FICHE QUESTION
9ème législature
Question N° : 33391  de  M.   Pinte Étienne ( Rassemblement pour la République - Yvelines ) QE
Ministère interrogé :  intérieur
Ministère attributaire :  intérieur
Question publiée au JO le :  10/09/1990  page :  4239
Réponse publiée au JO le :  15/10/1990  page :  4874
Rubrique :  Elections et referendums
Tête d'analyse :  Reglementation
Analyse :  Votes blancs. decompte specifique
Texte de la QUESTION : M Etienne Pinte attire l'attention de M le ministre de l'interieur sur l'interet que pourrait representer la reconnaissance du bulletin blanc comme suffrage exprime. Le bulletin blanc a, en effet, comme role de permettre a l'electeur qui ne serait pas satisfait des candidatures en presence, de le faire savoir. En outre, sa reconnaissance comme suffrage exprime permettrait de le distinguer du bulletin nul. Ainsi, les pourcentages obtenus par les elus seraient calcules plus equitablement ; l'ambiguite serait moins grande ; la clarte prevaudrait et la democratie avancerait. Il lui demande de bien vouloir etudier une reforme des modalites des scrutins en ce sens.
Texte de la REPONSE : Reponse. - La regle selon laquelle les bulletins « blancs » n'entrent pas en compte dans le resultat du depouillement est traditionnelle dans notre droit electoral. Elle a ete pour la premiere fois codifiee dans l'article 30 du decret reglementaire du 2 fevrier 1852, puis reprise dans l'article 9 de la loi du 29 juillet 1913, devenu par la suite l'article L 66 du code electoral. Il convient, tout d'abord, de nettement definir la signification qui doit etre accordee aux bulletins « blancs ». La personne qui prend soin de confectionner elle-meme, et a l'avance (puisqu'il n'en est pas mis a la disposition des electeurs), son bulletin « blanc » pour l'inserer ensuite dans l'enveloppe de scrutin est animee du scrupule d'accomplir exactement son devoir electoral, en meme temps qu'elle manifeste le souci de n'avantager aucun des candidats ou aucune des listes en presence. Que deviendrait cette volonte de neutralite si les bulletins « blancs » etaient comptabilises parmi les suffrages exprimes ? 1o Pour les elections a la representation proportionnelle, les sieges sont attribues a des listes, proportionnellement au nombre de voix qu'elles ont obtenues. Les bulletins « blancs » ne peuvent, par hypothese, entrainer l'attribution de sieges au profit d'une liste qui n'existe pas. Que ces bulletins soient comptabilises ou non parmi les suffrages exprimes ne modifie donc en rien la repartition mathematique des sieges entre les listes en presence. La reforme suggeree n'aurait d'autre effet que de compliquer inutilement les operations du depouillement, puisqu'il devrait etre prevu une totalisation speciale pour les bulletins « blancs », celle-ci n'existant pas, a l'heure actuelle, du fait que les votes « blancs » sont totalises avec les votes « nuls ». 2o Pour les elections au scrutin majoritaire a deux tours (elections des deputes, des conseillers generaux et des conseillers municipaux), le decompte des bulletins « blancs » parmi les suffrages exprimes aurait pour effet d'elever le chiffre de la majorite absolue. L'election d'un candidat ou d'une liste au premier tour serait ainsi rendue plus difficile, ce qui augmenterait le nombre des seconds tours. Le resultat final ne pourrait cependant guere avoir de chance d'etre modifie a l'issue du second tour, dans le cas d'un candidat ou d'une liste qui a obtenu au premier tour plus de voix que ses adversaires reunis. Il n'en reste pas moins que les votes « blancs » auraient joue au detriment du candidat ou de la liste arrives en tete, et au detriment d'eux seuls. Dans des cas limites, on pourrait d'ailleurs se trouver dans une « impasse » juridique, dans l'hypothese ou le nombre de bulletins « blancs » representerait la majorite absolue des suffrages au premier tour ou la majorite relative au second. Aucun candidat ne pourrait en effet alors etre proclame, si bien que le ou les sieges a pourvoir demeureraient vacants, avec la perspective d'une election partielle pour combler ces vacances. 3o Pour l'election presidentielle, l'article 7 de la Constitution prevoit que « le President de la Republique est elu a la majorite absolue des suffrages exprimes ». Dans le regime actuel, si cette condition n'est pas realisee au premier tour, elle l'est necessairement au second, puisque ne peuvent alors se presenter que « les deux candidats qui, le cas echeant apres retrait de candidats plus favorises, se trouvent avoir recueilli le plus grand nombre de suffrages au premier tour ». On concoit aisement que, si les bulletins « blancs » entrent dans le decompte des suffrages exprimes, donc dans le calcul de la majorite absolue, ils jouent automatiquement au premier tour a l'encontre du candidat arrive en tete, son election etant rendue plus difficile. Mais, resultat plus grave, il peut tres bien se faire qu'au second tour aucun des candidats n'obtienne la majorite absolue, surtout si les deux adversaires ne sont separes que par un nombre de voix relativement reduit. 4o Enfin, en cas de referendum, un projet est adopte a la majorite des suffrages exprimes. Si les bulletins « blancs » sont consideres comme des suffrages exprimes, le projet ne pourra etre adopte que si le nombre des bulletins « oui » est superieur au nombre de bulletins « non » et « blancs » reunis. Le projet pourrait meme etre rejete si aucun electeur n'avait vote « non », des lors que les votes « blancs » l'emporteraient sur les votes « oui ». Pour les referendums, voter « blanc » reviendrait ainsi a voter « non ». Comptabiliser les bulletins « blancs » parmi les suffrages exprimes serait donc sans effet pratique dans les elections a la representation proportionnelle. Dans tous les autres scrutins, en revanche, une telle reforme irait a l'encontre de la volonte de neutralite manifestee par les electeurs qui auraient depose un bulletin « blanc » dans l'urne. Compte tenu des observations qui precedent, l'auteur de la question comprendra qu'il ne peut etre envisage de retenir sa suggestion.
RPR 9 REP_PUB Ile-de-France O