Stratégie nationale de lutte contre la prolifération du frelon asiatique
Question de :
M. Didier Le Gac
Finistère (3e circonscription) - Renaissance
M. Didier Le Gac appelle l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la stratégie nationale de lutte contre la prolifération du frelon asiatique. Introduit accidentellement en Aquitaine en 2004, le frelon asiatique n'a cessé depuis 20 ans de proliférer et désormais, il est présent sur tout le territoire français. Reconnu comme espèce exotique envahissante, cet insecte est classé à l'échelon national parmi les dangers sanitaires de deuxième catégorie pour l'abeille domestique. Véritable fléau pour l'apiculture, il constitue un vrai danger pour la biodiversité. On constate déjà une disparition de 30 % de la part des colonies d'abeille et, par voie de conséquence, une réduction drastique de la production de miel qui, en 25 ans, a diminué des 2/3 pour s'établir aux alentours des 13 000 tonnes en 2022. Depuis fin avril 2021, c'est la réglementation portant sur les espèces exotiques envahissantes pilotée par le ministère de la transition écologique qui s'applique à la lutte contre le frelon asiatique. En pratique, les opérations de lutte contre cette espèce sont définies à l'article L. 411-8 du code de l'environnement. En fonction de cet article, les préfets peuvent et doivent procéder à la capture ou au prélèvement, à la garde ou à la destruction des spécimens de cette espèce et il est en leur pouvoir d'ordonner la destruction de nids sur les propriétés privées. Toutefois ces opérations de destruction qui peuvent s'élever jusqu'à 200 euros ne sont pas financées par l'État mais à la seule charge des particuliers, qui ne peuvent bénéficier que d'une aide financière émanant d'une collectivité territoriale pour tout ou partie de frais engagés pour ces opérations. L'État, lui, ne finance que des travaux portant sur les piégeages et sur le développement d'un protocole de destruction des nids par des appâts empoisonnés. Par ailleurs, en novembre 2022, le « plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation 2021-2026 » a simplement proposé des mesures de suivi et de surveillance de la colonisation du territoire par le frelon asiatique Pour résumer, la destruction des nids de frelons asiatiques est seulement conseillée. Elle n'est ni obligatoire, ni systématique et est financièrement à la seule charge des victimes de ces nids. Faute de stratégie nationale, ce sont des dizaines de milliers de nids de frelons asiatiques qui sont désormais présents sur tout le territoire et mettent gravement en danger le secteur apicole. En Bretagne, chaque année, on détruit environ 20 000 nids de cette espèce. C'est pourquoi il souhaite savoir comment le Gouvernement entend établir une vraie stratégie de lutte efficace contre la prolifération du frelon asiatique et comment il entend protéger l'apiculture en France contre les dégâts biologiques et sécuritaires causés par le frelon asiatique.
Réponse publiée le 14 février 2023
La lutte contre le frelon asiatique (Vespa velutina nigrithorax), espèce ayant connu une expansion rapide dès son introduction accidentelle en Aquitaine en 2004, est encadrée par un corpus législatif et réglementaire complet et détaillé ci-après. Le plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation qui a été lancé conjointement par les ministères de la transition écologique et de l'agriculture en novembre 2021 est de nature à soutenir une bonne application des moyens de lutte (action 4.4.4 du plan, disponible ici : https://agriculture.gouv.fr/plan-national-en-faveur-des-insectes-pollinisateurs-et-de-la-pollinisation-2021-2026-DP). Depuis fin avril 2021, une seule réglementation concourt à la lutte contre cette espèce : celle portant sur les espèces exotiques envahissantes (EEE) pilotée par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (MTECT). Celle portant sur les organismes de quarantaine, pilotée par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA), a exclu le frelon asiatique au regard de la nouvelle législation européenne dite "loi de santé animale » (Cf ci-après). Concernant la réglementation spécifique sur les EEE, la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a complété le code de l'environnement pour intégrer des dispositions législatives permettant d'agir contre les EEE (articles L. 411-5 et suivants). Au regard de l'intérêt de préservation du patrimoine biologique, des milieux naturels et des usages associés, l'article L.411-6 de du code de l'environnement interdit sur le territoire national, l'introduction, la détention, le transport, le colportage, l'utilisation, l'échange, la vente ou l'achat de tout spécimen vivant d'EEE, dont la liste est fixée par l'arrêté interministériel du 14 février 2018. Le frelon asiatique est inscrit sur cette liste. Les opérations de lutte sont définies à l'article L.411-8 du code de l'environnement. Ainsi, dès constat de la présence dans le milieu d'une EEE, le préfet de département peut « procéder ou faire procéder (…) à la capture, au prélèvement, à la garde ou à la destruction de spécimens » d'EEE. Un arrêté préfectoral précise alors les conditions de réalisation de ces opérations. Les préfets peuvent notamment ordonner la destruction de nids sur des propriétés privées. Le financement des opérations de lutte contre le frelon n'est pas pris en charge par l'État, au regard du degré très large d'envahissement du territoire métropolitain par l'espèce. La destruction des nids reste à la charge des particuliers et ses coûts peuvent être, le cas échéant, pris en charge en tout ou partie par des financements locaux émanant de collectivités territoriales. Parallèlement, la direction générale de l'alimentation du MASA accompagne financièrement l'Institut technique et scientifique de l'apiculture et de la pollinisation (ITSAP – Institut de l'Abeille) et le MNHN (Muséum national d'Histoire naturelle) pour leurs actions techniques et scientifiques relatives à l'identification et à la validation des outils de lutte contre le frelon asiatique. Les actions financées comportent deux volets : une méthode concernant le piégeage des fondatrices au printemps et le développement d'un protocole pour la destruction de nids par appâts empoisonnés. Le premier volet des travaux concernant le piégeage est arrivé à son terme et a montré que le nombre de nids du frelon asiatique décroît significativement lorsque la méthode est conduite durant plusieurs printemps successifs, avec un maillage spatial fin et régulier (plus de 200 pièges répartis de façon homogène sur environ 10 km2 autour d'un rucher à protéger). Un complément d'étude est envisagé sur 2023, afin d'approfondir les résultats. Le second volet vise à vérifier l'efficacité d'appâts empoisonnés et leurs impacts sur l'environnement. Dans le cas où la méthode se montrerait efficace, il reviendra à la filière et/ou à un industriel de réaliser les démarches d'obtention des autorisations « substances biocides », puis « produits ». Ce projet devrait également permettre de proposer une méthode alternative au fipronil (hautement toxique) utilisé sans autorisation pour lutter contre les frelons. Enfin, il est à noter que le frelon asiatique n'est pas réglementé par le ministère de la santé et des solidarités au titre des espèces nuisibles pour la santé humaine car il s'avère, au regard des données des centres anti-poisons, que l'espèce ne présente pas de danger supérieur par rapport d'autres hyménoptères (frelon européen, guêpes, etc). Si cette situation venait à changer du fait de l'extension de l'espèce, la question de sa réglementation serait à réexaminer.
Auteur : M. Didier Le Gac
Type de question : Question écrite
Rubrique : Animaux
Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère répondant : Écologie
Dates :
Question publiée le 24 janvier 2023
Réponse publiée le 14 février 2023