16ème législature

Question N° 8947
de M. Louis Boyard (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Val-de-Marne )
Question écrite
Ministère interrogé > Solidarités, autonomie et personnes handicapées
Ministère attributaire > Intérieur et outre-mer

Rubrique > personnes handicapées

Titre > Traitement des disparitions des personnes en situation de handicap

Question publiée au JO le : 13/06/2023 page : 5291
Réponse publiée au JO le : 19/03/2024 page : 2212
Date de changement d'attribution: 12/01/2024

Texte de la question

M. Louis Boyard interroge M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées sur le traitement des disparitions des personnes en situation de handicap, en particulier les autistes. C'est un sujet qui soulève beaucoup d'inquiétudes et autant d'indignations chez les familles et proches de personnes autistes. En 2022, une pétition dénonçant « des disparitions trop souvent laissées pour compte de jeunes vulnérables : autistes ou en situation de handicap » avait déjà réuni près de 16 000 signatures, dont celles des députés Éric Coquerel et Stéphane Peu. Ce texte se faisait alors l'écho de nombreux témoignages relayant des dysfonctionnements dans le traitement des affaires de disparitions des personnes autistes, principalement des retards dans le signalement des alertes et le déploiement des moyens de recherches. Aussi, au regard du traitement réservé aux disparitions des personnes valides - pour qui alertes et moyens sont déployés immédiatement - il apparaît très clairement une inégalité de traitement. Dans ce contexte, les proches de personnes autistes redoublent d'inventivité à l'image du collectif Sécur'autisme qui produit à titre gratuit des « cartes sécurité ». Un dispositif qui facilite considérablement le secours à ces publics en cas de disparition et qui pourraient demain être pris en charge par l'État. Il l'interroge donc sur les moyens mis en place par l'État pour assurer la sécurité des personnes autistes portées disparues.

Texte de la réponse

Au même titre que toute autre personne atteinte d'un handicap mental, les personnes autistes font partie des personnes vulnérables particulièrement protégées. L'article 74-1 du Code de procédure pénale dispose que les disparitions de personnes mineures et les disparitions de personnes majeures protégées sont systématiquement considérées comme inquiétantes. Cet article met également l'accent sur les disparitions de personnes présentant des problèmes de santé, qu'ils soient physiques ou mentaux. Les personnes autistes font partie de cette dernière catégorie et leurs disparitions font l'objet d'une attention particulière de la part de la police et de la gendarmerie nationales.  Dès le signalement de la disparition, la personne disparue est inscrite dans le fichier des personnes recherchées (FPR), afin que cette information soit diffusée au niveau national. Des recherches sont immédiatement engagées et des moyens humains et techniques déployés afin de retrouver la personne, dont la disparition peut également faire l'objet d'un appel à témoins. Les officiers de police judiciaire et, sous leur contrôle, les agents de police judiciaire peuvent, sur instructions du procureur de la République, procéder aux actes prévus par les articles 56 à 62 du Code de procédure pénale (perquisitions, auditions, réquisitions). À l'issue d'un délai de huit jours, les investigations peuvent se poursuivre dans le cadre préliminaire ou dans le cadre d'une ouverture d'information pour recherche des causes de la disparition. Afin d'accentuer leur réactivité opérationnelle, la police et la gendarmerie nationales ont mis en place en 2022 un dispositif en lien avec le monde associatif, reposant sur l'anticipation. Afin de faciliter la déclaration de disparition inquiétante d'une personne autiste et/ou déficiente intellectuelle, ainsi que le travail de recherche des patrouilles, une « fiche d'informations pour les services d'urgence et d'enquête » a été élaborée, à la suite de la pétition des associations de parents d'autistes, en collaboration avec la délégation interministérielle à l'autisme et aux troubles du neuro-développement (DIA-TND). Elle permet de recueillir préventivement, en amont de toute disparition sur la base exclusive du volontariat, les éléments d'information relatifs à une personne porteuse d'un trouble mental (autisme et troubles du neuro-développement). Elle est renseignée par les proches aidants de la personne en situation de dépendance (famille, mandataire d'une mesure de protection juridique) et permet de collecter, de manière préventive, les informations pertinentes (caractéristiques physiques autant que comportementales, habitudes et modes de communication) pour les services d'urgence et d'enquête afin de favoriser la meilleure prise en charge possible, si cette personne venait à disparaître. Cette fiche est mise à disposition par les forces de sécurité intérieure et par les associations œuvrant dans le champ de l'autisme et/ou des déficiences intellectuelles. Elle est également accessible depuis les sites internet du ministère délégué chargé des personnes handicapées, du groupement national des centres de ressources autisme et des associations membres du conseil national consultatif des personnes handicapées. Les proches peuvent remplir cette fiche par eux-mêmes ou se rapprocher de leur commissariat de police ou brigade de gendarmerie pour obtenir de l'assistance. Cette prise de contact est de nature à créer un lien de confiance entre les proches et les policiers ou militaires de la gendarmerie rencontrés. Cette fiche d'information doit être conservée par les proches aidants sur le support de leur choix (papier, photo sur smartphone, etc.) et mise à jour aussi souvent que nécessaire. La conservation de la fiche par les forces de sécurité intérieure de l'État est prohibée afin de ne pas constituer un traitement de données à caractère personnel. En cas de fugue ou de disparition de leur proche, les familles peuvent immédiatement communiquer au service de police ou de gendarmerie territorialement compétent la fiche pré-remplie. Le contenu de ce document permet au chargé d'accueil de comprendre rapidement les caractéristiques principales du trouble mental de la personne recherchée et aux primo-intervenants d'adapter leurs comportements, voix et gestes aux besoins spécifiques de l'individu. Ce document contribue de façon déterminante aux recherches opérationnelles (quadrillage de la zone, vérifications auprès des établissements de santé, engagement d'une équipe cynotechnique, moyens aériens, etc.) et facilite les actes d'enquête (inscription au fichier des personnes recherchées, géolocalisation du téléphone mobile, etc.). La gendarmerie élargira prochainement ce dispositif aux personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer. Au-delà de cette fiche de renseignements constituée en amont d'une disparition, la personne en situation de handicap peut être enregistrée dans la base de données de la sécurité publique (BDSP) de la gendarmerie, soit à sa demande, soit à la demande de son tuteur ou de son curateur, soit à celle de son représentant légal si la personne est mineure. Cette inscription au motif « handicap/personne protégée » n'est pas automatique mais bel et bien subordonnée à l'accord des personnes susvisées. Dans la police nationale, la formation initiale donne toute sa place à la question du handicap, abordée dans les cours portant sur « la relation police-population », « les principes généraux de la communication », ainsi que dans les modules « accueil de la victime » et « approche psychologique des personnalités ». Par ailleurs, dans le cadre de la convention cadre signée le 26 janvier 2023 entre la direction générale de la police nationale et l'Union nationale des associations de parents de personnes handicapées intellectuelles (UNAPEI) et de leurs amis, l'UNAPEI s'est engagée à intervenir lors des formations de formateurs et au sein des écoles de police afin d'aborder la nécessaire prise en compte des spécificités des besoins des personnes en situation de handicap intellectuel. Au titre de la prévention, ce partenariat a également pour objectif d'améliorer les connaissances des policiers sur les publics accueillis (handicaps, conséquences, etc.), de les sensibiliser à l'accueil de ce public et d'échanger sur les éventuels besoins d'adaptation des pratiques professionnelles en fonction des situations rencontrées.