Archéologie préventive et enjeux agricoles et énergétiques
Question de :
M. Henri Alfandari
Indre-et-Loire (3e circonscription) - Horizons et apparentés
M. Henri Alfandari attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur les opérations de diagnostic ou de fouille d'archéologie préventive lors d'un projet d'aménagement visant à installer des panneaux photovoltaïques sur des terres agricoles. Les débats à l'Assemblée nationale, comme au Sénat, sur le projet de loi d'accélération de la production des énergies renouvelables ont précisé les modalités du développement de l'agrivoltaïsme en France. Le Gouvernement a ainsi exprimé sa volonté d'encourager le formidable potentiel de ce gisement d'énergie renouvelable tout en préservant la souveraineté alimentaire du pays. Chaque projet agrivoltaïque doit permettre d'aboutir à un équilibre conciliant la qualité du projet agricole et l'installation de panneaux photovoltaïques permettant de répondre aux besoins en énergie. Il s'agit d'un travail de haute couture, mené par les agriculteurs eux-mêmes, en relation avec les chambres d'agriculture, les élus locaux, les services de l'État, les organisations professionnelles, les acteurs associatifs et la population. Les développeurs des projets agrivoltaïques sont également appelés à se rapprocher des services des directions régionales des affaires culturelles (DRAC) dans la perspective d'une pré consultation visant à une évaluation de la sensibilité du site. Lorsque la réalisation d'un diagnostic archéologique préventif est prescrite, celle-ci semble avoir un impact disproportionné sur les terres agricoles, au regard des surfaces concernées par les travaux d'aménagement. Ainsi, des cultures ne seront pas implantées et donc pas récoltées. La chambre d'agriculture d'Indre-et-Loire évalue un risque de parcelles inexploitables pendant dix ans qui engendrera inévitablement une dévalorisation agronomique et économiques des sols. Il semble indispensable que l'État assure une nécessaire conciliation entre les objectifs de la réglementation sur l'archéologie préventive et les enjeux agricoles et énergétiques. Les dispositions actuelles sur les opérations de diagnostic ou de fouille d'archéologie préventive ne paraissent pas adaptées aux projets agrivoltaïques, qui n'existaient pas lors de leur définition. C'est pourquoi il lui demande de lui faire connaître ses intentions sur cette question d'une grande actualité afin de soutenir le développement des projets agrivoltaïques. Il appelle également son attention sur la nécessité d'en préciser les modalités dans le cadre de l'élaboration des textes d'application de la loi d'accélération de la production des énergies renouvelables.
Réponse publiée le 9 mai 2023
Dans le cadre de l'instruction des projets d'aménagement, les services de l'État chargés de l'archéologie sont amenés à prendre des mesures visant à concilier les exigences de la recherche scientifique, de la conservation du patrimoine archéologique et le développement économique et social. Les diagnostics archéologiques permettent de détecter et caractériser les vestiges susceptibles d'être détruits par un projet d'aménagement. Si le diagnostic révèle la présence de vestiges, les services de l'État peuvent être amenés soit à prescrire une fouille pour permettre la sauvegarde par l'étude du patrimoine archéologique identifié, soit à prescrire une modification de la consistance du projet afin de conserver in situ les vestiges tout en permettant la réalisation du projet. Cette mesure peut être étudiée par les services de l'État, avant toute prescription de fouille, en lien avec les maitres d'ouvrage. Depuis 2021, en région Centre-Val de Loire, près de 20 projets agrivoltaïques ont été précédés d'un diagnostic archéologique. En 2022, ils représentent, en moyenne, un peu plus de 15 % des surfaces prescrites. En amont de toute procédure d'autorisation, le pôle départemental des énergies renouvelables, guichet unique pour les porteurs de projets, sollicite les différents services concernés, notamment les directions régionales des affaires culturelles, pour recueillir leurs avis sur la sensibilité des projets. De plus, afin d'intégrer très en amont les enjeux archéologiques inhérent à leur projet, les aménageurs sont invités à interroger le service de l'État chargé de l'archéologie territorialement compétent pour s'informer de l'éventuelle localisation de son terrain dans une zone de présomption de prescription archéologique et savoir s'il donnera lieu à des prescriptions archéologiques. Des solutions techniques permettant d'éviter tout impact du projet sur le sous-sol peuvent alors être proposées par l'aménageur pour éviter la mise en œuvre d'un diagnostic. Deux projets sont ainsi à l'étude en Indre-et-Loire. Si une prescription se révèle nécessaire, les délais de réalisation des opérations dépendent de la nature et de la superficie du projet, ainsi que des contraintes inhérentes à la mise à disposition des terrains par l'aménageur au profit de l'opérateur. Ils sont librement déterminés dans la convention de diagnostic ou le contrat de fouille qui lie l'opérateur à l'aménageur et peuvent donc être intégrés au calendrier des cultures dans le cadre des projets agrivoltaïques. De même, les conditions de restitution du terrain à l'issue des opérations sont définies dans la convention de diagnostic ou le contrat de fouille. Dans ce cadre, il revient à l'aménageur de définir toutes mesures particulières de remise en état du terrain, en fonction de la nature des travaux archéologiques, eux-mêmes fonction du type d'aménagement projeté. Pour les projets agrivoltaïques, les diagnostics archéologiques mis en œuvre sondent tout particulièrement les secteurs impactés par le projet (fondations, câblages, locaux techniques et voiries). Au-delà de ces secteurs, les diagnostics permettent de circonscrire l'étendue des vestiges archéologiques découverts et d'apporter toute information nécessaire aux services de l'État pour étudier la possibilité d'une modification du projet. En Indre-et-Loire, des modifications techniques ont été préconisées pour limiter au maximum les atteintes sur des vestiges archéologiques ; elles peuvent concerner le type de fondations employées pour les tables de panneaux solaires, le passage de câblage hors sol, l'implantation des locaux techniques et des voieries. À défaut d'accord avec le maitre d'ouvrage sur les modifications préconisées, une fouille est prescrite sur les secteurs où le projet détruira les vestiges archéologiques identifiés. Le dispositif actuel de l'archéologie préventive est donc adapté aux problématiques des projets agrivoltaïques. Il participe au développement de la politique culturelle, patrimoniale et scientifique soutenue par le ministère de la culture, tout en garantissant un aménagement raisonné du territoire, respectant les enjeux de la transition écologique et la protection du patrimoine.
Auteur : M. Henri Alfandari
Type de question : Question écrite
Rubrique : Patrimoine culturel
Ministère interrogé : Culture
Ministère répondant : Culture
Dates :
Question publiée le 28 février 2023
Réponse publiée le 9 mai 2023