16ème législature

Question N° 10610
de M. Julien Odoul (Rassemblement National - Yonne )
Question écrite
Ministère interrogé > Éducation nationale et jeunesse
Ministère attributaire > Éducation nationale et jeunesse

Rubrique > enseignement

Titre > Sur le port d'une tenue uniforme pour les collèges et lycées

Question publiée au JO le : 01/08/2023 page : 7150
Réponse publiée au JO le : 31/10/2023 page : 9736

Texte de la question

M. Julien Odoul interroge M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur l'instauration d'une tenue uniforme dans les écoles et les collèges de la République. Le 12 janvier 2023, alors que le groupe Rassemblement National présentait sa proposition de loi sur le port d'une tenue uniforme dans les établissements scolaires lors de sa niche parlementaire, l'ancien ministre des comptes publics et actuel ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse avait estimé qu'il s'agissait d'un « vrai débat » et s'était dit « favorable à une expérimentation [de l'uniforme] ». Quelques jours après, le 15 janvier 2023, l'ancien ministre des comptes publics avait évoqué l'idée d'instaurer le port de l'uniforme scolaire sur la base du volontariat, en consultant au préalable les parents d'élèves. Si cette expérimentation s'avérait être positive, elle pourrait être généralisée. Cette déclaration s'ajoute à celle de l'épouse du Président de la République, Mme Brigitte Macron, qui, dans un entretien accordé au journal Le Parisien, s'était également déclarée en faveur du port de l'uniforme, « mais avec une tenue simple et pas tristoune ». Aujourd'hui, l'uniforme est porté dans de nombreux établissements français : les collèges et lycées de la défense par exemple, mais également des internats d'excellence comme le centre de formation d'apprentis d'Auxerre qui revient à l'uniforme pour, entre autres, développer le sentiment d'appartenance. En 2003, Xavier Darcos, ancien ministre de l'éducation nationale, avait relancé le débat sur la tenue scolaire et suggérait déjà son retour dans les établissements scolaires, notamment pour supprimer les différences visibles de niveau social ou de fortune. Dix-sept ans après, un sondage BVA de 2020 révélait que 63 % des Français, toute sensibilité politique confondue, étaient favorables au retour de l'uniforme sur le temps scolaire dans les établissements publics. Le premier argument avancé est quasiment toujours le même : lutter contre les inégalités sociales. Il est évident que l'existence de marqueurs sociaux qui distinguent les élèves entre eux et révèlent par conséquent les différences de niveau de fortune de leurs parents vient contrarier une ambition républicaine fondamentale : l'égalité des chances. Dans la vie scolaire, les tenues vestimentaires provoquent souvent jalousies et rivalités et peuvent conduire à des tensions, voire à des violences entre les élèves, quand ce n'est pas du harcèlement. Le port d'une tenue uniforme aux couleurs de l'établissement permettrait d'une part de faire cesser cette course aux marques coûteuses, génératrices de tensions et d'inégalités sociales. Elle fait d'ailleurs ses preuves en dehors de l'Hexagone, comme en Martinique où l'uniforme a été mis en place dans quelques écoles et dans tous les collèges et lycées et ce au nom de l'égalité entre les élèves. D'autre part, il s'agirait aussi de lutter contre le communautarisme islamiste. La multiplication inquiétante dans les établissements publics de tenues à caractères religieux, notamment de ces robes islamiques appelées abayas, vient légitimer la question de la réinstauration de l'uniforme obligatoire à l'école et au collège, où, chaque jour, la République laïque recule. L'ancien ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, M. Pap Ndiaye, a toujours été opposé au port d'une tenue uniforme, lui qui échoué à faire respecter les principes républicains au sein des établissements scolaires. Pour rappel, environ 500 cas d'atteintes à la laïcité ont été recensés en mars 2023, principalement pour port de vêtements ou signes religieux. Malheureusement, rien n'a été fait pour endiguer l'entrisme islamiste dans les collèges et les lycées durant ces longs mois de politique attentiste menée par M. Pap Ndiaye. Les professeurs et les équipes pédagogiques ne se sont jamais sentis autant abandonnés par le Gouvernement et ne savent plus comment s'armer face à un repli communautaire qui gagne du terrain. En clair, un flou législatif ainsi qu'une certaine passivité des pouvoirs publics subsistent en France. Certains l'ont bien compris et s'en servent pour introduire des tenues religieuses jugées « confuses » mais clairement islamistes à l'école. En ce sens, il souhaite savoir s'il est toujours favorable à l'instauration d'une tenue uniforme dans les collèges et les lycées de la République française et s'il compte l'inscrire à son ordre du jour.

Texte de la réponse

Permettre à chaque élève d'aller au bout de ses potentialités, de devenir un citoyen libre, éclairé, doté des mêmes droits et devoirs que ses concitoyens et conscient d'une destinée partagée quelle que soit son origine sociale ou territoriale est la mission fondamentale de l'école républicaine. La liberté, l'égalité, la fraternité et la laïcité. Le fondement de notre contrat social qui permet à tout enfant de la République de grandir à l'école et par l'école, à l'abri de tout prosélytisme. Selon les circonstances, le port d'une tenue uniforme peut contribuer à atteindre cet objectif, parce qu'il permet de fédérer autour d'une école et de limiter des comparaisons entre élèves potentiellement préjudiciables. Le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse est favorable à des initiatives locales du port d'une tenue uniforme, notamment dans le cadre du conseil national de la refondation. Ces initiatives s'inscrivent dans l'état du droit actuel qui repose précisément sur l'existence d'un consensus et l'initiative du chef d'établissement. En effet, la décision de rendre obligatoire une tenue uniforme relève du règlement intérieur de l'établissement scolaire, qui est adopté par leurs instances associant l'ensemble de la communauté éducative. Conformément à l'autonomie reconnue aux établissements publics locaux d'enseignement (EPLE) par l'article L. 421-4 du code de l'éducation, il appartient au conseil d'administration de ces établissements de définir d'éventuelles règles vestimentaires dans le règlement intérieur. Il convient toutefois d'avoir une vision d'ensemble : l'introduction générale et absolue du port d'une tenue uniforme, s'il permettrait d'effacer temporairement certains comportements, ne saurait suffire à tenir notre promesse républicaine, dans la mesure où c'est bien l'ensemble des dispositifs pédagogiques et éducatifs qui concourent à la transmission des valeurs de la République et à l'instauration d'un climat scolaire favorable aux apprentissages.