conséquences sociales graves dans les territoires et sur les populations directement et indirectement concernées. Dans ce contexte, il lui demande quelle est sa position et de quelle façon il compte défendre les filières agricoles françaises et répondre à ces légitimes inquiétudes.

Réponse publiée le 16 octobre 2018

Les accords de libre échange sont synonymes d'opportunités pour certaines filières agricoles pour lesquelles elles constituent un relais de croissance : l'accord économique et commercial global (CETA) a ainsi permis un meilleur accès au marché canadien pour les entreprises françaises, notamment pour les fromages avec l'obtention d'un contingent total de 18 500 tonnes. La protection de 145 indications géographiques (IG), représentant 173 produits dont 42 IG françaises (dont le jambon de Bayonne fait partie), a également été obtenue alors même que le Canada est un pays traditionnellement réticent au système de protection des IG. Les IG françaises protégées dans le CETA ont été sélectionnées en concertation avec les opérateurs en raison de leur potentiel à l'exportation et leur degré d'exposition à des risques d'usurpation. L'intégration dans le CETA de l'accord relatif au commerce des vins et spiritueux de 2003 élargit la protection des IG à celles des vins et spiritueux, soit 57 spiritueux et 488 vins sous réserve d'enregistrement auprès des autorités canadiennes compétentes. À ce jour, les formalités sont en cours. Dans le cadre du CETA, l'Union européenne (UE) a accordé au Canada 45 840 tonnes équivalent carcasse (tec) supplémentaires dans les six ans de contingents de viande bovine, 3 000 tec de viande de bison, supprimé les droits de douane relatifs au contingent de 14 950 tec de viande de haute qualité « Hilton » et octroyé un contingent à droit nul pour 7 5000 tec de viande de porc. Ces volumes constituent de la part des européens des concessions importantes. Dans le cadre de l'application provisoire du CETA depuis le 21 septembre 2017, les importations de viande qui en résultent, ont toutefois représenté moins de 0,82 % du volume de contingent octroyé pour l'année. En effet, le Canada n'est pas en capacité de répondre pleinement aux exigences de production. L'ensemble des importations de viande canadienne doit en effet respecter les préférences collectives européennes pour entrer sur le marché européen : seules sont admises les viandes issues de bêtes, nées, élevées et abattues au Canada. Les viandes issues d'animaux traités avec des hormones de croissance ou toute autre substance anabolisante non autorisée dans l'UE comme facteur de croissance resteront strictement interdites. De même, seules les techniques de décontamination des carcasses employées au sein de l'UE peuvent être utilisées par les abattoirs canadiens pour les viandes exportées vers l'UE. Afin d'assurer une mise en œuvre exemplaire du CETA, le Gouvernement a adopté le 25 octobre 2017 un plan d'action. Ce plan permettra d'assurer un suivi de l'impact économique de l'accord sur les filières agricoles et de renforcer la traçabilité des produits importés au travers de programmes d'audits sanitaires et phytosanitaires. Le plan d'action vise en outre à vérifier que l'application du CETA est effectivement conforme aux préférences collectives françaises. En cohérence avec les actions décidées dans le cadre du plan d'action sur la mise en œuvre du CETA, le Gouvernement fait en outre valoir que les concessions tarifaires sur les produits sensibles doivent s'inscrire dans les limites d'une « enveloppe globale », permettant de définir ce qui est soutenable pour les filières au regard du marché, à l'échelle de l'ensemble des négociations en cours ou à venir.

Données clés

Auteur : M. Jean Lassalle

Type de question : Question écrite

Rubrique : Traités et conventions

Ministère interrogé : Agriculture et alimentation

Ministère répondant : Agriculture et alimentation

Dates :
Question publiée le 26 juin 2018
Réponse publiée le 16 octobre 2018

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