FICHE QUESTION
9ème législature
Question N° : 28870  de  M.   Charzat Michel ( Socialiste - Paris ) QE
Ministère interrogé :  justice
Ministère attributaire :  justice
Question publiée au JO le :  21/05/1990  page :  2350
Réponse publiée au JO le :  18/03/1991  page :  1109
Rubrique :  Droits de l'homme et libertes publiques
Tête d'analyse :  Crimes contre l'humanite
Analyse :  Seconde guerre mondiale. internement de juifs en France. responsables. poursuites
Texte de la QUESTION : M Michel Charzat attire l'attention de M le garde des sceaux, ministre de la justice, sur la publication dans le magazine L'Express du 27 avril 1990 d'une enquete sur l'internement en France, puis la deportation de milliers d'enfants juifs ages de deux a seize ans. On ne peut que se feliciter d'une telle publication, car elle permet de lutter contre l'oubli, premiere arme des « falsificateurs de l'Histoire ». Il est revelateur que le responsable du principal mouvement d'extreme droite francais ait declare qu'il etait malsain de se souvenir ou de « ressusciter les periodes sombres de l'histoire de France ». Il est vrai que plusieurs de ses amis politiques ont, a l'epoque, cautionne ces crimes, et qu'il siege au Parlement europeen dans le meme groupe qu'un ancien SS Si le crime est connu, la sanction tarde a venir. Il est anormal pour un pays democratique que les responsables de ces crimes puissent finir leurs jours de facon paisible. Il desire savoir si toutes les responsabilites ont ete etablies. Ces camps, comme celui de Pithiviers, dependaient exclusivement de l'administration francaise. Il apparait que les representants de l'Etat vichyste n'ont jamais ete inquietes, voire questionnes sur ce sujet. Est-il exact que certains d'entre eux siegent encore au conseil de Paris ? Des procedures ont-elles ete ou peuvent-elles etre diligentees ? Ne convient-il pas de revoir les delais d'interdiction de consultation des archives, sous peine de ne voir jamais ecrite completement cette sombre page de l'histoire de France, les temoignages oraux ne pouvant etre confrontes aux pieces ecrites ?
Texte de la REPONSE : Reponse. - Le garde des sceaux rappelle que les faits auxquels se refere l'honorable parlementaire font l'objet d'une procedure judiciaire actuellement en cours, a la suite de deux plaintes assorties de constitution de partie civile du chef de crimes contre l'humanite deposees par l'association les Fils et Filles des deportes juifs de France et par la Federation nationale des deportes, internes, resistants et patriotes. Cette procedure pose des questions de principe complexes touchant a la determination de la juridiction competente pour instruire et juger les faits denonces - qui devait necessairement etre tranchee en dernier ressort in limine litis - et a l'existence d'une precedente condamnation prononcee par la Haute Cour de justice le 23 juin 1949 a l'encontre de Rene Bousquet. Aux termes d'un arret rendu par la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris le 19 novembre 1990 - aujourd'hui definitif apres le rejet, par la chambre criminelle de la Cour de cassation, le 31 janvier 1991 du pourvoi forme par Rene Bousquet -, il apparait que les faits reproches a ce dernier doivent etre instruits et eventuellement juges par les juridictions de droit commun, selon les regles definies par le code de procedure penale, soit la chambre d'accusation et au cas ou l'instruction ferait apparaitre contre Rene Bousquet charges suffisantes d'avoir commis tout ou partie des crimes qui lui sont imputes, la cour d'assises. Les investigations menees par la juridiction d'instruction necessiteront probablement de minutieuses recherches a caractere historique. Le garde des sceaux qui suit attentivement les developpements de cette procedure - que le principe du secret de l'instruction lui interdit d'expliciter davantage - veillera dans la limite de ses attributions a ce qu'elle parvienne a son terme dans les meilleurs delais possibles. S'agissant de la consultation des archives, l'article 7 alinea 3 de la loi no 79-18 du 3 janvier 1979 dispose que le delai au-dela duquel les documents d'archives publiques peuvent etre librement consultes est de cent ans a compter de la date de l'acte ou de la cloture du dossier pour les documents relatifs aux affaires portees devant les juridictions. Toutefois, l'article 8 de la meme loi prevoit qu'une derogation peut etre accordee avant l'expiration du delai precite, pratique assez couramment admise, notamment au profit de personnes effectuant des recherches a caractere historique. Les autorites judiciaires ne sont pas, quant a elles, astreintes aux memes limites, s'agissant plus particulierement des procedures d'information.
SOC 9 REP_PUB Ile-de-France O