Question de : M. Philippe Juvin
Hauts-de-Seine (3e circonscription) - Les Républicains

M. Philippe Juvin appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la prise en charge de la fibromyalgie. Ce syndrome, fait de symptômes chroniques, d'intensité modérée à sévère, incluant des douleurs diffuses avec sensibilité à la pression, de la fatigue, des troubles du sommeil, des troubles cognitifs et de nombreuses plaintes somatiques, atteint en France une prévalence estimée de 1,6 % à 2 %. Le syndrome fibromyalgique peut avoir des conséquences médicales et psychosociales majeures (restriction d'activités, handicap moteur invalidant, arrêts de travail prolongés, etc.). Son traitement n'étant pas codifié et le plus souvent symptomatique, de nombreux examens, des consultations répétées auprès de spécialistes et des visites fréquentes pour soins de santé sont nécessaires pour établir un diagnostic, générant d'importants coûts individuels et collectifs. Au-delà de cette errance médicale rapportée par les personnes atteintes de ce syndrome, une proportion non négligeable de praticiens indique se sentir désarmée devant les patients souffrant de fibromyalgie. En outre, l'absence de signes biomédicaux qui seraient reconnus par tous comme signes objectifs de maladie dans la fibromyalgie et une prévalence rapportée comme relativement élevée dans la population générale font que son étiologie, son diagnostic, sa prise en charge et même sa réalité clinique, demeurent des sujets encore parfois soumis à controverse. Le fondement des débats est notamment de savoir si la fibromyalgie est « réelle ». En l'absence d'éléments cliniques tangibles, l'organicité de la fibromyalgie est en effet remise en cause et la nécessité d'une prise en charge parfois sous-estimée. Cette dernière est jugée (trop) difficile, chronophage et peu valorisante par certains professionnels de santé, du fait entre autres de ses nombreuses comorbidités. Pourtant, la fibromyalgie a été reconnue comme une pathologie par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) dès 1990. En 2007, l'Académie nationale de médecine a publié un rapport sur la fibromyalgie, en décembre 2008, le collège de la Haute Autorité de santé (HAS) a rédigé à la demande de la Société française d'étude et de traitement de la douleur (SFETD) des recommandations professionnelles sur la douleur chronique en général, incluant la fibromyalgie. Ces recommandations ont été suivies en juillet 2010 d'un rapport d'orientation sur le syndrome fibromyalgique de l'adulte après saisine du ministère de la santé. Enfin, en octobre 2016, une commission d'enquête parlementaire sur la fibromyalgie a publié une liste de 20 propositions. Dans ce contexte et alors que de nombreux patients sont désemparés, il souhaiterait connaître les mesures qu'entend prendre le Gouvernement pour reconnaître la fibromyalgie - notamment comme ALD -, encourager la recherche sur cette maladie et mieux former les soignants à sa prise en charge.

Réponse publiée le 7 février 2023

On estime que 1,5 à 2 % de la population souffre de fibromyalgie. Selon le rapport d'expertise collective de l'institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) rendu public en octobre 2020, la fibromyalgie est un syndrome douloureux chronique, associant de nombreux symptômes non spécifiques et d'intensité variable : des douleurs chroniques diffuses et fluctuantes, une asthénie persistante, des difficultés de concentration, des troubles du sommeil et un déconditionnement qui conduit à l'inactivité physique. Des symptômes dépressifs sont aussi rapportés. Toutefois, si l'ensemble de ces symptômes peuvent être présents dans le syndrome de fibromyalgie, ils ne permettent pas la qualification de maladie. L'INSERM préconise donc une « approche multimodale centrée sur le patient pour une prise en charge efficiente sur le long terme ». Dans ce contexte, la prise en charge par l'Assurance Maladie des soins liés à la fibromyalgie est donc à ce jour celle du droit commun. En effet, l'absence de causes connues permettant de définir des critères médicaux d'admission, le manque d'examens diagnostiques identifiés et la variabilité des prises en charge et des traitements ne permettent pas de constituer les bases de la création d'une affection de longue durée (ALD). Néanmoins, pour les patients atteints de formes sévères et invalidantes, une prise en charge au titre des affections « hors liste », conformément à l'article R. 322-6 du code de la sécurité sociale, est possible. Cette admission est appréciée par le médecin-conseil sur le fondement, d'une part, des critères de gravité, d'évolutivité ou du caractère invalidant de la maladie, et d'autre part, de la durée prévisible du traitement qui doit être supérieure à 6 mois avec une thérapeutique particulièrement coûteuse. Par ailleurs, l'assuré peut percevoir une pension d'invalidité, si l'incapacité permanente constatée est égale à une perte au moins des deux tiers de capacité ou de gains. L'évaluation médicale de l'invalidité revient au médecin-conseil de la caisse d'assurance maladie. Au titre de leur pension d'invalidité, les assurés bénéficient d'une prise en charge à 100% de leur frais de santé pour la maladie. Le ministère de la santé et de la prévention a par ailleurs engagé des actions pour améliorer le parcours de santé et la qualité de vie des patients atteints de fibromyalgie. Elles s'articulent autour de 4 axes : mieux informer les professionnels, diagnostiquer plus précocement, mieux structurer la filière de prise en charge de la douleur chronique et renforcer la recherche sur la douleur chronique et la fibromyalgie. A ce titre, la Haute autorité de santé (HAS) a publié des recommandations concernant le « Bon usage des médicaments opioïdes : antalgie, prévention et prise en charge du trouble de l'usage et des surdoses » en mars 2022. Elle devrait également publier un référentiel de prescription d'activité physique pour la fibromyalgie dans le cadre de l'activité physique et sportive sur ordonnance, conformément à son programme de travail pour 2022. Le ministère travaille également à la structuration de la filière de prise en charge de la douleur chronique afin que celle-ci soit plus lisible. Ainsi, l'annuaire national des structures d'étude et de traitement de la douleur chronique (SDC) sera actualisé au 1er trimestre 2023 pour donner suite à la labellisation des structures douleurs chroniques prévue tous les 5 ans. En complément, la HAS a été saisie par le ministère de la santé et de la prévention pour produire des recommandations relatives au processus standard de prise en charge des patients douloureux chroniques et à la collaboration optimale entre ville et structures de recours.  Enfin, afin de mieux informer les patients et les professionnels de santé sur les dispositifs dérogatoires d'affections de longue durée, notamment l'ALD hors liste, l'Assurance maladie a créé un espace ALD et maladies chroniques pour les patients sur le site ameli.fr et a amélioré les informations disponibles sur les pages destinées aux professionnels de santé (médecins, médecins-conseils et médecins des maisons départementales des personnes handicapées).

Données clés

Auteur : M. Philippe Juvin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Maladies

Ministère interrogé : Santé et prévention

Ministère répondant : Santé et prévention

Dates :
Question publiée le 24 janvier 2023
Réponse publiée le 7 février 2023

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