16ème législature

Question N° 10002
de M. Rodrigo Arenas (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Paris )
Question écrite
Ministère interrogé > Santé et prévention
Ministère attributaire > Santé et prévention

Rubrique > santé

Titre > Les patients internés en psychiatrie pourront-ils sortir lors des JO ?

Question publiée au JO le : 11/07/2023 page : 6375
Réponse publiée au JO le : 14/11/2023 page : 10289
Date de changement d'attribution: 21/07/2023

Texte de la question

M. Rodrigo Arenas alerte M. le ministre de la santé et de la prévention sur l'injonction qui serait faite aux professionnels de la santé mentale de ne pas laisser sortir des malades qui n'auraient plus besoin d'être hospitalisés durant les jeux Olympiques. Lors de ses échanges avec les divers services de santé mentale de sa circonscription, M. le député a appris que la préfecture avait demandé, par oral, à ces hôpitaux et centres de soins, de ne pas délivrer de permis de sortie à leurs patients hospitalisés durant la durée des jeux Olympiques. Pour tester ces recommandations, la préfecture de police de Paris a demandé d'appliquer ces mêmes procédures durant le championnat de para-athlétisme qui auront lieu en juillet 2023 à Paris. M. le député a été alerté pour deux raisons. La première est que les médecins travaillant dans ces centres de santé s'inquiètent de devoir contraindre certains de leurs patients à rester enfermés sans nécessité médicale. La seconde est que ces centres ont une capacité d'accueil insuffisante pour répondre à cette injonction. Il lui demande comment s'explique et se justifie de telles demandes préfectorales.

Texte de la réponse

Le régime des soins hospitaliers de santé mentale est aujourd'hui beaucoup plus proche du droit commun qu'auparavant. Comme pour les soins somatiques, les patients souffrant de pathologies mentales bénéficient d'alternatives qui permettent d'éviter l'hospitalisation ou d'en réduire la durée. La feuille de route de la santé mentale et de la psychiatrie présentée le 28 juin 2018 par le ministère chargé de la santé - et enrichie en 2021 dans le cadre des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie - porte un axe visant à « améliorer les conditions de vie et d'inclusion sociale et la citoyenneté des personnes en situation de handicap psychique ». Cet axe contribue à la destigmatisation des troubles mentaux dans la population générale et à la non-discrimination des personnes concernées. Concernant la sortie d'un patient, elle est prononcée par le directeur de l'établissement sur proposition du médecin responsable de la structure médicale concernée, lorsque son état de santé ne requiert plus son maintien au sein de l'établissement. Pour information, la Haute autorité de santé évalue l'organisation de la sortie via des indicateurs spécifiques prévus dans le dispositif de certification des établissements de santé. A l'exception du mineur et de la personne hospitalisée sous contrainte dans un établissement ou un service de soins psychiatriques, la personne hospitalisée peut quitter à tout moment l'établissement tel que précisé dans la charte de la personne hospitalisée du 2 mars 2006 relative aux droits des personnes hospitalisées. Cette charte précise également que « toute personne hospitalisée avec son consentement pour des troubles mentaux dispose des mêmes droits liés à l'exercice des libertés individuelles que ceux reconnus aux autres patients. Des restrictions à l'exercice de leurs libertés individuelles peuvent être imposées aux personnes hospitalisées pour troubles mentaux sans leur consentement, dans la limite de celles nécessitées par leur état de santé et la mise en œuvre de leur traitement. Ces personnes doivent être informées dès leur admission et, par la suite, à leur demande, de leur situation juridique et de leurs droits. » Pour rappel, le consentement aux soins est un principe fondamental du droit de la santé. Cependant, l'une des manifestations de la maladie mentale peut être, pour la personne concernée, l'ignorance de sa pathologie et l'incapacité à formuler le besoin d'une prise en charge sanitaire. Ainsi, afin de garantir un accès aux soins aux personnes se trouvant dans cette situation, un encadrement rigoureux des « soins psychiatriques sans consentement », conciliant tant le besoin de soins, la sécurité des patients et des tiers, que le respect des droits des personnes malades, a été conçu. Conformément aux exigences constitutionnelles, un contrôle systématique des mesures d'isolement et de contention par l'autorité judiciaire a été introduit par la loi du 22 janvier 2022 renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire et modifiant le code de la santé publique. La loi a été accompagnée d'un décret publié le 23 mars 2022 modifiant la procédure applicable devant le juge des libertés et de la détention en matière d'isolement et de contention mis en œuvre dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement ainsi que d'une instruction de la direction générale de l'offre de soins du 29 mars 2022 relative au cadre juridique des mesures d'isolement et de contention en psychiatrie et à la politique de réduction du recours aux pratiques d'isolement et de contention. Il existe par ailleurs au sein de chaque établissement de santé une commission des usagers composée notamment de représentants des usagers. Parmi ses missions, cette commission veille au respect des droits des usagers et formule des propositions à la direction de l'établissement pour améliorer l'accueil, la qualité et la sécurité des soins. Il existe aussi des outils garant des droits des personnes en soins psychiatriques sans consentement. Le juge des libertés et de la détention (JLD) peut être saisi à tout moment d'une demande de mainlevée et la commission départementale des soins psychiatriques (CDSP) a pour rôle de garantir le respect des droits fondamentaux des usagers en soins psychiatriques sous contrainte. Parmi ses membres, figure un représentant d'association agréée de familles de personnes atteintes de troubles mentaux (article L. 3223-2 du code la santé publique (CSP). Créées par la loi du 27 juin 1990 et renommées par la loi du 5 juillet 2011, les CDSP sont chargées d'examiner la situation des personnes admises en soins psychiatriques sans consentement au regard du respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes (dont obligatoirement celles des mesures admises en cas de péril imminent) et, en cas de besoin, elles peuvent notamment proposer au JLD d'ordonner la mainlevée de la mesure (article L. 3223-1 du CSP). La liberté d'aller et venir est un droit inaliénable de la personne humaine. Dans une démocratie qui assure à ses citoyens les droits fondamentaux des personnes, tout doit être mis en œuvre pour favoriser l'exercice de ce droit. Enfin, la liberté de prescription est un devoir : « Dans les limites fixées par la loi et compte tenu des données acquises de la science, le médecin est libre de ses prescriptions, qui seront celles qu'il estime les plus appropriées en la circonstance » (cf. article 8 du code de déontologie médicale - article R. 4127- 8 du code de la santé publique). Dans ce cadre, aucun changement de doctrine n'est à signaler en vue des futurs Jeux olympiques et paralympiques de 2024.