Points-clés
Le droit d’amendement est aujourd’hui la forme d’expression principale du droit d’initiative des députés.

Partagé avec le Gouvernement, ce droit, bien que libre et illimité, est toutefois strictement encadré par des dispositions constitutionnelles, organiques et réglementaires inspirées du « parlementarisme rationalisé ».

Les plus importantes portent sur la recevabilité financière (les amendements des parlementaires ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique) et législative (les amendements doivent relever du domaine de la loi) des amendements.

D’autres restrictions viennent en complément : elles portent principalement sur les délais de dépôt, sur l’examen préalable par la commission saisie au fond, sur le lien avec le texte en discussion ou sur les restrictions qui s’appliquent après la première lecture.

En séance publique, l’ordre d’appel des amendements et les modalités de leur discussion font l’objet de dispositions réglementaires précises qui assurent une organisation claire des débats et permettent l’expression de toutes les opinions.

 

Le droit d’amendement est le droit de soumettre au vote des assemblées parlementaires des modifications aux textes dont elles sont saisies, qu’il s’agisse de projets de loi (d’initiative gouvernementale) ou de propositions de loi (d’initiative parlementaire). Il peut être considéré comme un « prolongement » du droit d’initiative législative ; avec le temps, il est même devenu dans de nombreux parlements et notamment en France la forme d’expression principale du droit d’initiative des parlementaires.

Il trouve sa source dans le premier alinéa de l’article 44 de la Constitution qui énonce que « les membres du Parlement et le Gouvernement ont le droit d’amendement ». Depuis la révision du 23 juillet 2008, cet article précise que ce droit « s’exerce en séance ou en commission selon les conditions fixées par les règlements des assemblées, dans le cadre déterminé par une loi organique ».

Les caractères principaux du droit d’amendement sont de trois ordres :

–    c’est un droit partagé entre le Gouvernement et les parlementaires ;

–    c’est un droit individuel ou collectif (contrairement aux questions, par exemple, les amendements peuvent être co-signés) ;

–    c’est un droit illimité (sous réserve des restrictions présentées ci-après), ce qui peut en faire un moyen d’obstruction.

Le principe général, affirmé par l’article 45 de la Constitution, est que le droit d’amendement s’exerce librement au stade de la première lecture : tout amendement est recevable à ce stade dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte. Au cours des lectures suivantes, les amendements ne peuvent porter que sur les dispositions restant en discussion, ce qui exclut les amendements introduisant des dispositions nouvelles. Il s’agit, en outre, d’un droit encadré par la Constitution, dans l’esprit du parlementarisme rationalisé qui a présidé à son élaboration.

I. –    L’ENCADREMENT DU DROIT D’AMENDEMENT

Les règles qui suivent sont applicables aux amendements comme aux sous amendements. 
Toutefois, les sous-amendements ne sont pas recevables lorsqu’ils contredisent le sens de l’amendement ou excèdent son champ. En revanche, les délais de dépôt ne leur sont pas opposables.

1. –    LE CONTRÔLE DE LA RECEVABILITÉ FINANCIÈRE DES AMENDEMENTS
a)    Principe général

L’article 40 de la Constitution précise que les amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l’aggravation d’une charge publique. La rédaction employée permet de présenter un amendement diminuant une ressource publique, sous réserve qu’il soit gagé par l’augmentation à due concurrence d’une autre ressource publique ; en revanche, elle proscrit toute compensation dans le domaine des charges publiques.

La jurisprudence constitutionnelle a précisé la portée de l’irrecevabilité financière. Elle a ainsi décidé qu’elle s’appliquait non seulement aux dépenses de l’État mais aussi à celles des autres personnes publiques et de diverses structures bénéficiant de financements publics qui assurent des missions d’intérêt public. Il résulte également de cette jurisprudence que l’incidence des mesures proposées se juge par rapport au texte examiné ou au droit existant, s’il est plus favorable.

b)    La recevabilité financière des amendements aux projets de loi de finances et aux projets de loi de financement de la sécurité sociale

Le contrôle de la recevabilité financière des amendements aux projets de loi de finances et aux projets de loi de financement de la sécurité sociale obéit à des règles particulières :

–    les règles applicables aux lois de finances ont été assouplies à compter de l’examen du projet de loi de finances pour 2006, qui est le premier à avoir été présenté en application de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001.
Cette loi organique a modifié les modalités du contrôle budgétaire du Parlement, en substituant à l’ancienne répartition des crédits par ministères, titres de dépenses puis chapitres budgétaires, une répartition distinguant plus d’une trentaine de missions de l’État et, à l’intérieur de celles-ci, environ 140 programmes. L’article 47 de la loi organique précitée précise que la notion de charge publique doit être appréciée au niveau de chaque mission, ce qui permet dorénavant aux parlementaires de proposer, à l’intérieur d’une même mission, des augmentations de crédits au sein d’un programme compensées par une diminution d’autres crédits au sein d’un autre programme ; en outre, les parlementaires ont la faculté de créer un programme nouveau en compensant cette mesure par la diminution des crédits affectés à un autre programme de la même mission ;

–    pour les projets de loi de financement de la sécurité sociale, le paragraphe IV de l’article L.O. 111-7-1 du code de la sécurité sociale précise que, s’agissant des amendements portant sur les objectifs de dépenses inscrits en loi de financement, la charge s’entend de chaque objectif de dépenses par branche ou de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM).
Ce dernier assouplissement, introduit par une loi organique du 2 août 2005, permet en principe aux parlementaires d’opérer des arbitrages au sein de l’ONDAM ou des objectifs de dépenses par branche.

c)    Les modalités du contrôle

Il convient de distinguer les amendements déposés en commission de ceux déposés en séance.

Dans le premier cas, il revient au président de la commission et, en cas de doute, à son bureau, d’apprécier la recevabilité de l’amendement au regard de l’article 40 de la Constitution, au besoin après avis du président ou du rapporteur général de la commission des finances, ou d’un membre du bureau de la commission des finances désigné à cet effet. Les amendements ainsi déclarés irrecevables ne sont pas examinés par la commission. Le Gouvernement ou un député peut également opposer à tout moment l’article 40 de la Constitution à une modification apportée par une commission au texte d’un projet ou d’une proposition de loi, c’est-à-dire à un amendement adopté par une commission et intégré dans le texte qui servira de base à la discussion en séance publique. L’irrecevabilité est appréciée par le président ou le rapporteur général de la commission des finances ou un membre de son bureau désigné à cet effet.

S’agissant des amendements déposés en vue de leur examen en séance, c’est le Président de l’Assemblée qui est chargé d’en apprécier la recevabilité financière. Cependant, selon un usage constant, le Président suit quasiment toujours l’avis du président de la commission des finances ou, à défaut, du rapporteur général ou d’un membre du bureau de la commission des finances désigné à cet effet (l’article 89, alinéa 3, du Règlement prévoit cette consultation « en cas de doute »). Tous les amendements litigieux sont ainsi renvoyés, lors de l’enregistrement, au président de la commission des finances, et son avis joue un rôle déterminant. Lorsque l’avis conclut à l’irrecevabilité, l’amendement est renvoyé à l’auteur. Il n’est pas mis en distribution et ne sera pas appelé en discussion.

Cette procédure de contrôle a priori n’interdit pas d’opposer ultérieurement l’irrecevabilité financière aux propositions de loi et aux amendements. Cette faculté, prévue par l’article 89, alinéa 4, du Règlement, est reconnue aussi bien au Gouvernement qu’à tout député. En pratique, l’opposition est rarement formulée à ce stade puisque la première vérification, faite au moment du dépôt, devrait avoir éliminé d’office les initiatives encourant l’irrecevabilité.

L’irrecevabilité financière peut cependant être opposée aux amendements mis en distribution. Dans ce cas, l’appréciation de recevabilité est portée dans les mêmes conditions que lors du dépôt, c’est-à-dire sur décision du Président de l’Assemblée après avis du président de la commission des finances. Compte tenu de l’examen systématique de recevabilité des amendements au dépôt, il n’y a lieu de procéder à une nouvelle consultation que dans des cas exceptionnels : il en va ainsi, par exemple, lorsque la discussion fait apparaître un fait nouveau mettant en cause l’avis de recevabilité formulé au moment du dépôt.

Il est à noter que la procédure de contrôle de la recevabilité financière organisée par le Règlement confie aux seules instances parlementaires le soin de statuer sur la question de recevabilité au cours de la procédure législative. En cas de litige sur la recevabilité d’un amendement – en particulier lorsque le Gouvernement conteste la recevabilité affirmée par l’autorité parlementaire compétente –, c’est la décision de cette dernière qui prévaut, sans appel, à ce stade, à un juge extérieur, contrairement à ce qui est prévu en matière de recevabilité « législative ».

Les décisions prises par les instances parlementaires dans le domaine de la recevabilité financière ne peuvent être contestées que par la voie du recours devant le Conseil constitutionnel, présenté en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, après l’adoption de la loi. Le Conseil constitutionnel se reconnaît en effet compétent pour apprécier s’il a été fait, dans le cours de la procédure législative, une application correcte de l’article 40 de la Constitution, qu’il s’agisse des décisions d’irrecevabilité ou de recevabilité financière. Dans ce dernier cas, cependant, le Conseil estime qu’il ne peut être saisi que si l’exception d’irrecevabilité financière a été soulevée devant la première chambre qui a été saisie de l’amendement.

2. –    LE CONTRÔLE DE LA RECEVABILITÉ LÉGISLATIVE DES AMENDEMENTS

L’article 41 de la Constitution prévoit que « s’il apparaît au cours de la procédure législative qu’une proposition ou un amendement n’est pas du domaine de la loi (...), le Gouvernement ou le président de l’assemblée saisie peut opposer l’irrecevabilité ». En cas de désaccord entre eux, « le Conseil constitutionnel, à la demande de l’un ou de l’autre, statue dans un délai de huit jours ».

Initialement, seul le Gouvernement pouvait opposer l’irrecevabilité et, dans la pratique, la complexité de la procédure s’est traduite par une faible utilisation de celle-ci. En confiant ce droit au Président de l’Assemblée nationale, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a entendu lui donner un second souffle.

Une différence majeure qui oppose cette procédure à celle destinée à assurer le respect de l’article 40 est que la recevabilité législative n’est pas systématiquement contrôlée au moment du dépôt des propositions et des amendements parlementaires : ce contrôle requiert l’intervention du Gouvernement ou du Président de l’Assemblée.

Mettant en œuvre l’article 41 de la Constitution, l’article 93 du Règlement de l’Assemblée nationale prévoit ainsi que l’irrecevabilité d’une proposition ou d’un amendement peut être opposée à tout moment tant par le Président de l’Assemblée que par le Gouvernement. Il précise également que les modifications apportées par amendement au texte dont une commission était saisie initialement peuvent aussi faire l’objet d’une telle contestation. 

Depuis la réforme du Règlement issue de la résolution du 4 juin 2019, le président de la commission saisie au fond adresse au Président de l’Assemblée nationale une liste des amendements dont il estime qu’ils ne relèvent pas du domaine de la loi. 

Les troisième et quatrième alinéas de l’article 93 envisagent respectivement le cas d’une irrecevabilité opposée par le Gouvernement et celui d’une irrecevabilité opposée par le Président de l’Assemblée. Si l’irrecevabilité est opposée par le Gouvernement, il revient alors au Président de l’Assemblée de se prononcer, tandis que si l’irrecevabilité est opposée par ce dernier, il doit consulter le Gouvernement. En cas de désaccord entre le Gouvernement et le Président de l’Assemblée, la discussion est suspendue et le Président saisit le Conseil constitutionnel. 

Dès lors que le Président de l’Assemblée envisage d’opposer l’irrecevabilité ou doit se prononcer sur l’irrecevabilité opposée par le Gouvernement, il peut consulter le président de la commission des lois ou un membre du bureau de cette commission désigné à cet effet.

3. –    AUTRES RESTRICTIONS AU DROIT D’AMENDEMENT
a)    Restrictions liées à la bonne organisation du débat parlementaire

Pour permettre une discussion ordonnée et cohérente des articles d’un texte de loi et des amendements qui s’y rapportent, et pour donner à chaque acteur du débat, Gouvernement, rapporteur et députés, le temps de préparer cette discussion, il est nécessaire de prévoir une date limite pour le dépôt de ces amendements. La réforme du Règlement du 27 mai 2009 a institutionnalisé le délai de dépôt des amendements en commission : les amendements doivent être déposés au secrétariat de la commission au plus tard le troisième jour ouvrable, à 17 heures, précédant l’examen du texte en commission. Elle a modifié le délai pour les amendements déposés sur le texte discuté en séance en le portant également au troisième jour ouvrable précédant l’examen du texte en séance, à 17 heures, au lieu de la veille de la discussion à 17 heures, comme c’était le cas depuis 2006.

Le Conseil constitutionnel a admis la fixation de tels délais sous réserve que les présidents de commissions, s’agissant de l’examen des textes par ces dernières, ou la Conférence des présidents, s’agissant de la séance publique, puissent fixer un autre délai si le délai de droit commun ne permet pas que soient respectées les « exigences de clarté et de sincérité » des débats, et ce, afin de garantir pleinement « le caractère effectif du droit d’amendement conféré aux parlementaires par l’article 44 de la Constitution » (Décision n° 2009-581 DC du 25 juin 2009). Pour les amendements en séance, la loi organique du 5 avril 2009 impose qu’en tout état de cause, les amendements des députés soient déposés avant le début de l’examen du texte en séance.

Après l’expiration du délai de dépôt, restent recevables les sous-amendements, les amendements du Gouvernement et de la commission saisie au fond, ainsi que les amendements portant sur les articles modifiés ou ajoutés par un amendement du Gouvernement ou de la commission au fond déposé hors délais.

b)    Irrecevabilité liée à l’objet de l’amendement

L’article 98 du Règlement de l’Assemblée nationale énonce que les amendements ne peuvent porter que sur un seul article. 

Les sous-amendements ne peuvent contredire le sens de l’amendement qu’ils visent et ne peuvent être sous-amendés.

En outre, conformément à l’article 45 de la Constitution, ce même article 98 admet la recevabilité, en première lecture, de tout amendement « dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ». Il résulte de cette disposition la prohibition des « cavaliers législatifs ».

Le contrôle de la recevabilité des amendements au regard de cette règle est exercé, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, au stade de leur dépôt, en commission, puis en séance. Le Conseil constitutionnel requiert que le lien soit apprécié au regard du contenu des articles « du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie ».

c)    Restriction liée à l’examen en commission

En application de l’article 44, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement peut s’opposer à la discussion des amendements qui n’ont pas été soumis à la commission saisie au fond. Cette arme de procédure n’est généralement utilisée qu’en cas d’obstruction manifeste, à l’égard d’amendements déposés après la dernière réunion de la commission.

d)    Restrictions liées aux nécessités de la procédure législative

Comme on l’a vu, la procédure législative, fondée sur un système de navette entre les deux assemblées, vise à rapprocher progressivement leurs points de vue respectifs en vue de l’adoption d’un texte identique. Dès lors, il est logique que tous les articles de loi qui, à un stade donné de la procédure, ont été adoptés dans les mêmes termes par les deux assemblées, sortent du champ de la navette et ne soient plus amendables : on dit alors que ces articles sont « conformes ». 

Sont également prohibés les amendements qui remettraient en cause des dispositions adoptées conformes en introduisant dans le texte des additions incompatibles. Il peut seulement être fait exception aux règles qui viennent d’être exposées pour opérer une coordination avec des textes en cours d’examen, pour rectifier une erreur matérielle ou pour assurer le respect d’une disposition constitutionnelle.

Après la première lecture, les amendements doivent être en relation directe avec une disposition restant en discussion, sous réserve des trois exceptions précitées. Cette règle, inscrite de longue date dans le Règlement des assemblées, a été progressivement consacrée par le Conseil constitutionnel entre 1998 et 2006. Elle prohibe, en principe, l’introduction, à ce stade de la navette, d’articles additionnels. Le Conseil constitutionnel n’hésite pas à censurer, en outre, les dispositions nouvelles introduites sous forme de paragraphes additionnels au sein d’un article encore en discussion.

Le texte issu des délibérations de la commission mixte paritaire fait l’objet de restrictions particulières à l’exercice du droit d’amendement, fondées sur la lettre de l’article 45, alinéa 3, de la Constitution qui prévoit que seuls sont recevables les amendements du Gouvernement et les amendements parlementaires dont le Gouvernement a accepté le dépôt. Ces restrictions se justifient par la nécessité de ne pas dénaturer l’accord sur un texte commun qui a pu être trouvé entre les deux assemblées.

Lorsque le Gouvernement décide, en application de l’article 45, alinéa 4, de la Constitution, de donner le dernier mot à l’Assemblée nationale par le biais d’une ultime lecture dite « lecture définitive », les seuls amendements recevables au dernier texte voté par l’Assemblée nationale sont ceux précédemment adoptés par le Sénat, en séance ou en commission, au stade de la nouvelle lecture.

e)    Le vote bloqué

Conséquence logique de l’existence de procédures d’adoption contraignantes exprimant le parlementarisme rationalisé voulu par les rédacteurs de la Constitution de 1958, l’article 44, alinéa 3, de la Constitution autorise le Gouvernement à demander à l’Assemblée saisie de se prononcer par un seul vote sur tout ou partie du texte en discussion, les seuls amendements alors retenus étant ceux proposés ou acceptés par le Gouvernement.

f)    Restrictions liées à la nature du texte discuté

Compte tenu de leur nature même, certains textes ne peuvent être amendés. C’est par exemple le cas des résolutions déposées en application de l’article 34-1 de la Constitution ou des motions visant à soumettre à référendum certains projets de loi.

De même, les textes des conventions internationales annexés aux projets de loi autorisant leur ratification ne peuvent faire l’objet d’amendements, l’Assemblée se bornant à conclure à l’adoption ou au rejet de ces projets de loi d’une nature particulière.

g)    Restrictions liées à la procédure de discussion retenue

La procédure de législation en commission, introduite aux articles 107 1 à 107-3 du Règlement par la résolution du 4 juin 2019, conduit à ce que le droit d’amendement des députés et du Gouvernement s’exerce principalement au stade de la commission. L’utilisation de cette procédure entraîne donc, logiquement, une restriction de l’exercice du droit d’amendement en séance publique, les seuls amendements recevables étant ceux destinés à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec un texte en navette ou à corriger une erreur matérielle. 

La procédure de législation en commission ne peut être engagée ni sur les propositions ou projets de loi constitutionnelle, ni sur les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale. Elle peut, selon les cas, porter sur l’ensemble des articles d’un texte ou sur une partie seulement. Les articles non concernés par la procédure sont discutés dans les conditions de droit commun.

II. –    LA PRÉSENTATION MATÉRIELLE DES AMENDEMENTS ET L’ORGANISATION DE LEUR DISCUSSION

1. –    PRÉSENTATION MATÉRIELLE ET DIFFUSION
a)    Présentation matérielle

Les amendements doivent être formulés par écrit, signés par au moins un de leurs auteurs et déposés sur le bureau de l’Assemblée (c’est-à-dire, en pratique, auprès de la division de la Séance) ou en commission. Le dépôt s’effectue, concrètement, sur le portail informatique dédié dénommé « Eloi ». La même exigence de présentation par écrit s’applique aux sous-amendements.

Tout amendement comporte un dispositif, qui précise son insertion dans le texte et son contenu, et un exposé sommaire, qui décrit brièvement l’objectif de l’amendement.

b)    Diffusion

Les amendements et sous-amendements sont mis en ligne sur le site de l’Assemblée nationale. Concrètement, les députés disposent, en commission comme en séance publique, d’un accès à une application informatique dénommée « Eliasse », qui regroupe tous les amendements et sous-amendements classés par ordre d’examen. Cette application est mise à jour tout au long de la discussion parlementaire, pour tenir compte des éventuels retraits, dépôts d’amendements et de sous-amendements ou modifications de l’ordre d’examen (voir infra). 

Tout amendement porte naturellement le nom de son auteur. En commission, les amendements peuvent avoir pour auteurs le Gouvernement, le rapporteur, le cas échéant le rapporteur pour avis et les autres députés. En séance publique, on distingue les amendements du Gouvernement, ceux de la commission saisie au fond et les amendements des députés. Il faut souligner que les amendements adoptés par la commission lors de la réunion consacrée à l’examen du rapport sont intégrés au texte qui servira de base à la discussion en séance publique (sauf dans les cas où la discussion en séance porte sur le texte initial).

2. –    ORGANISATION DE LA DISCUSSION DES AMENDEMENTS
a)    Ordre d’appel

La méthode de classement des amendements n’est pas sans importance puisque l’adoption d’un amendement a pour conséquence de faire « tomber » (c’est-à-dire de rendre sans objet) tous les amendements proposant des solutions concurrentes.

La méthode utilisée repose sur la combinaison de deux principes :

–    d’un point de vue formel, l’ordre de classement doit aller du général au particulier : une suppression d’article est appelée avant la suppression d’un alinéa, et celle-ci avant la suppression d’une phrase, qui précède elle même une simple suppression de mots, etc. ;

–    en ce qui concerne le sens des amendements, ils sont mis aux voix en commençant par ceux qui s’écartent le plus du texte proposé et dans l’ordre où ils s’y opposent, s’y intercalent ou s’y ajoutent.

Lorsque plusieurs amendements, exclusifs l’un de l’autre, sont en concurrence, le président de séance peut les soumettre à une discussion commune permettant aux députés d’entendre tous leurs auteurs avant qu’ils ne soient mis aux voix séparément.

Enfin, les amendements déposés par le Gouvernement ou la commission saisie au fond bénéficient d’une priorité de discussion par rapport à ceux des députés ayant un objet identique.

Concrètement, l’ordre d’appel retenu est matérialisé par un « dérouleur », c’est-à-dire une liste des amendements par ordre d’appel (la « feuille jaune »). Ce document est disponible sous deux formats accessibles sur l’application Eliasse et depuis le site internet de l’Assemblée. Il est actualisé en temps réel pendant la séance. Ces informations sont également projetées, pour les députés et le Gouvernement, sur les écrans installés dans la salle des Séances.

b)    Modalités de discussion

Lors de l’examen d’un amendement, le président de séance donne successivement la parole à :

–    l’auteur ou l’un des auteurs de l’amendement pour présenter son objet et en défendre l’intérêt (les amendements dont les auteurs sont absents ne sont pas appelés) ;

–    la commission saisie au fond ou la commission saisie pour avis si celle ci a reçu une délégation au fond ; 

–    le Gouvernement ;

–    éventuellement, deux orateurs, dont l’un au moins d’opinion contraire.
L’amendement est ensuite mis aux voix par le président de séance qui rappelle le sens de l’avis exprimé par le Gouvernement et par la commission saisie au fond.

Il convient de préciser que le temps de parole pour présenter un amendement est différent selon la procédure qui régit l’examen du projet ou de la proposition de loi auquel s’applique l’amendement. D’une manière générale, les interventions sur les amendements, autres que celles du Gouvernement (lequel n’est soumis à aucune contrainte de temps), ne peuvent excéder deux minutes. Toutefois, si la Conférence des présidents a décidé de fixer la durée maximale de l’examen du texte (temps législatif programmé), les interventions dans la discussion générale, sur les articles et sur les amendements ne sont pas limitées tant que n’est pas épuisé le temps attribué au groupe politique auquel appartient l’orateur. Lorsqu’un groupe a épuisé son temps de parole, ses membres ne peuvent plus s’exprimer. Leurs amendements sont alors mis aux voix sans débat.
 

ANNEXE

Principales formules d’amendements

Afin de simplifier la présentation des amendements, chacun des alinéas des textes soumis à l’Assemblée nationale est numéroté. Un amendement qui porte sur un ou plusieurs alinéas d’un texte fait donc référence à son numéro.

1.     Suppressions

Supprimer        cet article.
                            l’alinéa n.
                            la n-ième phrase de l’alinéa n.

À la n-ième phrase de l’alinéa n, supprimer les mots : « … »

2.     Nouvelles rédactions

Rédiger ainsi        cet article : « ……. ».
                                l’alinéa n : « … ».
                                la n-ième phrase de l’alinéa n : « … ».

Substituer à l’alinéa n les n alinéas suivants : « … ».

Substituer à la n-ième phrase de l’alinéa n les n phrases suivantes : « … ».

Substituer aux m-ième et n-ième phrases de l’alinéa n la phrase suivante : « … ».

3.     Substitutions

À la n-ième phrase de l’alinéa n, substituer aux mots : « … » les mots : « … ».

Rédiger ainsi le début     de cet article : « … » (le reste sans changement).
                                            de l’alinéa n : « … » (le reste sans changement).
                                            la n-ième phrase de l’alinéa n : « … » (le reste sans changement).

 

Après le(s) mot(s) : « … », rédiger ainsi la fin      de cet article : « … » .
                                                                                    de l’alinéa n : « … » .
                                                                                    de la n-ième phrase de l’alinéa n : « … ».

4.     Insertions et compléments

–      Après l’alinéa n,
        Avant l’alinéa n,   insérer l’alinéa suivant : « … ».
        Compléter cet article par l’alinéa suivant : « … » .

–      Au début de l’alinéa n, 
        Après la n-ième phrase de l’alinéa n,          insérer la phrase suivante : « … »
        Après la dernière phrase de l’alinéa n,
        Compléter l’alinéa n par la phrase suivante : « … ».

–      Rédiger ainsi le début de la n-ième phrase de l’alinéa n : « … » (le reste sans changement).
        À la n-ième phrase de l’alinéa n, après le(s) mot(s) : « … », insérer le(s) mot(s) : « … ».
        Compléter la n-ième phrase de l’alinéa n par le(s) mot(s) : « … » .
 

Septembre 2023