Question écrite n° 10900 :
Faire la lumière sur les circonstances du naufrage du 24/11/2021 dans la Manche

16e Législature

Question de : Mme Karine Lebon
Réunion (2e circonscription) - Gauche démocrate et républicaine - NUPES

Mme Karine Lebon interroge M. le secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer, sur la promesse faite le 17 novembre 2022 lors des débats sur l'accord France - Royaume-Uni relatif à la sûreté maritime et portuaire. Plusieurs collègues députés avaient alors évoqué les articles de presse révélant les circonstances du naufrage de l'embarcation survenu dans la nuit du 23 au 24 novembre 2021 au large de Calais. 27 personnes (17 hommes, 7 femmes et 3 enfants) sont mortes noyées. Leurs corps ont été retrouvés par l'équipage d'un chalutier le lendemain. L'article du journal Le Monde, paru le 13 novembre 2022, a mis en évidence des dysfonctionnements imputés aux sauveteurs français du centre régional opérationnel de surveillance et de sauvetage (CROSS) de Gris-Nez. Selon les enquêteurs de la section de recherche de la gendarmerie maritime de Cherbourg, en charge de l'enquête judiciaire, malgré de nombreux appels de détresse réalisés par les passagers de l'embarcation, aucun moyen de sauvetage français n'a été envoyé la nuit du drame. Des propos navrants et déplacés auraient également été prononcés par certains militaires à l'encontre des migrants. Dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, M. le secrétaire d'État a expliqué qu'une enquête judiciaire était en cours et que « l'administration [avait] également lancé une enquête interne ». Il a précisé que « si ces faits sont avérés, si ces personnes étaient dans les eaux françaises et si à un quelconque moment il y a eu un manquement, une erreur, les sanctions seront prises ». Dans les conclusions des gendarmes remises à la juge d'instruction, les enquêteurs auraient noté que « l'existence de cette enquête interne n'a pas été montrée ». Jeudi 25 mai 2023, l'enquête judiciaire a conduit à la mise en examen de cinq militaires du CROSS de Gris-Nez pour non-assistance à personne en danger. Ce drame sans précédent mérite que le Gouvernement fasse la lumière sur les possibles manquements des secours français. D'autant que le nombre de traversées ne cesse d'augmenter ces derniers mois. Toujours plus de femmes, d'enfants et d'hommes tentent de rejoindre l'Angleterre, pour échapper à la guerre, aux persécutions et aux injustices qu'ils vivent dans leur pays. Mme la députée souhaite donc savoir où elle peut trouver les résultats de « l'enquête interne » évoquée par M. le secrétaire d'État le 17 novembre 2022. Elle aimerait également savoir pourquoi les gendarmes déclarent ne pas avoir eu accès à cette enquête interne et si des sanctions administratives ont été prises à l'encontre des militaires du CROSS de Gris-Nez présents la nuit du naufrage.

Réponse publiée le 12 septembre 2023

Le naufrage de l'embarcation causant la mort de 27 migrants en Manche mer du Nord le 24 novembre 2021 est un terrible drame. Il est survenu dans un contexte où les traversées ont augmenté à un rythme exponentiel ces dernières années : elles ont en effet été multipliées par 40 depuis 2018. 1 500 traversées ont été enregistrées en 2018, nous en sommes à 50 000 aujourd'hui. Cette tragédie humaine a suscité une très vive émotion, tout comme celle survenue le 12 août 2023 où six personnes sont décédées. L'inspection interne menée en 2021 par le Directeur du CROSS Gris-Nez, à laquelle il est fait référence, n'a pas fait état d'une conclusion notable, il n'y a donc pas eu de sanctions administratives prises à ce jour à l'encontre des militaires du CROSS Gris-Nez présents la nuit du naufrage. Les gendarmes ont eu accès à ce document qui est potentiellement versé à l'instruction judiciaire. Dans ce cadre et comme évoqué précédemment à l'Assemblée nationale, il faut laisser la justice faire son travail. Si les conclusions judiciaires divergent des conclusions internes, des conséquences administratives pourront être tirées. Par ailleurs, dans le cas précis de la Manche Mer du Nord et pour répondre aux besoins de moyens supplémentaires liés à la multiplication des traversées de migrants, le Gouvernement a décidé de renforcer notablement les moyens de l'action de l'État en Manche. Ainsi, les moyens humains intégrés au CROSS Gris-Nez ont été significativement augmentés (6 personnes recrutées), deux navires ont été affrétés pour renforcer les moyens présents en mer, et le Gouvernement est également en train de déployer des drones qui sont d'une aide précieuse dans ces opérations de sauvetage. Des travaux de modernisation des CROSS ont par ailleurs été initiés dans le cadre du plan de relance et se poursuivent pour adapter au mieux ces derniers aux évolutions des missions qui leurs sont dévolues. L'ensemble des acteurs de l'Action de l'État en mer réalisent tout au long de l'année un travail remarquable pour sauver des vies. Les CROSS sauvent plus de 6 000 vies humaines chaque année. Et leur travail est plus difficile encore ces dernières années avec l'explosion des traversées. Pour cette seule année 2023, plus de 2 000 migrants ont été secourus en Manche mer du Nord.

Données clés

Auteur : Mme Karine Lebon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Mer et littoral

Ministère interrogé : Mer

Ministère répondant : Mer

Dates :
Question publiée le 15 août 2023
Réponse publiée le 12 septembre 2023

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