16ème législature

Question N° 3793
de Mme Christine Arrighi (Écologiste - NUPES - Haute-Garonne )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère attributaire > Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Rubrique > logement : aides et prêts

Titre > Nécessaire évolution du taux d'usure pour faciliter l'accès à la propriété

Question publiée au JO le : 06/12/2022 page : 5933
Réponse publiée au JO le : 18/04/2023 page : 3614

Texte de la question

Mme Christine Arrighi appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les difficultés rencontrées par de nombreux ménages pour acquérir leur logement. Le mode actuel de calcul du taux d'usure est inadapté en période d'évolution des taux d'intérêt. La mise à jour trop tardive du taux d'usure aboutit à refuser des demandes de crédits de ménages pourtant solvables, car l'addition du taux d'intérêt, des frais et de l'assurance des emprunteurs dépasse le niveau autorisé, calculé avec un trimestre de retard. Pourtant, la soustraction des frais d'assurance des emprunteurs de ce calcul apparaît comme une alternative crédible. En effet si le plafonnement des taux d'intérêt financiers relève de la nécessaire protection des familles, les frais d'assurance sont d'une nature totalement différente. L'assurance des emprunteurs est l'objet d'une concurrence ouverte : les assurés peuvent la choisir librement et en changer aisément. Ils disposent d'un outil de comparaison au travers du taux annuel effectif d'assurance (TAEA) qui les met à l'abri d'éventuels excès tarifaires. De plus, l'inclusion des frais d'assurance dans le calcul du taux d'usure incite les ménages, dans la période actuelle d'évolution des taux, à choisir un faible niveau de garanties pour ne pas dépasser le taux d'usure, ce qui à l'avenir présage de déconvenues fâcheuses. Elle lui demande donc s'il envisage d'établir une mise à jour mensuelle du taux d'usure et s'il entend retirer les frais d'assurance des emprunteurs du calcul de ce taux afin de mettre un terme à cette situation qui paralyse l'accession à la propriété des ménages.

Texte de la réponse

Le Gouvernement est très attentif à l'accès au crédit et au risque d'éviction de certains ménages dans le contexte actuel de remontée des taux d'intérêt. Les modalités de calcul du taux d'usure sont définies par l'article L.314-6 du code de la consommation, qui dispose que « constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit et les sociétés de financement pour des opérations de même nature comportant des risques analogues […] ». Conformément aux articles D.314-15 et D.314-16 du code précité, les taux effectifs moyens sont calculés trimestriellement par la Banque de France « selon une moyenne arithmétique simple des taux effectifs globaux observés », via des collectes auprès des établissements prêteurs. Le taux d'usure vise à protéger les emprunteurs, notamment les plus fragiles, d'une charge de la dette excessive. La formule de calcul du taux d'usure permet de contenir les taux d'intérêt dans une fourchette réduite, qui bénéficie ainsi à la majorité des emprunteurs. Toutefois, la remontée rapide des taux, que nous connaissons depuis quelques mois, a pu conduire le niveau du taux d'usure à devenir trop contraignant et à gripper l'accès au crédit des particuliers. Le Gouvernement a, dès lors, organisé un cycle de travail avec l'ensemble des parties concernées (Banque de France, Trésor, banques, associations de consommateurs…) afin de faire un état des lieux exhaustif des impacts du taux d'usure et d'examiner les mesures de correction possibles. Des premiers ajustements techniques ont ainsi été apportés, dès juin 2022, pour que le taux d'usure suive mieux l'évolution des taux du marché. Surtout, en janvier 2023, sur recommandation du Gouverneur de la Banque de France, le Ministre de l'Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique a décidé de réviser mensuellement le taux d'usure, jusqu'en juillet 2023. Cette mesure transitoire permet au taux d'usure de davantage refléter l'état des taux du marché, tout en conservant son caractère protecteur pour les emprunteurs. Ainsi, le taux d'usure des crédits immobiliers à taux fixe de plus de vingt ans est passé de 3,05 % au 1er octobre 2022 à 4% au 1er mars 2023. S'agissant de la prise en compte du coût de l'assurance emprunteur, la directive 2014/17/UE sur les crédits relatifs aux biens immobiliers définit le coût total du crédit comme tous les coûts que le consommateur doit payer au titre du contrat de crédit et qui sont connus du prêteur, incluant les intérêts, les commissions, les taxes, les frais des intermédiaires de crédit, nécessaires pour obtenir le crédit ou pour l'obtenir aux conditions annoncées. Certaines garanties d'assurance emprunteur étant rendues obligatoires pour obtenir un prêt, leur coût, qui peut parfois représenter un montant très important, doit être inclus dans le calcul du coût total du crédit. Ainsi, supprimer l'assurance emprunteur du champ d'application du taux d'usure ferait perdre à celui-ci son caractère protecteur. En effet, une part importante du coût du crédit pourrait être imposée à l'emprunteur au-delà de l'usure. Le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en lien avec la Banque de France, continuera de suivre l'évolution de l'accès au crédit avec la plus grande attention, afin d'évaluer les effets des mesures mises en œuvre.