Question de : Mme Béatrice Piron
Yvelines (3e circonscription) - Renaissance

Mme Béatrice Piron appelle l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la situation critique au Soudan. Depuis le début du conflit armé interne au Soudan le 15 avril 2023, l'ONU estime que plus de 10 000 femmes, hommes et enfants ont été tués et 7,3 millions de personnes ont été déplacées. Les partis impliqués sont en train de provoquer une situation humanitaire jugée « inimaginable » par l'Agence des Nations unies pour les réfugiés (HCR) tant au niveau de la sécurité et des droits de l'homme qu'au niveau des conditions sanitaires. Ces inquiétudes grandissent suite à l'attaque perpétrée contre un convoi humanitaire du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) sur l'accès pour le personnel humanitaire au Soudan. Ce type d'action limite la capacité à venir en aide aux populations locales pour qui les conséquences du conflit actuel s'ajoutent à celles déjà lourdes des conflits récents. La situation pour les femmes sur le territoire soudanais s'aggrave également. Elles sont nombreuses à devoir se déplacer, parfois enceintes, mettant leur santé et celle de leurs enfants en danger. Ces mouvements les exposent aussi aux violences sexistes et sexuelles, alors même que plusieurs organismes dénoncent l'utilisation du viol comme arme de guerre et que l'Organisation mondiale de la santé (OMS) recense, depuis le début du conflit, des victimes de viols âgées de 4 à plus de 60 ans. En 2023, le gouvernement français a dévoilé une nouvelle stratégie humanitaire qui met l'accent sur la prévention de l'instrumentalisation de l'accès humanitaire par les belligérants et promeut une « diplomatie féministe ». Par ailleurs, la France s'est toujours positionnée comme un acteur important dans la défense des droits de l'homme et doit à ce titre rester engagée en faveur d'un retour à une paix durable au Soudan et d'un arrêt des combats. Elle souhaite ainsi connaître les actions entreprises par le ministère afin d'endiguer l'aggravation de la situation pour les populations locales et d'aider à la désescalade entre les partis impliqués.

Réponse publiée le 26 mars 2024

Le ministère de l'Europe et des affaires étrangères est pleinement mobilisé pour répondre à la crise humanitaire provoquée par le conflit au Soudan. En 2023, la France a apporté une aide de 55 millions d'euros afin d'appuyer les populations au Soudan et les réfugiés soudanais dans les pays voisins. Cet engagement s'ajoute à celui de notre pays dans le cadre européen, l'Union européenne (UE) et ses États membres ayant financé un tiers de la réponse humanitaire internationale, à hauteur de 500 millions d'euros, au Soudan et dans la région. La mobilisation française se poursuit en 2024. La France, l'Allemagne et l'UE coprésideront une conférence humanitaire internationale pour le Soudan et ses voisins, qui se tiendra à Paris le 15 avril 2024, un an après le déclenchement des affrontements, pour mobiliser les financements nécessaires à la réponse humanitaire internationale et pour obtenir des belligérants un accès humanitaire libre, sûr et sans entrave à l'ensemble des territoires affectés par le conflit. La France appelle les parties à respecter leurs obligations au regard du droit international humanitaire et des droits de l'Homme. Elle regrette que les engagements pris par les belligérants sur la protection des civils et l'accès humanitaire ne soient pas tenus, malgré la création d'un forum humanitaire les rassemblant sous la direction des Nations unies. La France a condamné avec la plus grande fermeté l'attaque contre un convoi du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), survenue à Khartoum le 10 décembre 2023, qui a fait deux morts et sept blessés, comme elle condamne la poursuite du conflit en dépit de tous les appels internationaux et régionaux pour une cessation des hostilités. La France intègre les enjeux liés au genre à sa réponse humanitaire à la crise soudanise. Dans le cadre de sa présidence du Conseil de sécurité des Nations unies, elle a initié une déclaration des États membres signataires des engagements partagés du programme pour les femmes, la paix et la sécurité du Conseil de sécurité, le 29 janvier 2024, afin de condamner fermement toutes les formes de violences basées sur le genre perpétrées au Soudan, en particulier les violences sexuelles parfois employées comme une tactique de guerre. La France a réitéré l'importance de combattre l'impunité et de tenir pour responsables les auteurs de ces violations au regard des droits de l'Homme et du droit international humanitaire, pouvant constituer des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Elle soutient ainsi les travaux de la Cour pénale internationale (CPI) et de la mission internationale indépendante d'établissement des faits pour le Soudan créée par le Conseil des droits de l'Homme des Nations unies en octobre 2023. La France a contribué à l'adoption, le 9 octobre 2023 par l'UE, d'un nouveau régime de mesures restrictives visant à dissuader la conduite d'activités compromettant la stabilité et la transition politique au Soudan, ciblant notamment les personnes, entités et organismes qui participent à l'organisation, la direction ou la commission de violences sexuelles et sexistes. Six entités affiliées aux belligérants ont été sanctionnées dans le cadre de ce régime, le 22 janvier 2024. Au Soudan, la France a financé en 2023, à hauteur d'1,6 million d'euros, deux projets visant à fournir des services afin de lutter contre les violences basées sur le genre pour les populations déplacées via le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) et pour les populations de Wad Madani et Kassala via l'ONG internationale Penal Reform International. La France a également financé, à hauteur de 800 000 euros, un projet porté par Handicap International et l'ONG soudanaise Global Aid Hand, visant à apporter un appui à la réhabilitation physique, à la santé mentale et aux besoins psychosociaux des personnes victimes du conflit, dont plus de 60 % de femmes, dans les États de Gezirah et de Gedaref. Les programmes d'assistance aux populations soudanaises dans les pays voisins, menés par les organisations humanitaires et financés par la France, contribuent également à ces efforts.  La France œuvre, avec ses partenaires, à favoriser davantage de coordination entre les initiatives de paix internationales et régionales et à accompagner la mobilisation des civils soudanais afin de parvenir à un cessez-le-feu et à une résolution politique du conflit. Le 21 septembre 2023, en marge de la semaine de haut-niveau de l'Assemblée générale des Nations unies à New York, la France et l'Allemagne ont rassemblé l'ensemble des États et des organisations impliqués dans les initiatives de paix dédiées au Soudan afin de favoriser une meilleure coordination des efforts internationaux. Une réunion de suivi, également organisée à New York, s'est tenue le 11 décembre 2023. La France apporte également son soutien à l'action de l'Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations unies pour le Soudan. Ce dernier a été reçu à Paris, le 22 janvier 2024, soit quelques semaines après sa nomination. L'UE, à l'initiative de la France et de l'Allemagne, a organisé trois consultations avec des représentants de l'opposition et de la société civile soudanaises les 22 juin et 27 juillet 2023 à Bruxelles, ainsi que le 19 octobre 2023 au Caire. Ce conflit entre militaires ne doit pas éclipser l'existence d'une classe politique et d'une société civile soudanaises diverses qui aspirent au retour à la paix. La France est attentive à ce que leurs aspirations ne soient pas laissées pour compte.

Données clés

Auteur : Mme Béatrice Piron

Type de question : Question écrite

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Europe et affaires étrangères

Ministère répondant : Europe et affaires étrangères

Dates :
Question publiée le 6 février 2024
Réponse publiée le 26 mars 2024

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