Question écrite n° 10036 :
La situation critique des producteurs de cerises du sud-est

16e Législature

Question de : M. Emmanuel Taché de la Pagerie
Bouches-du-Rhône (16e circonscription) - Rassemblement National

M. Emmanuel Taché de la Pagerie alerte M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la situation critique des producteurs de cerises du sud-est de la France. Les producteurs de cerises alertent depuis plusieurs mois sur les grandes difficultés auxquelles ils sont confrontés dans le cadre de la lutte contre la Drosophila suzukii. Si la récolte des cerises précoces a pu débuter il y a plusieurs semaines dans des conditions sanitaires maîtrisées par les producteurs, celle des cerises tardives est largement hypothéquée dans le sud-est par la présence des ravageurs. En effet, malgré tous les essais effectués par les producteurs, aucun des traitements autorisés, y compris les plus naturels, n'a permis de protéger efficacement les cerises tardives. Les vols de Drosophila suzukii prolifèrent chaque jour de manière exponentielle en lien avec les conditions climatiques favorables au développement de l'insecte. Dans le même temps, l'inefficacité des traitements a permis la réapparition des attaques par la drosophile classique. Les services de l'État, le réseau consulaire et les organisations professionnelles ont commencé à évaluer l'ampleur des dégâts et du préjudice subi par les producteurs de cerises du sud-est. La situation évoluant très rapidement en lien avec les cycles rapprochés de reproduction de Drosophila suzukii, la situation nécessite une mobilisation rapide et appuyée des services de l'État, pour assurer la pérennité de cette filière et des exploitations pour lesquelles la cerise est bien souvent la production majeure pour le revenu. Enfin, il convient de rappeler que dans certaines régions, les conditions climatiques exceptionnelles, caractérisées par des épisodes de grêle et de pluies, répétitifs et inhabituels, ont causé des dégâts considérables dans les exploitations de nombreux arboriculteurs. Au-delà d'une impérative et urgente indemnisation des producteurs, dont les modalités doivent pouvoir être connues le plus rapidement possible, il convient à plus long terme de mobiliser les ressources nécessaires pour accélérer la recherche et les moyens de lutte contre la Drosophila suzukii et d'autres ravageurs récurrents. L'avenir de filières fruiticoles entières est aujourd'hui en péril. Aussi, il lui demande si le Gouvernement va mettre en œuvre l'accompagnement financier exceptionnel pour les pertes 2023 dues aux attaques sévères de Drosophila suzukii.

Réponse publiée le 5 septembre 2023

La filière française de la cerise est confrontée aux retraits successifs des molécules actives contre la Drosophila suzukii, principal ravageur de cette culture. La dernière interdiction au niveau européen en date concerne le phosmet, pour lequel le délai de grâce pour l'utilisation des stocks a expiré le 1er novembre 2022. Face aux difficultés rencontrées par les producteurs pour assurer la protection phytosanitaire des vergers, et après concertation avec les acteurs de la filière cerise, le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire a décidé de lancer le 16 décembre 2022 un plan d'action ciblé. Le groupe de travail qui associe les principaux acteurs de la filière cerise et de la recherche, a permis des avancées tant dans l'élaboration du plan d'action pluriannuel que dans la mise en place des mesures d'urgence. La première priorité était d'ajuster la stratégie de lutte contre la Drosophila suzukii sur cerises pour la campagne 2023 en travaillant à élargir la palette de solutions disponibles, à la suite du retrait des produits à base de la substance active phosmet, pour que les producteurs de cerises de France puissent disposer de moyens de protection efficaces. La filière cerise a déposé quatre demandes de dérogation « 120 jours » pour l'usage de produits phytopharmaceutiques contre la mouche Drosophila suzukii au titre de la campagne 2023 : EXIREL (cyantraniliprole), SUCCESS 4 (spinosad, SOKALCIARBO (argile) et AFFIRM (benzoate d'emamectine), pour une application au 1er avril 2023. Dès lors qu'elles ne comportent pas de risques avérés pour la santé humaine, elles ont été accordées. Ce travail doit aussi s'accompagner d'une politique claire permettant de s'assurer que les produits végétaux mis sur le marché en France répondent au même niveau d'exigence. Ainsi, la France a demandé à la Commission européenne d'abaisser sans délai la limite maximale de résidus en phosmet sur les cerises, afin de s'assurer que les cerises importées en 2023 ne peuvent pas être traitées avec cette substance. La France a décidé sans attendre de faire usage d'une clause de sauvegarde nationale pour s'assurer du respect de la législation vis-à-vis des produits importés. Un arrêté suspend pour un an « l'introduction, l'importation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de cerises fraîches destinées à l'alimentation » provenant de pays où le phosmet est autorisé pour cette production, à l'exception des produits de l'agriculture biologique. Cet arrêté a été complété par un avis aux opérateurs listant les pays de provenance concernés par cette interdiction. En outre, le travail se poursuit concernant l'accompagnement financier exceptionnel pour la campagne 2023 concernant la crise multiforme subie par les producteurs. Tout ce qu'il est possible de faire en termes de soutien et en particulier sur la réserve de crise de l'Union européenne qui vient d'être confirmée, est regardé. Le ministère chargé de l'agriculture a pris pleinement la mesure de l'urgence de la situation ainsi que de la détresse des producteurs, et a déjà mobilisé ses services pour expertiser et documenter les pertes. Enfin le ministère reste mobilisé, en lien avec l‘institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement et le centre technique interprofessionnel des fruits et légumes, pour, à partir d'un diagnostic de la situation actuelle, concevoir et mettre en œuvre des solutions de protection des vergers dans le cadre d'une agriculture durable. L'objectif est de mobiliser tous les leviers disponibles et de miser sur l'innovation dont les lâchers de parasitoïdes que vous mentionnez qui ont vocation à être intégré dans un bouquet de solutions alternatives. Ce plan d'action s'inscrit pleinement dans les priorités du plan de souveraineté fruits et légumes, présenté le 1er mars 2023 lors du salon international de l'agriculture. Il s'intègre aussi dans la dynamique de planification et transition engagée et contribuera au plan d'action stratégique destiné à renforcer le pilotage et l'adaptation des techniques de protection des cultures. Ainsi, la question des impasses phytosanitaires pour les productions de fruits et légumes fait l'objet d'un travail spécifique entre les organisations professionnelles et le ministère chargé de l'agriculture. Les moyens de recherche et développement pour ces filières sont d'ores et déjà renforcés en 2022 dans le cadre des financements du compte d'affectation spéciale pour le développement agricole et rural et la stratégie d'accélération « Système agricoles durables et équipements agricoles contribuant à la transition écologique » du quatrième programme d'investissements d'avenir (PIA 4).

Données clés

Auteur : M. Emmanuel Taché de la Pagerie

Type de question : Question écrite

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : Agriculture et souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Agriculture et souveraineté alimentaire

Dates :
Question publiée le 18 juillet 2023
Réponse publiée le 5 septembre 2023

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