Projet d'enfouissement des déchets radioactifs sur le site Cigéo
Question de :
Mme Julie Laernoes
Loire-Atlantique (4e circonscription) - Écologiste - NUPES
Mme Julie Laernoes interroge Mme la ministre de la transition énergétique sur le projet d'enfouissement des déchets radioactifs dits de haute activité (HA) et de moyenne activité à vie longue (MA-VL) sur le site Cigéo de Bure (Meuse). Il s'agit là des déchets radioactifs les plus dangereux : ils ne représentent que 3,2 % de l'ensemble des déchets, mais concentrent à eux seuls 99,9 % de la radioactivité totale. Malgré une déclaration d'utilité publique le 7 juillet 2022 et son classement parmi les « Opérations d'intérêt national », ce projet de galeries de 270 kilomètres à 500 mètres de profondeur soulève toujours de véritables inquiétudes et doutes quant à sa faisabilité technique et sa sûreté. Stabilité de la roche, risques d'incendies et d'inondation, dangers pour la nappe phréatique, les incertitudes sont trop nombreuses pour continuer cette fuite en avant. Les échecs et incidents de projets similaires d'enfouissement en profondeur tels que le WIPP aux États-Unis d'Amérique, ASSE II en Allemagne ou encore StocaMine en Alsace doivent l'alerter et l'amener à chercher d'autres pistes. Pourtant, le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR) pour 2022-2026 ne prévoit pas d'autres solutions que l'enfouissement profond pour les déchets HA et MA-VL. Elle lui demande pourquoi les solutions de stockages subsurfaçique des déchets nucléaires à faible profondeur n'est pas étudié, piste pourtant prévue par la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs.
Réponse publiée le 22 novembre 2022
L'article 3 de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs indique que « Pour assurer, dans le respect des principes énoncés à l'article L. 542-1 du code de l'environnement, la gestion des déchets radioactifs à vie longue de haute ou de moyenne activité, les recherches et études relatives à ces déchets sont poursuivies selon les trois axes complémentaires suivants :« 1° La séparation et la transmutation des éléments radioactifs à vie longue. Les études et recherches correspondantes sont conduites […] afin de disposer, en 2012, d'une évaluation des perspectives industrielles de ces filières et de mettre en exploitation un prototype d'installation avant le 31 décembre 2020 ; « 2° Le stockage réversible en couche géologique profonde. Les études et recherches correspondantes sont conduites en vue de choisir un site et de concevoir un centre de stockage de sorte que, au vu des résultats des études conduites, la demande de son autorisation prévue à l'article L. 542-10-1 du code de l'environnement puisse être instruite en 2018 et, sous réserve de cette autorisation, le centre mis en exploitation en 2025 ; « 3° L'entreposage. Les études et les recherches correspondantes sont conduites en vue, au plus tard en 2015, de créer de nouvelles installations d'entreposage ou de modifier des installations existantes, pour répondre aux besoins, notamment en termes de capacité et de durée, recensés par le plan prévu à l'article L. 542-1-2 du code de l'environnement. » L'article L. 542-10-1 du code de l'environnement prévoit en outre que « […] Le caractère réversible d'un stockage en couche géologique profonde doit être assuré dans le respect de la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 593-1. Des revues de la mise en œuvre du principe de réversibilité dans un stockage en couche géologique profonde sont organisées au moins tous les cinq ans, en cohérence avec les réexamens périodiques prévus à l'article L. 593-18. […] lors de l'examen de la demande d'autorisation de création, la sûreté du centre est appréciée au regard des différentes étapes de sa gestion, y compris sa fermeture définitive. Seule une loi peut autoriser celle-ci. L'autorisation fixe la durée minimale pendant laquelle, à titre de précaution, la réversibilité du stockage doit être assurée. Cette durée ne peut être inférieure à cent ans. L'autorisation de création du centre est délivrée par décret en Conseil d'État, pris selon les modalités définies à l'article L. 593-8, sous réserve que le projet respecte les conditions fixées au présent article […] » L'article L. 542-10-1 du code de l'environnement prévoit également que « L'exploitation du centre débute par une phase industrielle pilote permettant de conforter le caractère réversible et la démonstration de sûreté de l'installation, notamment par un programme d'essais in situ. Tous les colis de déchets doivent rester aisément récupérables durant cette phase. La phase industrielle pilote comprend des essais de récupération de colis de déchets. » Les travaux de préparation de la cinquième édition du plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs ont permis une association très large du public et des parties prenantes par rapport aux précédentes éditions. Le projet de plan mis à la consultation du public le 13 mai 2022 indique que « au regard de l'état des lieux des alternatives ou compléments au stockage en couche géologique profonde, la poursuite de ces recherches doit s'inscrire dans un cadre rénové et selon une dynamique à construire. Le retour d'expérience montre en effet qu'en dehors des technologies nucléaires (réacteurs à neutrons rapides, réacteurs à sels fondus) […], il n'existe pas à ce jour d'alternative crédible. […] Une instance dédiée sera mise en place : le comité d'expertise et de dialogue sur les alternatives au stockage en couche géologique profonde. » Le dossier de clarification des controverses techniques élaboré par la Commission nationale du débat public dans le cadre du débat public de 2019 sur le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR) a en effet réaffirmé le choix de 2006 : « En 2006, le stockage géologique a été choisi par le Parlement comme solution de référence pour la gestion des déchets de haute et moyenne activité à vie longue. L'entreposage de longue durée et la séparation-transmutation, qui constituaient jusqu'alors les deux volets d'une alternative au stockage, ont continué à être étudiés, mais principalement comme compléments à un stockage. Les arguments motivant la décision de 2006 n'étaient pas principalement liés à d'éventuelles difficultés techniques de l'entreposage. Les améliorations récentes obtenues grâce à la recherche sur ce sujet n'ont ainsi pas significativement changé la donne. » Enfin, un appel à projets, lancé dans le cadre du plan France relance et de France 2030 et opéré par Bpifrance en lien avec l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), publié en juillet 2021, vise, d'une part, à poursuivre les travaux de recherche menés autour des déchets radioactifs en vue d'améliorer et d'optimiser les solutions pour leur gestion et, d'autre part, à faire suite aux conclusions du débat public sur le PNGMDR en poursuivant les efforts de recherche sur la thématique des alternatives au stockage géologique profond.
Auteur : Mme Julie Laernoes
Type de question : Question écrite
Rubrique : Déchets
Ministère interrogé : Transition énergétique
Ministère répondant : Transition énergétique
Dates :
Question publiée le 11 octobre 2022
Réponse publiée le 22 novembre 2022