Fixation des prix et pénurie de médicaments
Question de :
M. Romain Daubié
Ain (2e circonscription) - Démocrate (MoDem et Indépendants)
M. Romain Daubié appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur la corrélation entre la fixation du prix des médicaments par le Comité économique des produits de santé (CEPS) et les pénuries qui font actuellement florès dans les officines de pharmacie. Eu égard au fonctionnement du modèle social français, le prix des médicaments n'est, en effet, pas déterminé par les fluctuations du marché mais fixé de manière administrative, le privant ainsi d'une certaine forme de souplesse dans sa régulation et pouvant générer des tensions entre l'offre et la demande. Selon France Assos santé, 45 % des patients touchés par la pénurie ont dû modifier leur traitement, voire y renoncer. Auditionnés par le Sénat, les médecins interrogés ont pointé du doigt des ruptures d'approvisionnements constatés en ville et à l'hôpital dès 2010. L'absence de fluidité de la communication entre le corps médical et l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) et un prix des médicaments les plus matures fixés en dessous de leurs coûts de production sont les premières causes identifiées qui ressortent des travaux de la commission d'enquête dédiée. Le cas de l'amoxicilline, antibiotique prescrit pour soigner les infections et du paracétamol, sont les plus préoccupants et soulèvent la question de la place du prix comme intermédiaire d'une relation harmonieuse entre patients et distributeurs. C'est d'autant plus impactant pour les médicaments pédiatriques. Aussi il souhaiterait lui demander si le Gouvernement a prévu de relever les prix pour que les laboratoires privilégient le marché français et ainsi permettre à la pénurie de s'éteindre dans les meilleurs délais.
Réponse publiée le 18 juillet 2023
Compte tenu de l'augmentation des signalements de ruptures et risques de ruptures de stock constatée ces dernières années, indépendamment de la pandémie de Covid-19, le comité de pilotage qui s'est réuni le 2 février 2023, a acté le lancement d'une phase de concertation de deux mois avec l'ensemble des parties prenantes. Leurs propositions serviront à construire une nouvelle feuille de route pluriannuelle permettant de lutter contre les pénuries de produits de santé dans le prolongement de la précédente feuille de route 2019-2022 qui a marqué des avancées majeures (plan de gestion des pénuries, obligation de détention de stocks de sécurité notamment). En outre, la liste de 450 médicaments dits « essentiels » car stratégiques pour la santé des patients a été établie sur la base des recommandations des autorités scientifiques. Cette liste, publiée le 13 juin 2023, est évolutive. À partir de cette liste, des travaux spécifiques vont être engagés pour mieux garantir la disponibilité des médicaments concernés (suivi renforcé sur les capacités d'approvisionnement, analyse des pratiques de prescription et des tendances d'achat, cartographie et renforcement des chaînes de production, mise en œuvre de solutions de production de secours, actions de prévention, etc.). Le Président de la République a également annoncé le 13 juin 2023, la relocalisation de la production d'une partie de ces médicaments essentiels. De plus, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé en lien avec la direction générale de la santé est chargée d'établir un plan de préparation des épidémies hivernales (sécurisation des stocks, amélioration de la mise à disposition des données, responsabilisation de l'ensemble des acteurs du soin et des patients, etc.) pour anticiper d'éventuelles tensions et renforcer notre capacité à faire face à des pics saisonniers de consommation de médicaments. Ce plan hivernal inclut une phase d'anticipation qui vise à sécuriser les approvisionnements afin de garantir la couverture des besoins et à communiquer sur les gestes barrières et les règles de bon usage des médicaments. Par ailleurs, un « Plan blanc Médicaments » activable en cas de situation exceptionnelle, nécessitant de prendre des mesures fortes pour sécuriser la prise en charge des patients, est en cours de préparation. Le Gouvernement a également annoncé un moratoire sur les baisses de prix des génériques stratégiques sur le plan industriel et sanitaire. Il est également prévu d'opérer des hausses de prix ciblées sur certains génériques stratégiques produits en Europe. Ces hausses de prix se feront en contrepartie d'engagements des industriels sur une sécurisation de l'approvisionnement du marché français. Enfin, au niveau européen, le règlement (UE) n° 2022/123 du 25 janvier 2022 qui a introduit des dispositions visant à prévenir et gérer les pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux considérés comme critiques, en renforçant le rôle de l'Agence européenne des médicaments est entré en application. Il s'agit là d'une première étape visant à mettre en place un cadre renforcé pour la notification et la surveillance des pénuries de médicaments et de dispositifs médicaux lors d'urgences de santé publique ou d'événements majeurs dans l'Union européenne. De même, dans le cadre du projet de révision de la législation pharmaceutique présenté par la Commission européenne, des mesures visant à anticiper et réduire les tensions d'approvisionnement sont prévues dans ce projet, reprenant les dispositions françaises (obligation d'avoir des plans de gestion des pénuries pour les laboratoires, liste de médicaments critiques, déclaration des ruptures notamment).
Auteur : M. Romain Daubié
Type de question : Question écrite
Rubrique : Pharmacie et médicaments
Ministère interrogé : Santé et prévention
Ministère répondant : Santé et prévention
Dates :
Question publiée le 16 mai 2023
Réponse publiée le 18 juillet 2023