Question de : M. Philippe Juvin
Hauts-de-Seine (3e circonscription) - Les Républicains

M. Philippe Juvin attire l'attention de Mme la Première ministre sur la prise en charge de la drépanocytose en France. Alors que le Président Emmanuel Macron a fait de la drépanocytose, une des trois maladies prioritaires pour son second mandat, comme souligné dans son programme présidentiel, les associations de patients espèrent que cette annonce sera rapidement traduite en actions concrètes. En effet, répandue sur l'ensemble du territoire avec une prévalence accrue en Île-de-France et dans les territoires d'outre-mer, la drépanocytose est la maladie rare génétique la plus fréquente en France, avec environ 30 000 patients diagnostiqués en 2022. Pour rappel, la drépanocytose affecte l'hémoglobine des globules rouges, occasionnant une anémie hémolytique, des crises douloureuses et un risque accru d'infections. Ces atteintes sont associées à une diminution de l'espérance de vie qui demeure de 30 ans inferieure à celle de la population générale dans les pays développés, à une altération de la qualité de vie et un impact sur le parcours scolaire et socioprofessionnel important. En application de l'engagement pris par le Président de la République dans son programme, il est urgent que soit mise en place une stratégie nationale de lutte contre la drépanocytose, qui adoptera une approche globale, en incluant des mesures visant à mieux prévenir et sensibiliser à la drépanocytose, à améliorer le parcours de soins (sur le plan physique et mental), à faciliter la formation, l'accès à l'emploi des patients et à assurer l'égalité d'accès aux soins sur l'ensemble du territoire français. Cette stratégie devra être pilotée par un délégué interministériel et être assortie d'un financement à la hauteur des besoins. Dans ce contexte, M. le député demande à Mme la Première ministre de confirmer que son Gouvernement travaille à l'élaboration de cette stratégie et qu'il nommera prochainement un délégué interministériel à cet effet. En outre, il souhaiterait que le Gouvernement engage, sans tarder, des consultations auprès des différentes parties prenantes dont les associations de patients, en vue de l'élaboration de cette stratégie globale.

Réponse publiée le 13 décembre 2022

Pourtant relativement peu connue du grand public, la drépanocytose est la maladie génétique héréditaire la plus répandue dans le monde. Touchant en moyenne une naissance sur 3 000 en France, elle est considérée comme une maladie rare, et est particulièrement fréquente dans les populations d'origine antillaise, africaine et méditerranéenne, mais également indienne et sud-américaine (https://www.orpha.net/data/patho/Pub/fr/Drepanocytose-FRfrPub125v01.pdf). Même si les traitements ont permis d'augmenter significativement l'espérance de vie des patients affectés (supérieure à 40 ans aujourd'hui alors qu'elle était inférieure à 20 ans avant les années 1980), les thérapeutiques disponibles restent encore limitées. Il est donc primordial de renforcer les mesures préventives, et de continuer la recherche sur la drépanocytose. La drépanocytose est une maladie du sang due à une anomalie de l'hémoglobine, protéine contenue dans les globules rouges et servant à approvisionner le corps en oxygène. Quand un patient est atteint de drépanocytose, l'hémoglobine A, celle dite « normale » est mutée en hémoglobine S. Cela provoque les principales manifestations et symptômes de la maladie comme l'anémie chronique, des douleurs liées à des crises vaso-occlusives pouvant toucher plusieurs organes et se manifestant par des douleurs vives et brutales, une moindre résistance à certaines infections et complications à long terme (atteintes rénales, auditives et visuelles, pulmonaires, des calculs rénaux, des ulcères dans les jambes…). Certaines conditions peuvent favoriser le déclenchement de la drépanocytose comme le stress, le froid, la déshydratation, les efforts physiques ou encore l'altitude. Mêmes si les symptômes de la maladie sont variables et dépendent non seulement de l'âge, mais aussi de la sévérité de la drépanocytose, cette maladie altère la qualité de vie des patients tout en pouvant entrainer de l'isolement, de la stigmatisation ainsi que de l'exclusion sociale. La prise en charge médicale de la drépanocytose vise à réduire la survenue et la sévérité de certains symptômes via un suivi médical régulier. Actuellement, le seul traitement curateur de la drépanocytose est la greffe de moelle osseuse qui permet de remplacer la moelle produisant des globules rouges falciformes par une moelle saine fabriquant une hémoglobine A. Toutefois, elle nécessite une prise en charge très lourde, et peut se faire uniquement avec des donneurs intrafamiliaux compatibles. La prise en charge globale de la drépanocytose s'inscrit dans un réseau maladies rares présent sur tout le territoire français. Des centres de référence experts, labellisés lors du 1er plan national maladies rares (PNMR1) de 2005, prennent en charge des patients atteints de syndromes drépanocytaires majeurs (SDM). Ces centres référents maladies rares (référence et compétence) font partie de filières de santé maladies rares (FSMR). La filière de santé maladies rares MCGRE (maladies constitutionnelles rares du globule rouge et de l'érythropoïèse), créée en 2014 et coordonnée par le Pr. Frédéric Galacteros, regroupe les centres de référence et de compétence maladies rares des SDM, thalassémies et autres pathologies rares du globule rouge et de l'érythropoïèse. Elle a été renouvelée en juin 2019. Quant aux centres de référence et de compétence, une campagne de relabellisation est en cours. Dans une stratégie d'action partagée et unifiée, la FSMR MCGRE travaille étroitement avec des structures partenaires impliquées dans le parcours de soins de la drépanocytose : le centre d'Information et de dépistage de la drépanocytose (CIDD), l'établissement français du sang (EFS), vivre adulte avec la drépanocytose (EVAD) ainsi que le réseau francilien de soin ville-hôpital des enfants drépanocytaires (RoFSED). En outre, la FSMR, conjointement à ses centres de référence maladies rares, déploient plusieurs formations sur la drépanocytose et les autres pathologies du globule rouge, accessibles en formation initiale ou continue à destination de professionnels de santé, ou des patients experts. Par ailleurs, pour améliorer les prises en charge, les cartes d'urgence ont été valorisées par la FSMR MCGRE et leur distribution aux patients a été encouragée. Ainsi, depuis 2020, ce sont plus de 7 000 cartes d'urgence drépanocytose qui ont été transmises aux patients. Plusieurs protocoles nationaux de diagnostic et de soins « drépanocytose » sont en cours d'actualisation. Enfin, la FSMR MCGRE propose à ce jour 15 programmes d'éducation thérapeutique du patient spécifiquement dédiés à la drépanocytose ou incluant la drépanocytose. Des perspectives favorables sont attendues dans les prochaines années par rapport à l'amélioration de la prévention de la drépanocytose, et même dans sa guérison potentielle. Actuellement, le dépistage néonatal se fait selon un ciblage populationnel : il concerne actuellement tous les nouveau-nés des départements d'Outre-mer et de France métropolitaine considérés comme à risque de développer la maladie (risque évalué principalement sur l'origine géographique des parents). En 2021, sur 342 057 enfants testés pour la drépanocytose, 588 ont été pris en charge pour un syndrome drépanocytaire majeur. Fin 2022, la Haute autorité de santé s'est prononcée sur la mise en place d'un dépistage néonatal généralisé de la maladie drépanocytose. La généralisation du dépistage néonatal sur la drépanocytose a été annoncée par le ministre François Braun, et permettra ainsi de prévenir et d'accompagner au mieux les patients, tout en s'assurant que des enfants malades ne soient pas dépistés par erreur de ciblage. Bien que la situation des malades drépanocytaires se soit considérablement améliorée en France, surtout grâce au dépistage néonatal et à la prise en charge précoce de la maladie, les traitements disponibles restent limités. La recherche s'efforce donc de découvrir de nouvelles thérapeutiques. La thérapie génique, consistant à modifier le gène programmant la protéine de l'hémoglobine, est une piste en cours d'exploration qui pourrait permettre un traitement permanent de la drépanocytose. En ce sens, le plan France médecine génomique 2025 (PFMG 2025) doit aussi permettre des avancées sur la maladie de la drépanocytose et ouvrir la voie à de meilleures prises en charge de cette pathologie et de sa recherche en développant une médecine de précision avec des thérapies ciblées.

Données clés

Auteur : M. Philippe Juvin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Maladies

Ministère interrogé : Première ministre

Ministère répondant : Santé et prévention

Dates :
Question publiée le 4 octobre 2022
Réponse publiée le 13 décembre 2022

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