Délestages et appels d'urgence
Question de :
M. Aurélien Lopez-Liguori
Hérault (7e circonscription) - Rassemblement National
M. Aurélien Lopez-Liguori attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications sur les coupures d'électricité qui se profilent pour l'hiver 2022. Alors que dès octobre 2022, sur la base des travaux menés pour son rapport pour avis sur le projet de loi de finances, il avait lancé l'alerte sur les coupures d'électricité et le manque de préparation visible à ce sujet, le Gouvernement ne semble pas avoir pris la mesure de l'importance de la crise qui arrive. La population devra faire face à plusieurs délestages l'hiver 2022. Au total, 60 % des foyers français devront subir ces coupures d'électricité. L'une des conséquences de ces délestages serait dramatique puisque les antennes étant coupées, les communications d'urgence seraient à l'arrêt. Les pompiers, le samu et la police ne seraient plus joignables. Il demande donc si des mesures permettant d'assurer la sécurité des Français, telles qu'un renforcement des effectifs de police et de pompiers, sont prévues dans les zones délestées afin de prévenir une hausse des infractions. Enfin, les délestages mettent en danger les personnes hospitalisées à domicile. Ces patients à haut risque vital (PHRV) sont près de 4 000 en France, recensés par les agences régionales de santé (ARS). Il est prévu que trois jours avant les coupures, les patients soient avertis ; s'ils sont en zone délestables, ils feraient l'objet d'une prise en charge adaptée et pourraient être déplacés pour maintenir les soins nécessaires. Il lui demande quelles sont les méthodes utilisées pour établir ces listes, pour les mettre à jour et être sûr que tous les patients sont recensés. Il demande si le fait que les patients soient invités à se déclarer à l'ARS ne mènera pas inévitablement à en manquer certains et finalement à faire face à des situations dramatiques où les personnes non enregistrées comme PHRV seront touchées par les délestages.
Réponse publiée le 6 juin 2023
Notre pays traverse sa pire crise énergétique depuis les chocs pétroliers des années 1970. La crise ukrainienne et la volonté de la Russie d'utiliser l'approvisionnement énergétique comme une arme de guerre ont entraîné des tensions sans précédent sur les marchés du gaz depuis 2022 et, par voie de conséquence, sur les marchés électriques européens. Par ailleurs, nous avons rencontré à l'été 2022 un épisode de sécheresse inédit ayant conduit à un niveau de production hydroélectrique le plus bas en près de 45 ans. Les risques liés à la sécheresse pour notre système électrique demeurent d'ailleurs en 2023, alors qu'un déficit de précipitations par rapport aux niveaux historiques est constaté en cumulé depuis le début de l'hiver dernier. Enfin, depuis plus d'un an la production nucléaire atteint un niveau historiquement bas du fait de l'effet conjugué du programme de visites décennales plus dense résultant du vieillissement du parc (grand carénage), des conséquences du phénomène de corrosion sous contrainte (CSC) sur une quinzaine de réacteurs, découvert fin 2021 mais également des répercussions des différents mouvements sociaux ayant affecté les activités de maintenance. Ce contexte de crise énergétique a conduit le Gouvernement à mettre tout en œuvre pour garantir les meilleures conditions pour le passage de l'hiver dès le début de l'été dernier. Tout d'abord, sous l'égide de la Premier ministre, un Plan sobriété associant 300 fédérations et des centaines d'entreprises, de collectivités locales et de services de l'Etat a été mis en place. Grâce à la forte mobilisation des entreprises, des administrations, des collectivités locales et des Français, la consommation combinée de gaz et d'électricité a baissé de plus de 10 % cet hiver après correction des conditions météorologiques, soit, pour l'électricité, une baisse de consommation équivalente à la production de l'ordre de 7 réacteurs nucléaires. Cette baisse de consommation a continué à s'observer au premier trimestre 2023. Par ailleurs, grâce à une politique d'anticipation menée par le Gouvernement dès le début de l'été, les stocks de gaz ont connu des niveaux de remplissage inédit tout au long de l'hiver dernier. Dans le même esprit, le Gouvernement a travaillé tout au long de l'année 2022 les projets renouvelables en cours de développement et un projet de loi d'accélération des énergies renouvelables a été déposé au Parlement, depuis adopté. Nous avons enfin sécurisé notre capacité d'importation d'électricité au travers d'un partenariat de solidarité énergétique qui a été signé avec l'Allemagne fin novembre 2022, qui a contribué à permettre à la France d'importer en 2022 un volume record d'électricité. L'ensemble de ces leviers a permis d'éviter jusqu'à 8 signaux Ecowatt « orange » et 12 signaux EcoWatt « rouge » au cours de l'hiver, c'est-à-dire potentiellement 12 épisodes de coupures d'électricité programmées. L'hiver 2022-2023 a ainsi pu être passé sans coupure d'électricité, ce dont il faut se réjouir, puisque cela traduit un accroissement de la résilience de notre système électrique. Compte tenu de la situation du système électrique français au début de l'hiver, le Gouvernement s'était préparé à des scénarios extrêmes dans lesquels un plan national de délestage électrique aurait pu être mis en œuvre et prendre la forme de coupures locales, ciblées et temporaires, de 2 heures maximum, pour certains usagers raccordés aux réseaux publics de distribution d'électricité, afin d'éviter des coupures de plus grande ampleur. En l'occurrence, si des coupures organisées temporaires avaient été utilisées, des perturbations des communications téléphoniques et numériques dans certaines zones auraient été possibles. Un travail d'anticipation avait donc été mené pour maintenir au maximum l'accès au numéro d'urgence 112, le cas échéant, qui est le numéro d'appel d'urgence multi-opérateur, c'est-à-dire qu'il peut être composé quel que soit le réseau de couverture. Si malgré cela, dans certaines zones ce numéro n'était pas été accessible, d'autres dispositifs locaux auraient pu être mis en place, au cas par cas, par les préfets. Par ailleurs, les patients à haut risque vital, soignés à domicile, sont identifiés par l'Agence régionale de santé (ARS) et les gestionnaires de réseaux d'électricité (Enedis et les ELD). Ces listes avaient d'ailleurs fait l'objet d'une actualisation au cours de l'hiver. En cas de signal « Ecowatt rouge », les gestionnaires de réseaux d'électricité auraient ainsi pris contact avec chacune des personnes concernées et se seraient assurés de la bonne connaissance du signal « Ecowatt rouge », trois jours, puis, si nécessaire, deux jours avant et la veille de la coupure annoncée. Dans le cas où les patients concernés n'auraient pas accusé bonne réception de cette information, Enedis se déplacerait à leur domicile afin de s'assurer qu'ils ont eu connaissance du risque de coupure. Les ARS, en lien avec les gestionnaires de réseaux d'électricité, se seraient coordonnés pour que les meilleures solutions soient anticipées et pour vérifier que ces patients à haut risque vital et/ou soignés à domicile aient une alimentation électrique autonome et suffisante supérieure à deux heures. Dans le cas contraire, les préfets auraient été saisis et les services de secours auraient pu procéder, si nécessaire à une évacuation préventive des personnes concernées vers l'établissement de santé le plus proche de Ieur lieu de résidence, ou un site prévu à cet effet disposant d'une alimentation électrique. Le retour d'expérience de ce travail d'anticipation est en cours afin d'optimiser l'organisation de la gestion de crise en lien avec l'ensemble des parties prenantes pour le futur. Je souhaite préciser qu'il est impératif que les listes de patients à haut risque vital soient régulièrement et correctement mise à jour, et que leurs installations à domicile soient appropriée, et ce en dehors même du contexte de risque particulier sur notre système életrique que nous avons traversé l'hiver dernier, car le risque de coupure ne peut être à réduit à zéro, à l'instar des coupures d'électricité au cours de l'été dernier causées par les événéments météorologiques. L'hiver prochain doit désormais être anticipé. Ainsi, mes équipes continuent à travailler au déploiement des énergies renouvelables, au suivi resserré en lien avec EDF et RTE de la disponibilité du parc nucléaire français, et au remplissage de nos stocks de gaz, qui nécessitent une attention constante. Un Plan de sobriété « temps 2 » doit également permettre d'ancrer dans la durée les baisses de consommation réalisées pendant l'hiver et d'aller plus loin, dans tous les secteurs. Par ailleurs, nous expertisons, en lien avec les filières concernées les voies d'augmentations de nouvelles capacités d'effacement en France, de même que toutes les possibilités d'augmentation de puissance des capacités de production existantes, notamment renouvelables. La ministre de la Transition énergétique tient à vous assurer de l'action résolue du Gouvernement pour faire face à cette crise énergétique exceptionnelle, et pour développer en France une sécurité d'approvisionnement en énergie à long terme, tout en étant cohérent avec nos objectifs de décarbonation. La mobilisation des Français en faveur de la sobriété cet hiver nous montre que nous avons les moyens d'éviter le recours à des mesures de coupures d'électricité programmée.
Auteur : M. Aurélien Lopez-Liguori
Type de question : Question écrite
Rubrique : Sécurité des biens et des personnes
Ministère interrogé : Transition numérique et télécommunications
Ministère répondant : Transition énergétique
Dates :
Question publiée le 20 décembre 2022
Réponse publiée le 6 juin 2023