16ème législature

Question N° 11910
de M. Jérôme Buisson (Rassemblement National - Ain )
Question écrite
Ministère interrogé > Sports, jeux Olympiques et Paralympiques
Ministère attributaire > Sports, jeux Olympiques et Paralympiques

Rubrique > sports

Titre > Appel d'offres pour la diffusion de la Ligue 1 pour la période 2024-2029

Question publiée au JO le : 03/10/2023 page : 8729
Réponse publiée au JO le : 09/01/2024 page : 282

Texte de la question

M. Jérôme Buisson alerte Mme la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques sur l'appel d'offres pour les droits de diffusion de la Ligue 1 pour la période 2024-2029. Canal+ a joué un rôle essentiel dans la diffusion du football français depuis 1984. Cependant, l'annonce récente selon laquelle Canal+ ne participera pas à l'appel d'offres des droits télévisuels de la Ligue 1 pour la période 2024-2029 met en péril le football français. Les raisons avancées par le président du Groupe Canal+, Maxime Saada, sont multiples, mais l'une des préoccupations majeures est l'imposition d'un prix plancher extrêmement élevé par la Ligue de football professionnel (LFP) car la Ligue, espérant obtenir 1 milliard d'euros par an, dont 800 millions pour la France, a imposé un minimum de 530 millions d'euros pour le lot contenant les trois meilleurs matchs et 270 millions pour les six autres. À la suite de l'échec Mediapro, on aurait pu espérer que la LFP ait des attentes plus réalistes concernant la valorisation des droits de diffusion de la Ligue 1. Cette tarification particulièrement élevée interroge quant à la viabilité économique pour les diffuseurs, en particulier dans un contexte où le modèle de diffusion du sport évolue rapidement avec l'émergence de nouveaux acteurs comme Amazon, déjà impliqué via Prime Video. Maxime Saada va même jusqu'à accuser la LFP de vouloir délibérément exclure Canal+ du processus d'appel d'offres pour favoriser Amazon. Cette accusation soulève des préoccupations concernant l'équité et la transparence du processus d'attribution des droits télévisuels. De plus, Maxime Saada suggère que la LFP pourrait chercher à contourner la contrainte juridique d'un appel d'offres pour négocier directement et de manière opaque. Face à cette situation complexe, les amateurs de football, les acteurs de l'industrie sportive et le public en général s'inquiètent pour l'avenir du football français et particulièrement pour la pérennité financière de la Ligue 1. C'est pourquoi il lui demande quelles actions le Gouvernement entend entreprendre pour garantir un processus d'appel d'offres transparent, équitable et dans l'intérêt du sport en France.

Texte de la réponse

Le cadre juridique en matière d'organisation du marché des droits d'exploitation audiovisuelle de compétitions sportives est, s'agissant des compétitions nationales domestiques de football telles que le Championnat de France de Ligue 1, principalement structuré autour de dispositions législatives encadrant les mécanismes de cession de ces droits : l'article L. 333-1, qui fixe la propriété des organisateurs de compétitions sur les droits de diffusion et la possibilité de céder ses droits aux sociétés sportives ; l'article L. 333-2, qui fixe les grands principes de commercialisation, par les ligues, des droits cédés aux sociétés sportives ; l'article L. 333-2-1, qui prévoit la faculté, pour les ligues professionnelles organisatrices de compétitions dont les droits d'exploitation audiovisuelle ont été cédés aux sociétés sportives, de créer une société commerciale chargée de la commercialisation et de la gestion de ces droits ; l'article L. 333-3, qui prévoit les principes de répartition du produit de ces droits. La Fédération française de football (FFF) est la seule fédération à avoir cédé aux clubs professionnels de sa discipline la propriété des droits de diffusion des compétitions qu'ils disputent. Ceux-ci sont commercialisés par la Ligue de football professionnel (LFP), dans le respect d'un cadre réglementaire strict défini par le code du sport, qui prévoit que : l'appel d'offres doit être ouvert à tous les éditeurs de services ; les droits doivent être proposés en lots distincts en tenant compte des caractéristiques des marchés sur lesquels ils sont proposés ; la constitution de lots trop importants en volume qui ne pourraient être acquis que par les opérateurs les plus puissants doit être empêchée ; l'indépendance des lots doit être réelle et le diffuseur ne doit pas être conduit à acquérir des lots couplés ; le choix du soumissionnaire retenu doit être effectué sur la base de critères objectifs préalablement définis dans le règlement d'appel à candidatures ; les contrats ne peuvent être conclus que pour une durée maximale de cinq ans ; le vendeur doit rejeter les offres globales / couplées ainsi que celles assorties d'un complément de prix. Ainsi, à la différence d'autres pays, les clauses de reconduction privilégiée, permettant au détenteur des droits issus du contrat expirant de prendre connaissance, à l'issue de l'appel à candidatures, de l'offre la mieux-disante et de surenchérir, ne sont pas autorisées. En outre, et pour toutes les procédures de mise sur le marché, les règles classiques du droit de la concurrence européen et français (notamment les dispositions des articles L. 420-1 à L. 420-7 du code de commerce) s'appliquent. C'est donc dans ce cadre normatif que la LFP s'efforce de construire un modèle économique de la commercialisation de ces droits viable, particulièrement de ceux de la Ligue 1, dont le produit bénéficie : à l'ensemble des clubs de football professionnel via les règles de répartition entre clubs de Ligue 1 et de reversement vers les clubs de Ligue 2 ; au football amateur via le mécanisme de solidarité intégré dans la convention entre la LFP et la FFF ; au sport amateur via la taxe Buffet dont la LFP constitue le premier contributeur (37 M€ pour l'année 2022, soit 68 % du rendement brut de la taxe) ; au tissu économique des collectivités locales concernées, de façon directe en soutenant certains secteurs d'activité (gestion des équipements sportifs, tourisme et hôtellerie), plus indirectement en soulageant les finances publiques locales d'une partie du soutien accordé aux clubs. Aux termes de l'appel à candidatures lancé le 12 septembre 2023 pour l'attribution des droits d'exploitation audiovisuelle de la Ligue 1 pour la période 2024-2029, la société LFP Media, filiale créée conformément aux dispositions de l'article L. 333-2-1 précité, a fait savoir, le 17 octobre 2023, qu'« après avoir reçu plusieurs offres qualitatives et dispositifs de garantie financière sur l'ensemble des lots […], LFP Media indique qu'aucun des cinq lots n'a été attribué ». Les informations dont disposent les services du ministère des sports font état de discussions actives entre la société LFP Media et les principaux éditeurs de services de télévision payante et plateformes de distribution de contenus audiovisuels sur les conditions financières et éditoriales de mise à disposition du public des droits de la Ligue 1 à compter d'août 2024. Il convient à cet égard de rappeler que la mise en œuvre des contrats de cession de droits d'exploitation audiovisuelle de compétitions sportives relève de relations de droit privé entre des personnes morales, dans lesquelles l'État n'a pas vocation à s'immiscer et dont les conséquences économiques immédiates doivent être supportées par les cocontractants. Ce point apparait le corollaire immédiat de la volonté affichée par le mouvement sportif de disposer d'une forme d'autonomie dans la gestion de ses intérêts moraux et patrimoniaux, dans les limites des délégations de service public confiées par l'État aux fédérations sportives et des subdélégations qui lient ces dernières aux ligues professionnelles qu'elles ont éventuellement créées.