Prévention des risques de noyades
Question de :
Mme Agnès Carel
Seine-Maritime (7e circonscription) - Horizons et apparentés
Mme Agnès Carel appelle l'attention de Mme la ministre des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques sur le douloureux problème des noyades en France. Selon les chiffres de l'enquête « Noyades », en 2021, 1 486 noyades ont été recensées en France, dont 400 mortelles. Les différentes annonces de cet été ne peuvent que continuer d'alarmer sur ce sujet. Les fortes chaleurs des derniers mois notamment ont conduit à multiplier les baignades. Or les enfants sont malheureusement très concernés par ces accidents dramatiques. Les fermetures des piscines pendant les périodes de confinement ont suspendu les cours de natation organisés pendant les temps scolaires et le retard dans l'apprentissage de la natation chez les plus jeunes n'aurait pas pu être rattrapé. En effet, un élève sur deux en 6e ne saurait pas nager ou n'aurait pas acquis les bases du « savoir nager ». Ce constat est très inquiétant. De plus, la hausse des prix de l'énergie ces dernières semaines (et donc du coût de fonctionnement des piscines) et les conséquences qu'elle entraîne sur la fermeture de certaines piscines ou sur la restriction des heures d'ouverture ne peut qu'aggraver la situation. Pour remédier aux incidents, différentes initiatives sont mises en place par des communes pour renforcer les surveillances des points d'eau et piscines publics et ont recours à de nouveaux dispositifs. En effet, des solutions plus techniques existent et ont fait leurs preuves. Ces technologies d'intelligence artificielle développées en France et normalisées permettent d'alerter le personnel de surveillance dès les premières secondes d'une possible noyade. Or on sait que c'est dans les 20 premières secondes que tout se joue. Elles contribuent à sauver des vies. Le coût d'une telle solution représente moins de 2 % du budget de construction des piscines. Enfin, une enquête conduite par différentes associations professionnelles telles que l'Andes, l'Andins et Apporta aurait hélas révélé une pénurie de maîtres-nageurs sauveteurs. Il est urgent de s'inquiéter de ces problèmes de recrutement. C'est pourquoi Mme la députée demande à Mme la ministre son avis sur ces technologies et quelles mesures elle entend prendre pour les généraliser aux nouvelles constructions ou dans le cadre de rénovations lourdes. Elle lui demande également pour quelles raisons on constate une pénurie de maîtres-nageurs et si des mesures sont envisagées pour sensibiliser des jeunes notamment à la formation pour exercer cette profession. Elle lui demande plus généralement quelles mesures elle entend prendre pour développer la pratique de l'apprentissage de la natation chez les plus jeunes dans un contexte certes compliqué. Enfin, elle souhaiterait savoir si, en lien avec d'autres ministères, elle entend mener une campagne de sensibilisation aux risques des baignades en piscines et points d'eau publics (étangs, mer, lacs, etc.) mais aussi en piscines privées.
Réponse publiée le 27 décembre 2022
L'enquête noyade de Santé publique France 2021 montre que sur la période du 1er juin au 30 septembre, sur 1 480 noyades accidentelles, les noyades en piscine tout type confondu (publiques et privées) représentaient 26 % des noyades (soit 385) et 15 % des décès (soit 59). Les jeunes enfants se noient davantage en piscine (publiques ou privées) : 70 % des noyades (soit 231) chez les enfants âgés de moins de 6 ans ont eu lieu dans une piscine familiale dont 8 % (soit 18) ont été suivies de décès. Les plus âgés se noient plutôt en mer : 70 % des noyades (soit 263) pour les plus de 65 ans, et ces noyades sont plus souvent suivies de décès, 37 % (soit 96 décès), que pour les autres tranches d'âge. 55 noyades ont été recensées dans les piscines publiques ou privées payantes contre 633 en mer dans la bande des 300 m qui reste le lieu prépondérant des noyades. Le ministère des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques s'implique sur la prévention des « noyades » tout particulièrement depuis l'enquête noyade de Santé publique France de 2018 et lance chaque année une campagne incitant à se baigner dans les zones surveillées. La campagne cible les parents des enfants de moins de 6 ans et les plus de 65 ans, tranches d'âge les plus concernées par les noyades selon les deux dernières enquêtes. La qualité de la surveillance, permanente, constante et active des piscines et des zones de baignade d'accès payant doit rester une priorité. Toutefois, afin de prendre en compte les difficultés de recrutement de personnels qualifiés pour surveiller ces baignades, tout en garantissant la sécurité des pratiquants, des travaux sont actuellement en cours pour simplifier le droit existant pour l'organisation de leur surveillance. Afin de déterminer les solutions à apporter à cette situation de tension de l'emploi, la ministre des sports et des jeux olympiques et paralympiques a confié à la direction des sports l'organisation des « états généraux de l'encadrement et de la surveillance dans la filière aquatique » qui auront lieu en janvier prochain. En amont une phase d'échanges préalables avec les organisations professionnelles d'employeurs, des collectivités et les organisations professionnelles de salariés s'est ouverte afin de formaliser le diagnostic sur les causes de cette pénurie ainsi que des préconisations. Après un partage de ces éléments, les états généraux permettront de définir les évolutions règlementaires pertinentes que le ministère pourrait entériner à court terme pour solutionner les difficultés d'organisation de la surveillance des activités aquatiques dans les baignades d'accès payant tout en maintenant l'objectif essentiel d'accès le plus large possible aux apprentissages encadrés de la natation, en particulier dans le temps scolaire. Ces états généraux permettront aussi de définir des axes de communication et de promotion du métier de MNS visant rapidement à en améliorer l'image et l'attractivité. Ces états généraux seront également un lieu de partage et de valorisation des bonnes pratiques managériales permettant de construire et de proposer des parcours professionnalisant suscitant l'adhésion et la fidélisation des candidats potentiels ou professionnels en exercice en répondant au plus près à leurs aspirations qu'elles soient fonctionnelles, organisationnelles ou statutaires. Ce projet tire les conséquences de l'avis favorable émis le 13 juin 2018 par le Conseil national d'évaluation des normes relatif à la surveillance, en autonomie, des baignades d'accès payant par les titulaires du brevet national de sécurité et de sauvetage aquatique (BNSSA). Cet avis avait été produit dans le cadre du rapport LAMBERT-BOULARD de 2018 relatif « à la simplification des normes applicables aux collectivités territoriales ». Cette modification vise également à dégager des ressources pour l'apprentissage de la natation en permettant aux maîtres-nageurs sauveteurs de se consacrer davantage à cette activité, dans un contexte où ce métier est considéré comme étant en tension. Enfin, le ministère chargé des sports participe avec l'Association Française de Normalisation (AFNOR) à l'élaboration d'une norme AFNOR « Piscines à usage public – Exigences de surveillance (des baignades) – Organisation et mise en œuvre ». Cette norme volontaire spécifie les exigences et recommandations concernant l'organisation de la surveillance des baignades et de leurs abords immédiats par du personnel habilité ainsi que la manière dont cette surveillance doit être effectuée. Il est actuellement précisé dans cette norme volontaire que en cas de risques particuliers, il peut être nécessaire de prendre des mesures temporaires ou définitives permettant d'améliorer la sécurité des usagers, comme l'ajout d'équipements tels que : des miroirs pour voir des angles morts ; un système de vidéosurveillance ; un système intelligent de vision par ordinateur pour la détection automatique des noyades. Cette norme AFNOR devrait être publiée en 2022. Les systèmes de détection automatique des noyades, tel que le système « Poséidon » par exemple, consistent en un système de caméras sous-marines et/ou à l'extérieur du bassin auquel sont associés des algorithmes mathématiques qui alertent les maîtres-nageurs, dès les premières secondes, lorsqu'un nageur réagit comme un noyé (il est plus ou moins immobile, sans trajectoire, au fond du bassin depuis au moins dix secondes). Bien que ces systèmes n'offrent pas une efficacité à 100 % (exemple de limitation : détection impossible pour les profondeurs inférieures à 60 cm), les évolutions technologiques rendues possible grâce à l'intelligence artificielle ouvrent de nombreuses perspectives (exemples de développements récents : comptage en temps réel des personnes présentes dans les bassins, mesure de la distance entre les baigneurs). Cependant, ces systèmes de vision par ordinateur ne peuvent pas sauver une personne de la noyage, le sauvetage d'un noyé relevant nécessairement d'une intervention humaine. Ce type de système ne peut donc venir qu'en complément d'une surveillance humaine active. Il arrive même que certains enfants déclenchent volontairement le système de détection en restant immobile le temps nécessaire, une fois qu'ils ont compris son fonctionnement. L'installation et l'utilisation des systèmes de vision par ordinateur ne peuvent donc être prétextes à diminuer les effectifs affectés à la surveillance des piscines et ne doivent pas engendrer une baisse de la vigilance des surveillants de baignades. C'est l'une des raisons pour laquelle le plan d'urgence « maitres nageurs sauveteurs » est mis en œuvre.
Auteur : Mme Agnès Carel
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sécurité des biens et des personnes
Ministère interrogé : Sports, jeux Olympiques et Paralympiques
Ministère répondant : Sports, jeux Olympiques et Paralympiques
Dates :
Question publiée le 20 septembre 2022
Réponse publiée le 27 décembre 2022