Rubrique > mer et littoral
Titre > Sincérité démocratique des concessions d'utilisation du domaine public maritime
Mme Christine Engrand interroge M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la sincérité des décisions de concessions d'utilisation du domaine public maritime prises en l'absence de délibération du conseil municipal. Pour l'heure, l'article R. 2124-6 du code général de la propriété des personnes publiques dispose que « le projet (de concessions d'utilisation du domaine public maritime) est soumis pour avis aux communes et établissements publics de coopération intercommunale intéressés » et que « l'absence de réponse dans le délai de deux mois vaut avis favorable ». Or cette rédaction ne laisse pas présager de la qualité des personnes de la commune auxquelles est notifiée la soumission, par le préfet, d'un avis à propos d'un projet de concession d'utilisation du domaine public. Partant, le préfet peut se contenter de notifier ce projet au maire de la commune, qui peut alors se réserver le droit de communiquer ou non la demande d'avis du préfet aux autres membres de son conseil municipal. Dans cette hypothèse, un édile peut décider de l'avis favorable de la collectivité à un projet de concession d'utilisation du domaine public maritime, sans consulter les autres représentants communaux, fussent-ils d'opposition, en ne transmettant pas l'avis de sa commune au préfet. Ce pouvoir discrétionnaire induit par la rédaction de cet article est d'autant plus problématique qu'en cas de compilation de l'avis des communes sollicitées par la préfecture, il permet de déguiser une décision unilatérale en acte consensuel aux yeux des concitoyens partie à l'enquête. En l'occurrence, la décision de concéder l'utilisation du domaine public maritime est, au titre du b) du 2) de l'article L. 181-28-1 du code de l'environnement, un document nécessaire à l'obtention d'une autorisation environnementale pour certains projets ayant une incidence environnementale, notamment les installations de production d'énergies renouvelables en mer, telles que les éoliennes implantées en mer. Il en résulte qu'un maire a aujourd'hui le pouvoir d'influencer la décision du préfet et l'opinion de la population concernant l'effective mise en œuvre d'un projet éolien en mer en refusant de communiquer un avis à ce sujet. Cette possibilité laissée au maire, contraire aux principes démocratiques de la République, attente également à toutes les exigences éthiques et déontologiques en jetant en pâture les édiles aux tentations et aux pressions exercées à leur encontre pour l'obtention d'un avis favorable à un projet. Cette situation est d'autant plus préjudiciable pour des projets aux contours discutables tels que le projet de parc éolien au large du littoral dunkerquois. Pour rappel, par avis délibéré n° 2023-49 du 21 septembre 2023, l'Autorité environnementale demande « de justifier les raisons ayant conduit l'État à retenir la zone, objet de l'appel d'offres (AO), au sein d'une aire marine protégée ». En outre, sur la dizaine de communes interrogées par la préfecture, les trois communes ayant procédé à une délibération ayant donné lieu à un vote en conseil municipal ont rejeté le projet. À cet égard, elle lui demande l'interprétation précise du Gouvernement du passage précité de l'article R. 2124-6 du code général de la propriété des personnes publiques, notamment en déclinant la liste des interlocuteurs du préfet recouverts par la notion de « commune » et, le cas échéant, en précisant les devoirs de publicité du maire s'il était le seul interlocuteur, auquel cas elle lui demande également si une rédaction mentionnant explicitement le conseil municipal en tant que partie à l'avis sollicité par le préfet est envisageable et sinon, pourquoi.