Rubrique > presse et livres
Titre > La concentration des médias par une poignée de milliardaires doit cesser !
M. Alexis Corbière appelle l'attention de Mme la ministre de la culture sur la concentration de l'industrie de culturelle et des médias par une poignée de milliardaires. L'information est un bien public fondamental. Or, elle se trouve actuellement profondément abîmée et menacée. La loi de 1986 relative à la liberté de communication prévoyait notamment un dispositif anticoncentration, composé de règles de droit commun, de prérogatives attribuées à une autorité administrative indépendante (le Conseil supérieur de l'audiovisuel, CSA, devenu l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, ARCOM) ainsi que de seuils de concentration spécifiques. En l'espace de 36 ans, cette loi a été révisée plus de 80 fois, mais continue pourtant d'avoir de nombreuses lacunes. En effet, aujourd'hui, la concentration des médias et de l'industrie culturelle atteint des sommets : 8 milliardaires et 2 millionnaires possèdent 81 % de la diffusion des quotidiens nationaux et 95 % de celle des hebdomadaires nationaux généralistes. Les dix-neuf chaînes privées de la télévision numérique terrestre sont désormais la propriété de six acteurs (Altice, TF1, M6, Canal+, NRJ Group, Amaury). Ces dernières années, Vincent Bolloré a pris le contrôle de Cnews et du groupe Canal+, de Capital, Géo et Gala, mais aussi de Lagardère qui comprend Europe 1, Paris Match, Le Journal du Dimanche. À cela il faut aussi ajouter ses parts dans la publicité avec le groupe Havas, l'un des plus grands groupes de communication au monde. De surcroît, le Gouvernement vient même de fragiliser plus encore l'indépendance de l'audiovisuel public en supprimant la redevance télé. C'est là l'exemple même du phénomène d'hyperconcentration, qui atteint des sommets avec une propagation vers le secteur culturel, notamment celui de l'édition. Vincent Bolloré souhaite en effet, après avoir pris le contrôle de Editis (numéro 1 du marché français), se rapprocher du groupe Hachette Livres, propriété de Lagardère. En d'autres termes, uniquement dans le monde de l'édition, Vincent Bolloré possédera bientôt plus de 70 % des livres scolaires, la moitié des livres de poche, une centaine de maisons d'édition, avec un quasi-monopole sur la distribution des livres. Une pareille concentration pose un problème de reprise en main idéologique des médias. Les batailles qui se mènent pour gagner des parts d'audience ont de lourdes conséquences sur la situation démocratique et politique. Par exemple, Canal + aurait refusé un documentaire consacré à la fraude fiscale et au Crédit Mutuel et Éditis la parution d'un livre cosigné par Guillaume Meurice aux éditions Le Robert. Une mécanique inverse existe aussi, comme l'illustre la très vaste campagne de promotion de l'ouvrage « Dieu, la science et les preuves » cosigné par Michel-Yves Bolloré, frère de Vincent Bolloré, ayant sans doute contribué au succès des ventes. À cela s'ajoute la question sociale. À chaque nouvelle acquisition, c'est le même modus operandi : démantèlement des rédactions et précarisation des conditions de travail, réduction sèche des personnels, sous-traitance à des agences de contenu, mise en avant d'un courant politique etc. Pour l'économiste Julia Cagé, les nouveaux patrons se comportent en cost killer : ils suppriment les « coûts » et produisent de l'information low cost. Il l'interroge donc sur sa position sur la concentration de l'industrie de culturelle et des médias par des milliardaires et sur les moyens qu'elle compte mettre en œuvre pour éviter le risque d'un quasi-monopole du monde de l'édition par un milliardaire ayant un but politique.