Question écrite n° 5046 :
Mieux contrôler et encadrer l'usage des nanoparticules

16e Législature

Question de : M. Karl Olive
Yvelines (12e circonscription) - Renaissance

M. Karl Olive attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la présence des nanoparticules dans les différents produits cosmétiques ou alimentaires. Les nanomatériaux sont utilisés de plus en plus fréquemment dans de nombreux produits de la vie courante : aliments, cosmétiques, médicaments. Selon l'ANSES, les nanomatériaux sont des matériaux dont la taille ou la structure comporte au moins une dimension comprise entre 1 et 100 nanomètres environ. Cette petite taille leur confère des propriétés physiques et chimiques différentes des propriétés des matériaux « classique ». Or cette utilisation des nanomatériaux soulève de nombreuses questions sur les risques sanitaires qu'ils peuvent entraîner pour la santé humaine ou pour l'environnement, d'autant plus que la construction de l'encadrement réglementaire de leur utilisation n'est pas aujourd'hui achevée. Aussi, la présence de ces nanoparticules, ou nanomatériaux n'est aujourd'hui que peu ou pas indiquée sur les étiquettes des différents produits. Ainsi, l'association AVICENN a pu constater la présence du dioxyde de titane, considéré comme un cancérigène avéré, dans plusieurs références cosmétiques, sans mentionner sa présence sur les étiquettes. Aussi, M. le député souhaite connaître l'état des lieux de la réglementation en vigueur et des évolutions envisageables. Il souhaite également connaître les moyens mis en œuvre par le ministère et la direction de la consommation et de la répression des fraudes pour mieux contrôler l'usage de ces particules et en particulier le dioxyde de titane. Enfin, il souhaite connaître la possibilité de mieux informer le consommateur sur ces nanoparticules via notamment l'étiquetage.

Réponse publiée le 21 mars 2023

Les différents services ministériels, que ce soit la direction générale de la prévention des risques, la direction générale de la santé ou la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) sont régulièrement en contact avec cette association AVICENN (Association de veille et d'information civique sur les enjeux des nanosciences et nanotechnologies) dont les travaux contribuent d'ailleurs à alimenter le ciblage de certains contrôles de la DGCCRF. Les résultats des contrôles de la DGCCRF l'ont conduite à intensifier ses actions pour mieux protéger et informer les consommateurs quant à l'usage des nanoparticules. Ainsi, dans le secteur cosmétique, parmi les 13 produits solaires prélevés par la DGCCRF en 2021, 1 était conforme, 11 contenaient du dioxyde de titane sous forme de nanomatériau, autorisé comme filtre solaire, mais ne respectant pas la taille médiane minimale des particules fixées par la réglementation, et 1 contenait des filtres solaires non étiquetés [nano]. Parmi les 11 autres cosmétiques contrôlés, 5 étaient conformes et 6 contenaient des nanomatériaux non autorisés ou de la silice [nano] non étiquetée. À la suite de ces contrôles, pour les défauts d'étiquetage et pour la présence de nanomatériaux non autorisés (oxydes de fer ou dioxyde de titane utilisés comme colorants), les sociétés ont été enjointes de se mettre en conformité. Plusieurs de ces produits étant mis sur le marché par des opérateurs d'autres pays européens, des demandes ont été transmises à ces opérateurs et les autorités nationales concernées en ont été informées, pour faire cesser ces pratiques. La DGCCRF a également demandé aux fédérations professionnelles de constituer les dossiers nécessaires pour régulariser l'utilisation de ces colorants sur la base d'une évaluation de leur sécurité. S'agissant des articles textiles, les contrôles ont eu, pour objectifs, de rechercher la présence éventuelle de nanomatériaux compte tenu des propriétés mises en avant et de vérifier le bon étiquetage de ces articles au titre du règlement relatif aux produits biocides. Quatre prélèvements ont été réalisés par la DGCCRF afin de mettre en évidence la présence éventuelle de nanoparticules d'argent. Deux produits étaient traités avec des nanoparticules d'argent sans que cette information ne soit portée à la connaissance des consommateurs, les deux opérateurs commercialisant ces deux produits les ont retirés du marché à la suite de l'enquête de la DGCCRF. À l'inverse, un des produits prélevés ne contenait pas de nanoparticules d'argent pourtant annoncées dans le descriptif du produit concerné. La règlementation n'oblige toutefois pas les fabricants des produits cosmétiques, alimentaires ou biocides à fournir sur l'emballage de leurs produits l'information sur la présence de nanomatériaux « dès que la teneur en nanoparticules est supérieure à 10 % ». En effet, les règlementations des produits cosmétiques et alimentaires ne prévoient pas de seuil (proportion de nanoparticules) à partir duquel un ingrédient doit être considéré comme nanomatériau. La règlementation des produits chimiques, notamment biocides, prévoit quant à elle un seuil de 50 %. Ces disparités font l'objet de controverses avec les professionnels et ont récemment conduit la Commission européenne à prendre position en faveur d'un seuil harmonisé à 50 %. Les autorités françaises ont plaidé pour une absence de seuil, ou du moins pour sa révision à la baisse, en s'appuyant sur les conclusions d'une expertise de l'Anses (agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail) selon laquelle le seuil de 50 % n'avait pas de fondement scientifique. À la différence des règlementations précitées, pour d'autres types de produits (comme les brosses à dents ou les articles textiles non traités biocides), il n'existe pas d'obligation d'étiquetage spécifique des nanomatériaux. Plus largement, l'idée de développer la recherche des nanomatériaux dans les produits du quotidien et leur interdiction lorsque leur usage n'est pas autorisé par la règlementation, est tout à fait en phase avec les priorités du Gouvernement. En effet, le quatrième plan national santé-environnement (PNSE4), copiloté par les ministères chargés de la santé et de l'environnement, comprend plusieurs actions en ce sens. Elles visent à améliorer la connaissance sur l'usage des nanomatériaux, sur les risques sanitaires et environnementaux associés, à mieux respecter les obligations relatives à la présence de nanomatériaux dans les objets du quotidien, à étendre celles relatives à l'étiquetage à d'autres secteurs et à encadrer les nanomatériaux qui ne présentent pas une utilité forte et qui peuvent présenter des risques (actions 13.2 à 13.5). Le rapport d'avancement 2021-2022 de ce plan est disponible en ligne. S'agissant enfin de la suspension de mise sur le marché en France du dioxyde de titane utilisé comme additif alimentaire, celle-ci a bien été prolongée par l'arrêté du 23 décembre 2022 portant suspension de la mise sur le marché des denrées contenant l'additif E171, afin de prévenir l'écoulement sur le territoire français des stocks mis sur le marché européen. Au niveau européen, cet additif a également été retiré de la liste des additifs autorisés par le règlement européen n° 2022/63 de la Commission européenne du 14 janvier 2022.

Données clés

Auteur : M. Karl Olive

Type de question : Question écrite

Rubrique : Consommation

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Dates :
Question publiée le 31 janvier 2023
Réponse publiée le 21 mars 2023

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