16ème législature

Question N° 11380
de Mme Caroline Colombier (Rassemblement National - Charente )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > état civil

Titre > Conséquences néfastes de la loi relative au choix du nom issu de la filiation

Question publiée au JO le : 19/09/2023 page : 8239
Réponse publiée au JO le : 31/10/2023 page : 9778

Texte de la question

Mme Caroline Colombier alerte M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences néfastes de l'entrée en vigueur de la loi n° 2022-301 du 2 mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation. Depuis un an, l'entrée en vigueur de ladite loi a permis de faciliter et de simplifier les démarches pour changer de nom en France en interchangeant celui du père ou de la mère (suppression du passage devant un juge, jusqu'alors nécessaire et processus désormais plus rapide en mairie). Cette simplification a provoqué un afflux massif de 70 000 demandes de changement de nom, bien au-delà des 15 000 prévues initialement. Cela a créé des défis pour les autorités administratives chargées de mettre à jour de nombreuses identités, provoquant parfois des problèmes. Ainsi, une alerte inquiétante a été émise par les services de renseignement après qu'un citoyen français a exploité la loi sur le changement de nom pour dissimuler ses antécédents judiciaires et postuler à un poste de policier adjoint en modifiant son nom. Le problème réside dans la complexité administrative, car le processus de mise à jour des informations liées au changement de nom peut prendre du temps. Cela crée une vulnérabilité potentielle que des individus malintentionnés pourraient exploiter en jouant sur les délais fluctuants. De plus, cette nouvelle possibilité de changer de nom facilite le contournement des enquêtes administratives de sécurité avec une identité propre. Aussi, devant ces vulnérabilités inquiétantes d'effacement des antécédents judiciaires et de contournement des enquêtes, rendus possibles par le nouveau droit en vigueur, elle lui demande comment il compte s'assurer que les auteurs d'infractions de droit commun, sexuelles, voire terroristes, ne puissent recourir à cette procédure pour « s'évaporer dans la nature », voire pour se présenter à des emplois dans lesquels ils pourraient se révéler à nouveau dangereux.

Texte de la réponse

La nouvelle procédure simplifiée de changement de nom créée par la loi n° 2022-301 du 2 mars 2022 a certes vocation à simplifier les démarches pour changer de nom mais elle demeure particulièrement encadrée. L'article 61-3-1 du code civil prévoit ainsi, d'une part, que le choix du nom est limité aux noms de la parentèle, c'est-à-dire uniquement à ceux des parents qui figurent sur l'acte de naissance de l'intéressé, et, d'autre part, que le recours à cette procédure n'est possible qu'une seule fois au cours de la vie. Cette nouvelle procédure ne permet donc pas de prendre n'importe quel nom, ni de procéder à des changements de nom à répétition. Par ailleurs, la traçabilité du changement de nom est garantie. Pour les personnes nées en France, lorsqu'elles établissent des actes de l'état civil ou qu'elles apposent les mentions en marge de ces derniers, les communes sont tenues d'adresser à l'INSEE des informations nominatives afin de lui permettre d'actualiser le Répertoire national d'identification des personnes physiques (RNIPP), et les changements de nom figurent bien au nombre des informations nominatives transmises à l'INSEE. Ce répertoire contient la mise à jour exacte de l'identité formelle des individus. L'INSEE communique ensuite tous les mois au casier judiciaire national (CJN) la mise à jour du RNIPP. Cette communication permet au CJN d'actualiser les changements d'identité des personnes condamnées, dès lors qu'elles sont nées en France. Leurs antécédents judiciaires resteront donc accessibles, malgré un changement de nom. Si des auteurs d'infractions qui ont recouru à la procédure simplifiée de changement de nom postulent à des emplois relevant d'enquêtes administratives de sécurité, la consultation des bulletins de leur casier judiciaire ainsi actualisé permettra de les identifier en dépit de leur changement de nom. Pour les personnes nées à l'étranger, le système d'information du casier judiciaire permet également de retrouver le dossier au nom antérieur, qu'il s'agisse d'une adjonction ou d'une substitution de nom, dès lors que la recherche de casier s'effectue à partir des données d'identité complètes fournies à l'appui de la demande de bulletin (date et lieu de naissance, filiation). La vérification, lors de l'enquête ouverte à la suite de la commission d'une infraction reprochée à une personne ayant récemment changé de nom, du relevé signalétique de ses empreintes digitales fait apparaître également, si ces dernières ont été prélevées avant le changement de nom, l'ancienne identité de cette personne. Cet élément peut être communiqué au CJN lors d'une demande de bulletin ou d'enregistrement d'une nouvelle condamnation. Enfin, s'agissant du suivi des personnes condamnées par les services de l'application des peines, le recours à cette procédure simplifiée de changement de nom n'a aucune conséquence sur leur prise en charge judiciaire à leur libération. Dans un souci de traçabilité, le dossier individuel de la personne suivie conserve l'historique du changement d'état civil.