Question de : M. Emmanuel Mandon
Loire (3e circonscription) - Démocrate (MoDem et Indépendants)

M. Emmanuel Mandon appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur le déséquilibre de la représentation des communes issues d'une association (dites communes « Marcellin ») pour les élections sénatoriales. Le vendredi 9 juin 2023, tous les conseils municipaux étaient appelés à choisir les délégués qui voteront lors des élections sénatoriales au mois de septembre 2023. Le nombre de ces derniers à élire dépend du nombre d'habitants de la commune. Cependant, pour les communes issues de l'association d'autres communes, conformément à la loi du 16 juillet 1971, le nombre de délégués sénatoriaux d'une commune « Marcellin » est égal à celui auquel les anciennes communes auraient eu droit avant la fusion. Il en résulte parfois qu'une commune « Marcellin » se voit attribuer un nombre de délégués inférieur à celui qu'elle aurait obtenu si le calcul avait été réalisé par rapport à sa population totale. Dès lors, leur poids réel dans les élections sénatoriales est réduit de façon inéquitable. Des travaux sénatoriaux ont proposé une modification de l'article L. 290-1 du code électoral, selon laquelle le nombre de délégués d'une commune « Marcellin » ne peut être inférieur à celui auquel aurait droit une commune comptant la même population. Il lui demande quelle suite il compte donner à la proposition de modification ainsi faite.

Réponse publiée le 13 février 2024

Le législateur a, par la loi n° 71-588 du 16 juillet 1971 sur les fusions et regroupements de communes dite « loi Marcellin », institué un régime de fusion et d'association de communes ayant pour objectif de réduire le nombre de communes en France et de conforter le fait communal. La création de communes associées a pris fin avec la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 qui a substitué à ce régime celui des « communes nouvelles », nouvelle procédure de regroupement communal fondée sur le volontariat. Ce nouveau régime n'a cependant pas remis en cause le statut juridique des communes relevant de la loi du 16 juillet 1971. Les communes associées créées entre la loi du 16 juillet 1971 et la loi du 16 décembre 2010 ont ainsi conservé leur statut. Pour ces communes, le calcul du nombre de délégués sénatoriaux s'effectue en traitant séparément chacune des communes associées et la commune principale. En pratique, il est obtenu en définissant fictivement, à partir de la population municipale du dernier recensement authentifié, ce que serait l'effectif légal théorique du conseil municipal de chacune d'entre-elles, selon les modalités de l'article L. 2121-2 du Code général des collectivités territoriales (CGCT). De cette façon, le nombre de délégués de la commune principale ou de la commune associée qui compte moins de 9 000 habitants s'établit selon les règles fixées à l'article L. 284 du Code électoral, tandis que le nombre de délégués de la commune principale ou de la commune associée qui compte 9 000 habitants ou plus s'effectue selon les règles fixées à l'article L. 285 du même code. Le législateur a souhaité garantir aux communes ayant choisi de s'engager dans un mouvement de regroupement le nombre de délégués sénatoriaux qu'elles désignaient avant la fusion. Ainsi, plusieurs dispositions prévoient cette représentation des communes associées : l'article L. 284 alinéa 2 du Code électoral dispose que « dans le cas où le conseil municipal est constitué par application des articles L. 2113-6 et L. 2113-7 du CGCT, relatif aux fusions de communes dans leur rédaction antérieure à la loi n°2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, le nombre de délégués est égal à celui auquel les anciennes communes auraient eu droit avant la fusion ». De la même façon, l'article L. 290-1 du Code électoral dispose que « les communes associées, créées en application des dispositions de l'article L. 2113-11 du CGCT conservent un nombre de délégués égal à celui auquel elles auraient eu droit en l'absence de fusion. […] ». Les communes associées bénéficient donc de manière quasi-systématique d'un nombre de délégués sénatoriaux supplémentaire à celui qu'aurait une commune de la même strate démographique que la commune associée. Ainsi, à titre d'exemple, une commune associée D (1 250 habitants) regroupant trois anciennes communes A (1 000 habitants), B (50 habitants) et C (200 habitants) désigne 5 délégués sénatoriaux (3 pour la commune A, 1 pour B et 1 pour C), alors qu'une commune de 1 250 habitants ne relevant pas du régime d'association de la loi du 16 juillet 1971 n'aurait désigné que 3 délégués, en application de l'article L. 284 du Code électoral. Dans de très rares cas, notamment liés à la croissance démographique intervenue depuis le regroupement de communes, ce dispositif dérogatoire peut s'avérer défavorable en comparaison d'une commune d'une même strate démographique du fait d'effets de seuil négatifs. A titre d'exemple, une commune associée C (3 600 habitants) regroupant deux anciennes communes A (2 400 habitants) et B (1 200 habitants) désigne 8 délégués sénatoriaux (5 pour la commune A et 3 pour la commune B), alors qu'une commune de 3 600 habitants ne relevant pas du régime d'association de la loi du 16 juillet 1971 désigne 15 délégués, en application de l'article L. 284 du Code électoral. Les écarts de représentation des communes relevant du régime de la loi du 16 juillet 1971, favorables ou défavorables à ces dernières, pourraient toutefois connaître des évolutions en prévoyant que les communes associées retrouvent, à l'instar des communes nouvelles, un nombre de délégués sénatoriaux correspondant à celui que désigne une commune de la même strate de population, au sens de l'article L. 2121-2 du CGCT après deux renouvellement généraux de leur conseil municipal (cf. article L. 290 2 du Code électoral). Cette transition graduelle vers un retour au droit commun des communes à statut spécifique avait été la motivation initiale de la proposition de loi n° 503 (2017-2018), visant à adapter l'organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires, qui n'a toutefois pas abouti. Il convient enfin de noter que par la loi n° 2019-809 du 1er août 2019 visant à adapter l'organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires, le législateur n'a pas souhaité modifier le mode de calcul du nombre de délégués désignés par les communes associées, contrairement aux communes nouvelles relevant de l'article L. 290-2 du Code électoral qui ont vu leur mode de calcul évoluer.

Données clés

Auteur : M. Emmanuel Mandon

Type de question : Question écrite

Rubrique : Élections et référendums

Ministère interrogé : Intérieur et outre-mer

Ministère répondant : Intérieur et outre-mer

Dates :
Question publiée le 11 juillet 2023
Réponse publiée le 13 février 2024

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