Répartition et délestage de la consommation de gaz naturel et de l'électricité
Question de :
M. Paul Molac
Morbihan (4e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires
M. Paul Molac attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur l'organisation de la répartition et du délestage de la consommation de gaz naturel et de l'électricité dans la perspective du passage de l'hiver 2022-2023. Le Gouvernement prévoit de faire application des dispositions de l'article L. 143-1 du code de l'énergie et ainsi d'instituer, par décret en Conseil des ministres, un dispositif de contrôle et répartition du gaz naturel. Ce décret prévoira, pendant les mois de l'hiver 2022-2023, de limiter la consommation de gaz à chaque point de comptage, à hauteur de la consommation de référence observée les années précédentes réduite d'un coefficient de baisse qui sera défini ultérieurement par arrêté ministériel. Seront exclues du dispositif les consommations domestiques, les consommations liées au chauffage des logements et d'un certain nombre d'établissements d'intérêt général, ainsi que les consommations pour la production d'électricité par le biais d'une centrale électrique ou d'une cogénération. Il est alors possible de trouver sur des listes départementales arrêtées par les préfets des entreprises non prioritaires qui produisent du gaz, telles que les méthaniseurs. En effet, des exploitations agricoles qui fournissent parfois dix fois plus d'énergie qu'elles en consomment peuvent se retrouver sans électricité durant une période de délestage. Dans ces cas précis, on se retrouve avec un nombre important de producteurs de gaz dans l'impossibilité de pouvoir distribuer alors même que le délestage sera lié à une pénurie. Il demande alors au Gouvernement s'il va prendre les mesures nécessaires afin d'exclure de la liste non prioritaire lors de délestage toutes les entreprises qui fournissent plus de gaz ou d'électricité qu'elles en consomment.
Réponse publiée le 15 août 2023
La décision de la Russie de réduire fortement les exportations de gaz vers l'Europe a eu un impact sur près de 40 % de l'approvisionnement en gaz de l'Union européenne. Le Gouvernement a mis en place plusieurs mesures pour renforcer la sécurité d'approvisionnement en gaz pour l'hiver 2022-2023 et pour les hivers suivants au niveau national et en lien avec ses partenaires européens. Ainsi les stockages ont été remplis à 100 % au début de l'hiver, ce qui représente 130 TWh soit plus de 25 % de la consommation annuelle française. Les capacités de débarquement de GNL dans les terminaux méthaniers français ont été renforcées sur les terminaux de Fos et Dunkerque et un terminal méthanier flottant sera mis en place au Havre en septembre 2023. Des mesures réglementaires ont été prises pour accélérer des projets de production de biométhane, notamment en prenant mieux en compte l'inflation qui menaçait leur équilibre économique. Des mesures de soutien renforcé à la rénovation énergétique, à la production de chaleur renouvelable et à la décarbonation de l'industrie ont été mises en place dès le printemps 2022, par exemple en augmentant le budget du fonds chaleur renouvelable à hauteur de 520 millions d'euros en 2022 contre 370 initialement prévus. Enfin le plan de sobriété qui a été présenté le 6 octobre dernier par la Première ministre comporte un ensemble de dispositifs de mobilisation à destination des différents secteurs professionnels, des administrations publiques et des ménages (dont une campagne d'information sur les éco-gestes), ainsi que d'actions d'accompagnement (par exemple le programme CEE ACTEE+ qui vise à accompagner les collectivités dans l'ingénierie de leurs projets), de dispositifs financiers et d'évolutions réglementaires. Il porte aujourd'hui ses fruits dans l'ensemble des secteurs et nous permet de réduire notre consommation d'énergie finale, bénéfique pour notre sécurité d'approvisionnement et pour l'atteinte de nos objectifs climatiques. Ces efforts doivent être poursuivis et amplifiés. Du fait de l'ensemble de ces mesures, la France est actuellement dans de bonnes conditions d'approvisionnement en gaz en particulier. Cependant, au-delà des mesures précédentes, notre situation peut varier en fonction de la rigueur climatique et des évolutions des approvisionnements externes, et nous devons donc préparer les mesures permettant de faire face à tous les scénarios, y compris pour l'hiver prochain (et même s'il est peu probable que nous ayons à y recourir cet hiver). En particulier, des difficultés peuvent survenir en cas de pointe de froid importante en fin d'hiver, lorsque les stockages sont moins remplis, ce qui diminue alors mécaniquement leur capacité d'injection dans le réseau. Un mécanisme de réduction coordonnée de la consommation pourrait donc être nécessaire pour préserver la sécurité d'approvisionnement. Ce type de mécanisme doit pouvoir faire l'objet de flexibilités et permettre des échanges entre les acteurs concernés, pour générer une plus forte réduction de consommation là où c'est économiquement optimal. Les acteurs qui ne peuvent pas réduire physiquement leur consommation pourront donc acheter des droits à consommer auprès d'acteurs ayant plus de facilités de réduction. Les niveaux de réduction demandés ainsi que la période sur laquelle s'appliquerait un tel mécanisme dépendront nécessairement de la situation d'approvisionnement et de la rigueur de l'hiver. En tout dernier recours, un mécanisme de délestage est prévu afin de disposer d'un mécanisme d'urgence en cas de désequilibre trop fort sur le réseau gazier par exemple en cas de très forte demande qui ne pourrait être satisfaite par les importations, les émissions depuis les terminaux méthaniers et les stockages ou en cas de problème sur une infrastructure clé. Il vise à réduire rapidement la consommation des gros consommateurs de plus de 5GWh de manière organisée pour éviter une baisse de pression brutale dans le réseau, et un écroulement généralisé du réseau de gaz, qui aurait des conséquences économiques, sociales et environnementales très lourdes. À la différence de l'électricité, le délestage en gaz ne peut concerner que des gros consommateurs de plus de 5GWh par an, qui sont prévenus individuellement de la nécessité de réduire leur alimentation, pour une courte période. Il est important par ailleurs pour les entreprises, d'une part d'envisager des actions d'économie d'énergie ou développement de moyens de chauffage décarbonés, que l'État peut soutenir financièrement, d'autre part d'étudier la mise en place de moyens permettant de faire face à d'éventuels délestages (même si ceux-ci seront exceptionnels et de courte durée) ou même à des coupures inopinées de gaz qui peuvent survenir, par exemple en cas de situations accidentelles. Afin de suivre les prévisions de consommation par rapport à l'approvisionnement avec quelques jours d'avance, les gestionnaires de réseau de transport ont développé le service Ecogaz, à l'instar du service EcoWatt pour l'électricité, ce qui permettra de prévoir les moments où des efforts de réduction volontaire seront nécessaires. Enfin, les gros consommateurs qui le souhaitent peuvent aussi conclure un contrat d'interruptibilité garantie avec le gestionnaire de réseau de transport de gaz. Cela permet d'avoir un préavis plus important pour réduire volontairement sa consommation en cas de risque sur le réseau (16 h la veille) et d'être rémunéré pour cette action.
Auteur : M. Paul Molac
Type de question : Question écrite
Rubrique : Énergie et carburants
Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires
Dates :
Question publiée le 15 novembre 2022
Réponse publiée le 15 août 2023