16ème législature

Question N° 11577
de Mme Servane Hugues (Renaissance - Isère )
Question écrite
Ministère interrogé > Comptes publics
Ministère attributaire > Comptes publics

Rubrique > impôt sur le revenu

Titre > Rétablissement de la demi-part fiscale

Question publiée au JO le : 26/09/2023 page : 8402
Réponse publiée au JO le : 17/10/2023 page : 9187

Texte de la question

Mme Servane Hugues attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics, sur le rétablissement de la demi-part fiscale pour tous les veufs et les veuves. Jusqu'à l'imposition des revenus de 2008, les contribuables célibataires, divorcés, séparés ou veufs, sans enfant à charge, bénéficiaient d'une majoration d'une demi-part supplémentaire de quotient familial lorsqu'ils vivaient seuls et avaient un ou plusieurs enfants faisant l'objet d'une imposition distincte ou avaient eu un enfant décédé après l'âge de seize ans. La suppression de cet avantage n'a pas été sans conséquence. Effective en 2012, cette mesure a eu pour effet d'augmenter l'impôt sur le revenu de certaines personnes et de faire entrer d'autres dans l'imposition pour la première fois. Au décès de son conjoint, la personne veuve retraitée voit son quotidien bouleversé alors que ses charges restent identiques. Depuis la suppression de cet avantage, elle constate également que son revenu fiscal de référence augmente. Elle devient alors imposable ou elle subit une hausse de son impôt sur le revenu. En 2014, sur les 3,6 millions de contribuables concernés par cette suppression, environ deux millions étaient devenus imposables ou avaient vu leurs impôts augmenter. Si le décès d'un être proche a un coût humain, celui-ci a donc de surcroît un coût fiscal. Sans nier l'effort intergénérationnel demandé aux retraités, il s'agit de garantir une justice sociale et de lutter contre la paupérisation des pensions de retraite des plus modestes. Cet avantage représentait un coût de 1,7 milliard d'euros en 2008, le coût de son rétablissement sous condition serait aujourd'hui évalué entre 300 et 700 millions d'euros. Elle mettrait fin également, à ce qui peut être vécu comme une sanction fiscale qui vient s'ajouter à la peine provoquée par la perte d'un conjoint ou d'une conjointe. Les frais d'obsèques, les frais de succession, les charges de la propriété sont d'abord supportées par le survivant. C'est d'ailleurs cette motivation qui justifierait, en plus de la vie commune durant des années et des charges du ménage, l'attribution d'un avantage fiscal matérialisé par l'octroi d'une demi-part. M. le ministre le sait, le non-maintien de cette demi-part fiscal a conduit à imposer plus fortement des personnes seules et à faire entrer certaines d'entre elles dans l'impôt, les rendant aussi redevables d'impôts locaux. Pour autant, Mme la députée mesure l'engagement nécessaire pour les finances publiques. Elle croit que les différences de situation des veuves et veufs justifient l'application d'un plafond, incluant pensions et pensions de réversion. Alors qu'à compter de cette année, tous les veufs de plus de 74 ans dont le conjoint décédé était titulaire de la carte du combattant ont droit à une demi-part supplémentaire de quotient familial, l'octroi de cette mesure d'intérêt général contribuerait à participer à la justice fiscale et sociale du pays. Aussi, elle lui demande de bien vouloir réexaminer ce dossier et, en particulier, s'il ne pourrait pas être envisagé, afin d'en diminuer le coût, de rétablir cet avantage sous conditions.

Texte de la réponse

Jusqu'à l'imposition des revenus de 2008, les contribuables célibataires, divorcés, séparés ou veufs, sans enfant à charge, bénéficiaient d'une majoration d'une demi-part supplémentaire de quotient familial lorsqu'ils vivaient seuls et avaient un ou plusieurs enfants faisant l'objet d'une imposition distincte ou avaient eu un enfant décédé après l'âge de seize ans. Ces dispositions dérogatoires, instituées après la Seconde Guerre mondiale pour prendre en compte principalement la situation particulière des veuves de guerre, ne correspondaient plus à la situation actuelle. Le quotient familial a en effet pour objet de tenir compte des personnes à charge au sein du foyer dans l'évaluation des capacités contributives du contribuable. L'attribution de demi-part indépendamment du nombre de personnes effectivement à charge constitue une importante dérogation à ce principe et confère au bénéficiaire un avantage fiscal croissant avec son revenu. Le législateur a décidé de recentrer cet avantage fiscal, à compter de l'imposition des revenus de l'année 2009, au bénéfice des seuls contribuables célibataires, divorcés, séparés ou veufs vivant seuls et qui ont supporté seuls, à titre exclusif ou principal, la charge d'un enfant pendant au moins cinq années. À défaut de respecter ces conditions, les personnes seules bénéficient uniquement d'une part de quotient familial. Si le Gouvernement n'est pas favorable au rétablissement de la demi-part de quotient familial dans sa version antérieure à 2009, il est particulièrement sensible à la situation des ménages modestes et des classes moyennes et a porté, depuis 2017, de nombreuses mesures destinées à soutenir leur pouvoir d'achat. L'article 2 de la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 a diminué substantiellement l'impôt sur le revenu des classes moyennes à compter de l'imposition des revenus de l'année 2020 en baissant de 14 % à 11 % le taux de la première tranche imposable au barème progressif. Ainsi, en matière d'impôt sur le revenu, le seuil d'imposition des personnes seules commence, pour les revenus de 2022, à 15 991 € de revenu net imposable. Par ailleurs, les personnes âgées de plus de 65 ans bénéficient d'un abattement sur leur revenu imposable. Celui-ci s'élève à 2 620 € pour l'imposition des revenus de 2022 si leur revenu imposable n'excède pas 16 410 €, et à 1 310 € si leur revenu imposable est compris entre 16 410 € et 26 400 €. En outre, la taxe d'habitation (TH) sur la résidence principale ainsi que la contribution à l'audiovisuel public (CAP) ont été totalement supprimées. Au surplus, les pensionnés les plus modestes, parmi lesquels figurent les bénéficiaires de l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), sont exonérés de prélèvements sociaux sur les revenus de remplacement. Pour les pensionnés non exonérés, le taux de contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus de remplacement applicable aux contribuables dont le revenu fiscal de référence de l'avant-dernière année est compris entre 14 945 € et 23 193 € pour la première part de quotient familial a été rétabli à 6,6 % au lieu de 8,3 %. Enfin, le montant du minimum vieillesse et de l'ASPA a fait l'objet d'une revalorisation significative depuis 2018 et atteint 961 € par mois en 2023, soit 160 € par mois de plus qu'en 2018. Ces mesures, ciblées et d'ampleur significative, sont de nature à répondre aux préoccupations des contribuables les plus fragiles, notamment les veuves et les veufs, et sont plus équitables qu'une majoration de quotient familial.