16ème législature

Question N° 5117
de M. Paul Molac (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires - Morbihan )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > jeunes

Titre > Dangers liés à la surexposition des mineurs à internet et aux réseaux sociaux

Question publiée au JO le : 31/01/2023 page : 804
Réponse publiée au JO le : 04/07/2023 page : 6178
Date de changement d'attribution: 07/02/2023

Texte de la question

M. Paul Molac alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la surexposition des mineurs à internet et aux réseaux sociaux. Sur internet, des images violentes, voire ultraviolentes, sont facilement accessibles aux internautes - de manière involontaire le plus souvent - en quelques « clics » et sans distinction d'âge. Au-delà de la lutte contre les contenus illicites, se pose la question de l'accès des mineurs à des contenus violents non répréhensibles par la loi. Il convient notamment de rappeler que l'invasion d'images pornographiques n'est pas sans conséquences sur le développement de la sexualité des jeunes, comme l'ont démontré plusieurs études récentes. Qu'il s'agisse de pornographie, ou de tous types de violences visuelles ou verbales, il lui demande comment agir au-delà des dispositifs déjà existants - « contrôle parental », simple clic pour confirmer être majeur - facilement contournables par les mineurs. Il lui demande comment aller plus loin, en partenariat avec les fournisseurs d'accès, les propriétaires de site internet et les fabricants de matériels téléphoniques et informatiques, afin de renforcer et de systématiser l'information et les possibilités de contrôle, dans le respect des libertés numériques. Si le développement de l'éducation au numérique est indispensable, il doit impérativement s'accompagner d'un volet préventif et de sensibilisation - auprès des parents comme des jeunes - aux risques auxquels les enfants ou adolescents peuvent être exposés sur internet et les réseaux sociaux. Ce phénomène est d'autant plus inquiétant que les enseignants et professionnels de santé confirment le lien direct entre le temps passé devant les écrans et la dégradation des résultats scolaires. Dès lors, il souhaiterait savoir quels sont les dispositifs envisagés par le Gouvernement tant sur le plan de la prévention que de l'accès et de son contrôle, afin de limiter l'impact des images, violentes et dégradantes, sur les mineurs et éduquer les plus jeunes au bon usage du numérique.

Texte de la réponse

La lutte contre l'exposition des mineurs à des images violentes ou pornographiques en ligne constitue un enjeu majeur en matière de protection de l'enfance. La loi du 30 juillet 2020 a constitué une avancée importante en la matière en ce qu'elle précise que l'infraction de fabrication, de transport ou de diffusion d'un message à caractère violent, incitant au terrorisme, pornographique, ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine ou à inciter des mineurs à se livrer à des jeux les mettant physiquement en danger, définie à l'article 227-24 du code pénal, est désormais constituée y compris lorsqu'une personne mineure déclare être âgée de plus de 18 ans. Ce délit est puni d'une peine de trois ans d'emprisonnement et 75.000€ d'amende. En matière de pornographie, cette loi a par ailleurs renforcé les pouvoirs de l'autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) pour faire cesser l'accès aux sites à caractère pornographique lorsqu'ils sont consultables par des mineurs. Le président de l'ARCOM dispose ainsi désormais de la faculté de saisir le président du tribunal judiciaire de Paris à l'issue d'une mise en demeure afin d'ordonner qu'il soit mis fin à un service de diffusion d'un contenu à caractère pornographique accessible à des mineurs. Une réflexion est en cours s'agissant des moyens techniques de nature à empêcher le visionnage de tels contenus par les mineurs, y compris lorsque ces derniers déclarent être majeurs conformément aux dispositions de la loi du 30 juillet 2020. Le système du double anonymat apparaît le plus satisfaisant à l'heure actuelle tant en termes de fiabilité que de protection des données. Ce mécanisme permet que l'identité de l'utilisateur ne soit pas transmise au site pornographique et qu'aucune partie n'ait accès à la fois aux données de vérification et de navigation. La création d'un système de certification d'âge répondant à ces exigences à travers la création d'une « attestation numérique » est actuellement en cours d'élaboration. Par ailleurs, la loi du 2 mars 2022 visant à renforcer le contrôle parental sur les moyens d'accès à internet prévoit la pré-installation d'un dispositif de contrôle parental sur les appareils connectés devant être proposée gratuitement à l'utilisateur lors de la première mise en service de l'équipement. Les conditions d'application de cette loi doivent être précisées par un décret en Conseil d'Etat en cours d'élaboration. Une proposition de loi visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne a de plus été votée à l'Assemblée nationale le 2 mars 2023. Elle prévoit notamment un seuil d'âge fixé à 15 ans pour l'inscription et l'utilisation des réseaux sociaux, sauf autorisation expresse de l'un des titulaires de l'autorité parentale. Enfin, au regard de la diffusion massive des usages du numérique dans tous les aspects de la vie quotidienne, la question de la prévention et de la formation est cruciale pour garantir une protection efficace des enfants, compatible avec les modes de vie actuels. C'est pourquoi la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) et l'association e-Enfance ont signé, le 16 novembre 2021, une convention de partenariat pluriannuelle, actant l'intérêt que portent le ministère de la Justice et la DPJJ à la nécessaire protection des mineurs sur Internet. L'association e-Enfance propose en effet des interventions à destination des mineurs, parents et professionnels pour les sensibiliser aux risques liés à l'usage du numérique et aider les victimes de cyberviolences et cyber harcèlement. Par ailleurs, cette association est chargée de la gestion de la plateforme nationale d'écoute téléphonique accessible (numéro vert 3018) par le biais de laquelle une équipe de professionnels (juristes, psychologues et experts du numérique) accompagne, écoute et conseille les mineurs ou leurs responsables légaux. En cas de danger avéré, ces professionnels sont compétents pour rediriger la victime vers d'autres autorités comme la police nationale, la brigade numérique de la gendarmerie nationale ou le 119-Enfance en danger. Le 3018 agit également auprès des plateformes et réseaux sociaux (Facebook, Twitter, Snapchat, Instagram, TikTok, Twitch, YouTube, etc…) afin de signaler les contenus inappropriés ou haineux. À la demande des victimes ou de leurs responsables et de manière prioritaire, les équipes de l'association « e-Enfance » peuvent demander la suppression de contenus illégaux, ou qui leur porteraient préjudice. La DPJJ a demandé à l'ensemble de ses services déconcentrés de garantir l'affichage du numéro 3018 dans tous les établissements et services relevant du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse qui accueillent des mineurs et d'inviter les établissements du secteur associatif habilité à le faire également. Par ailleurs, l'association e-Enfance intervient régulièrement au sein de l'école nationale de protection judiciaire de la jeunesse pour former les professionnels aux usages numériques des mineurs et aux problématiques liées à ces phénomènes.