Question écrite n° 11098 :
Protection des professeurs face aux collectifs extrémistes de parents d'élèves

16e Législature

Question de : M. Karl Olive
Yvelines (12e circonscription) - Renaissance

M. Karl Olive appelle l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur l'influence des collectifs de parents d'élèves tendant vers un extrémisme religieux et leur impact sur la liberté des enseignants. Depuis quelques années, différents collectifs de parents d'élèves extrémistes font régulièrement parler d'eux : menaces, humiliations et dénonciations anonymes des professeurs. Toutes les situations deviennent des excuses pour accuser les enseignants de « propagande LGBT » ou « pro immigration ». Quelques enseignants menacés par ces collectifs ont eu le courage de continuer leur projet et de porter plainte, mais de nombreux autres ont abandonné leur travail d'éducation par peur des représailles. Les effets sur certains groupes scolaires sont désastreux. À Compiègne, Valenciennes ou encore en Vendée, le nombre de cas de menace de mort sur le corps enseignant ne fait que croitre. La laïcité constitue l'un des axes prioritaires de l'éducation nationale et de l'action politique de M. le ministre, cette dernière doit donc être enseignée sans subir une contrainte de la part de collectifs conservateurs. C'est aussi une question d'égalité entre les élèves, qui ne pourront être pareillement ouverts sur le monde si certains de leurs professeurs s'autocensurent par peur d'un acteur extérieur puritain. Aussi, il souhaite prendre connaissance des pistes de réglementation nationale que le ministère compte prendre afin de protéger les professeurs, les directions d'établissements et la liberté d'enseignement face à ces collectifs violents.

Réponse publiée le 19 mars 2024

Dans le contexte de l'attentat terroriste ayant coûté la vie au professeur Dominique Bernard au lycée Gambetta d'Arras, la mission émancipatrice de l'École, de ses personnels et des programmes d'enseignement doit être soutenue avec toujours plus de force. L'ensemble de l'institution se mobilise ainsi quotidiennement pour défendre les valeurs et principes républicains. Dans cet esprit, la remontée des intimidations et atteintes que subit l'institution est primordiale pour s'assurer de l'effectivité des programmes d'enseignement, notamment ceux susceptibles de faire l'objet de contestations au nom de différentes idéologies ou croyances, comme c'est le cas de l'éducation à la sexualité, de la lutte contre le racisme, l'antisémitisme, le sexisme et les LGBTphobies, ainsi que contre tous les discours de haine. L'accompagnement des professeurs et plus largement de l'ensemble des personnels dans l'exercice de leurs missions s'appuie en outre sur le travail quotidien des référents qui, en académie, pilotent la transmission des valeurs républicaines : membres des équipes valeurs de la République, équipes de pilotage en éducation à la sexualité, référents égalité filles-garçons, référents prévention des LGBTphobies, référents mémoire et citoyenneté, entre autres. L'arsenal juridique a été renforcé pour affermir l'institution et mieux protéger les personnels face aux potentielles contestations. Ainsi, plusieurs délits ont été créés par la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République afin de renforcer la protection des agents publics qui concourent au service public de l'éducation nationale. Par exemple, le délit de menaces, violences ou actes d'intimidation à l'encontre d'une personne participant à l'exécution d'une mission de service public aux fins d'obtention d'une dérogation aux règles régissant ce service sont ainsi punis de 5 ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende par l'article 433-3-1 du code pénal. Ce délit vise notamment à interdire à quiconque de se prévaloir de ses croyances religieuses pour déroger aux règles de fonctionnement des services publics et de permettre à l'administration de porter plainte pour de tels actes commis à l'encontre de ses agents. De même le 3ème alinéa de l'article 431-1 du code pénal dispose : « Le fait d'entraver, d'une manière concertée et à l'aide de menaces, l'exercice de la fonction d'enseignant est puni d'un an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende ». Enfin l'article 223-1-1 du code pénal vise à réprimer la mise en danger des personnes, en particulier des agents publics, par la révélation d'informations de nature privée ou professionnelle. Pour agir, l'École dispose de différents outils : la circulaire du 9 novembre 2022 publiée au BOEN n° 42 du 10 novembre 2022 a posé le cadre d'un nouveau « Plan laïcité dans les écoles et les établissements scolaires » et a notamment pour but de renforcer la protection et le soutien aux personnels mis en cause ou menacés (messages haineux en ligne, actes d'intimidation, violences, harcèlement…). Cette circulaire insiste, sur le fait que « toute attaque, de quelque nature que ce soit, ou toute menace d'un personnel doit donner lieu à une réaction de l'institution scolaire ». Plusieurs de ses annexes permettent une mise en œuvre concrète de ses dispositions, notamment une fiche réflexe en cas de menace ou de mise en cause d'un personnel, une fiche pour renforcer la protection des agents publics qui concourent au service public de l'éducation et une fiche rappelant les délits créés par la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021. Un modèle de plainte et un modèle de signalement en application de l'article 40 du code de procédure pénale sont également annexés à cette circulaire. Cette circulaire rappelle que la protection des personnels est une obligation de l'employeur et que tout manquement engage sa responsabilité. Ainsi, toute attaque, de quelque nature que ce soit, ou toute menace à l'encontre d'un personnel doit donner lieu à une réaction de l'institution scolaire, consistant à signaler les faits, à prendre les mesures conservatoires et à accorder la protection fonctionnelle. À la suite de l'attentat d'Arras, le ministre a rappelé à plusieurs reprises la fermeté avec laquelle il faut répondre à toutes les atteintes aux valeurs de la République et le devoir de sécurité dû à tous les élèves et à tous les personnels afin que l'École remplisse sa mission dans les conditions de sérénité indispensables à son fonctionnement.

Données clés

Auteur : M. Karl Olive

Type de question : Question écrite

Rubrique : Laïcité

Ministère interrogé : Éducation nationale et jeunesse

Ministère répondant : Éducation et jeunesse

Dates :
Question publiée le 5 septembre 2023
Réponse publiée le 19 mars 2024

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