FICHE QUESTION
9ème législature
Question N° : 54450  de  M.   Pons Bernard ( Rassemblement pour la République - Paris ) QE
Ministère interrogé :  travail, emploi et formation professionnelle
Ministère attributaire :  travail, emploi et formation professionnelle
Question publiée au JO le :  24/02/1992  page :  850
Réponse publiée au JO le :  25/05/1992  page :  2375
Rubrique :  Hotellerie et restauration
Tête d'analyse :  Personnel
Analyse :  Remunerations. calcul. pourcentage des recettes. mise en cause
Texte de la QUESTION : M Bernard Pons rappelle a Mme le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle que la renumeration du personnel en contact avec la clientele dans l'hotellerie et la restauration peut etre fixee sur le pourcentage des recettes percues. Il s'agit d'un usage tres repandu qui a fait l'objet des dispositions de la loi du 19 juillet 1933 (dite loi Godard) qui figure dans le code du travail a l'article L 147-1 Ce systeme de remuneration qui n'a jamais ete remis en cause jusqu'a ces derniers mois est un des facteurs de developpement de l'industrie hoteliere francaise. Il procede de la meme inspiration que les textes legislatifs concernant la participation des travailleurs aux fruits de l'entreprise. Cependant, depuis quelques mois, cet usage d'une remuneration au pourcentage est systematiquement remis en cause par les employeurs avec, en cas de refus des salaries, la mise en oeuvre d'une procedure de licenciement. Cette remise en cause atteint gravement un secteur d'activite pourtant performant, d'autant plus qu'elle s'accompagne souvent de rachats d'entreprises et de la mise en oeuvre de conceptions totalement etrangeres a la grande tradition de l'hotellerie francaise. Ces modifications profondes conduisent a des conflits collectifs de grande envergure qui tendent a se multiplier. Des negociations sont en cours au niveau national afin d'elaborer une convention collective applicable dans le secteur des hotels-cafes-restaurants. L'examen des modalites de remuneration, dans le cadre de ces negociations, traine en longueur. Certaines propositions des employeurs tendant a substituer au systeme actuel un mode de remuneration base sur un salaire fixe aurait pour effet d'entrainer une diminution des sommes percues par les salaries pouvant atteindre jusqu'a 40 p 100. Il est regrettable qu'elle se soit jusqu'ici contentee d'evoquer la possibilite pour les salaries de saisir les conseils de prud'hommes en cas de refus d'accepter le nouveau systeme de remuneration. La cour d'appel de Paris a d'ailleurs sanctionne pecuniairement divers etablissements qui avaient presente des propositions, refusees par les salaries, lesquels avaient alors ete victimes d'une procedure de licenciement. Cette situation peut difficilement durer, c'est pourquoi il lui demande si elle n'estime pas souhaitable d'interrompre la derive qui s'est manifestee en ce domaine en prenant l'initiative d'une procedure de mediation, d'ailleurs prevue par le code du travail.
Texte de la REPONSE : Reponse. - Le personnel des hotels-cafes-restaurants peut etre remunere selon deux modalites differentes. La remuneration peut tout d'abord etre calculee sur la base d'un forfait dont le montant est determine de gre a gre, entre employeur et salarie, compte tenu de la duree du travail, legale ou conventionnelle. Cette remuneration varie en fonction du nombre d'heures travaillees et supporte eventuellement les majorations dues au titre des heures supplementaires. Mais selon un usage tres repandu dans l'hotellerie et la restauration, la remuneration du personnel peut etre egalement assise sur un pourcentage de la recette percue par l'employeur sur les consommations. C'est dans le seul cas de mise en oeuvre de cet usage que la loi du 19 juillet 1933, dite « loi Godard », qui figure dans le code du travail a l'article L 147-1, a rendu obligatoire le reversement par l'employeur de la masse des sommes qu'il a encaissees « pour le service » entre les differents membres du personnel en contact avec la clientele. Cette loi a fait l'objet de deux decrets d'application, dont l'un en date du 4 juin 1936 fixe pour la region parisienne les modalites de repartition de ces pourboires. La transformation du mode de remuneration en vigueur dans un etablissement constitue une modification substantielle du contrat du travail que les salaries sont en droit de refuser. Il appartient des lors a l'employeur d'en tirer les consequences, soit en revenant sur sa decision, soit en procedant au licenciement des salaries concernes. Il est vrai qu'au cours de la periode recente, un certain nombre de grands hotels de la region parisienne ont entrepris de modifier le mode de remuneration de leur personnel en remplacant la remuneration au pourboire par un systeme de salaire fixe. Les litiges nes a l'occasion de cette evolution de la politique salariale des hotels concernes ont ete particulierement suivis par les services competents de l'inspection du travail, les salaries contestant la modification substantielle de leur contrat de travail ayant par ailleurs saisi dans certains cas les conseils de prud'hommes. Il est rappele, d'autre part, que si la modification des conditions de remuneration offertes aux salaries est possible sur le plan juridique, sous reserve des consequences attachees a la modification substantielle du contrat de travail, la fixation des salaires effectifs est soumise a la negociation annuelle obligatoire prevue par le code du travail dans les entreprises ou existent des delegues syndicaux ; le fait pour l'employeur de se soustraire a cette obligation est sanctionne penalement. Au-dela des negociations qui doivent se derouler dans les entreprises concernees, des negociations sont en cours au niveau national, au rythme d'une reunion chaque mois, afin d'elaborer une convention collective applicable dans le secteur des hotels, cafes, restaurants. Le theme des salaires, qui sera l'un des points essentiels de la discussion, n'a pas encore ete aborde par les partenaires sociaux. Le probleme de la remuneration au pourboire ne manquera pas de faire l'objet de debats approfondis. Il est precise enfin que la mediation est une procedure de reglement des conflits collectifs du travail qui peut etre engagee soit apres l'echec d'une procedure de conciliation soit en dehors de toute tentative de conciliation. Dans ce dernier cas de figure qui est celui qui se presente actuellement dans le secteur de l'hotellerie, deux possibilites de recours a la mediation existent : soit lorsque le conflit est lie a l'etablissement, la revision ou le renouvellement d'une convention de branche ou d'un accord professionnel ou interprofessionnel, soit lorsque les parties presentent conjointement une demande a cette fin. Telle n'etant pas la situation actuellement rencontre dans l'hotellerie, la possibilite d'une mediation ne peut etre envisagee.
RPR 9 REP_PUB Ile-de-France O